Petites explications du fort complexe contentieux juridique qui oppose le bien brushé Alain de Pouzilhac au langoureux Vincent Bolloré, depuis l’épisode de la prise de contrôle d’Havas par le patron breton.
Peu connu du grand public, Alain de Pouzilhac est un patron qui figure pourtant sur les listes des plus gros salaires des PDG. Il faut dire qu’avant de quitter, en 2005, le groupe mondial de communication Havas, dont il a été le patron depuis 1982, tout en étant président d’une autre structure du groupe (Eurocom), Pouzilhac avait fait le plein de beaux salaires… et d’avantages. Sa rémunération (fixe plus bonus) pour 2002 s’élevait à 1,4 million d’euros. En 2003, il touche 1 million et l’année d’après, 2,73 millions d’euros. Joli !
En janvier 2002, après qu’Havas soit devenue une division de Vivendi Universal, dont il est le directeur général, Pouzilhac négocie une super transaction en guise de fin de contrat de travail : 1,5 million d’euros. Mais Eurocom, dont il reste président, continue à lui verser des sous. Jusqu’au moment où l’entrée de Vincent Bolloré dans le groupe, à laquelle Pouzilhac s’oppose dès le début, provoque une crise et conduit à sa révocation par le conseil d’administration du 26 juin 2005.
En urgence, cinq jours avant sa révocation, un autre conseil d’administration programme le versement à son futur ex-patron d’une série d’indemnités, que Bolloré contestera plus tard, assurant entre autres que le PV de ce conseil d’administration miraculeux pour Pouzilhac n’avait pas été approuvé dans les formes. Mais bon, en attendant, de chouettes cadeaux d’adieu sont engagés, comme une indemnité transactionnelle (3 millions d’euros) censée réparer les préjudices causés par la révocation, la faculté d’exercer avant l’heure un programme de souscription d’actions, la mise en place d’un plan d’option de souscription d’actions sur 300 000 options, la conclusion d’un accord de non-concurrence s’élevant à 3,4 millions d’euros, versés par bimestres. Sans oublier une indemnité de rupture s’élevant à 1,8 million de dollars du contrat avec EuroRSCG New-York, une filiale de Havas. Et oui, c’est ainsi : plus il y a de contrats, plus il y a d’indemnités…
De quoi faire bondir, peut-être un peu tard, l’ami de Nicolas Sarkozy, Vincent Bolloré. Le financier breton a sorti sa calculette : selon lui, Alain de Pouzilhac se serait fait attribuer pour 10 millions d’euros à l’occasion de son départ. A rapprocher, insiste l’entourage de l’homme d’affaires, des pertes cumulées de Havas sur les 4 derniers exercices, soit près de 400 millions d’euros. Si on commence à examiner les performances des patrons…
Après avoir versé un temps les échéances de non-concurrence, la nouvelle direction de Havas a mis le holà en juillet 2006. Et Bolloré s’est décidé à attaquer Pouzilhac devant les tribunaux, déposant des plaintes et exigeant le remboursement d’une partie des sommes. La justice n’a pas encore tranché définitivement sur ce point. « Il n’y a de toute façon pas de charges réelles contre Alain de Pouzilhac, assure son avocat Olivier Metzner à Bakchich. Toutes les indemnités et les sommes dont il est question ont été votées par le conseil d’administration de Havas en bonne et due forme. D’ailleurs on voit que l’enquête ne progresse pas ». Jusqu’à présent, le parquet et la police, qui décortiquent les documents fournis par Havas, se sont bornés à entendre les nouveaux dirigeants du groupe de communication, dont longuement Esther Gaide, directrice financière, afin d’éclairer les plaintes déposées.
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