La campagne électorale débute officiellement ce week end au Sénégal. Quand tout le pays pressent que le scrutin du 25 février n’aura pas lieu.
« Plus que trois semaines avant les élections, et quelques jours avant le démarrage de la campagne officielle ». Rire général, dans la presse comme dans la rue. Le ministre de l’Intérieur sénégalais, le trop zélé Ousmane Ngom a réussi son coup. Dérider les Sénégalais, las des délestages électriques, circonspects devant les grands travaux du Président Wade et agacé par les rumeurs de corruptions qui circulent dans Dakar l’hableuse. Mais se trouvent toujours quelque mauvais bougres pour se lamenter. « Sept ans, on a eu sept ans pour préparer un scrutin présidentiel et on y est pas arrivé », geint un conseiller de la présidence, somme toute mauvais public.
Car le premier flic du pays, appellation décidément universel, n’hésite jamais à en rajouter dans le burlesque. Et promet une réélection de Gorgui Wade au premier tour, le 25 février prochain. Rien de moins. « et c’est lui, le ministre le plus jusqu’au boutiste du gouvernement, qui doit mener à bien la bonne marche des élections ». Le même ministre qui s’est félicité de l’action des poulets pour réprimer la manifestation de l’opposition de samedi dernier, et qui promet d’appliquer la même méthode vendredi 2 février, au cours de la deuxième marche.
« Tchi, non seulement il le dit, mais il va le faire », glisse un grand flic du pays. De quoi conforter les chancelleries dans leurs prédictions les plus maussades, elles qui s’inquiètent de l’importance prise par Ousmane Ngom. « En 2000, le général Cissé a obligé Diouf à se soumettre aux résultats des urnes. Mais il ne lui devait rien. Sans Wade au pouvoir, Ngom disparaîtra. Comment voulez-vous qu’il fasse respecter le vote ». Et les observateurs de tout crin de croire à une flibuste électorale. « Impossible, si les élections se tiennent et j’en doute, que Wade passe au premier tour. Voire qu’il passe le premier tour ! A moins d’une fraude massive et, aux vues de l’organisateur en chef, peu discrète », prédit un Cassandre chassé de la présidence. Au risque d’ébrécher la réputation de « président le mieux élu d’Afrique » dont Wade se gargarise toujours dans les sommets (et qui lui vaut une inimitié profonde de ses pairs) et d’effrayer les institutions internationales.
Encore faut-il que les boîtes, bulletins et isoloirs arrivent au pays. Et que les cartes d’électeurs arrivent enfin à leur destinataires. Autant d’éléments qui agréent l’idée d’un report, malgré saillies et coups de chaud Ngomesques.Le bon Ousmane, semble, à sa décharge, particulièrement fiévreux depuis deux semaines. Au choix, soit le climat venteux qui règne sur Dakar, soit les rencontres au palais entre Abdoulaye Wade et son ancien fils préféré Idy Seck, ennemi intime de Ngom lui donnent de froides sueurs. Ces rencontres, à défaut d’avoir encore livré tous leurs secrets, laissent au moins transparaître la fébrilité de la présidence. Et sa lucidité quant à une réélection du pape du Sopi, sans que le « traître » Seck ne le rallie, vaille que vaille