En Grèce, les mouvements de grève se multiplient contre le plan de sauvetage du FMI et les nouvelles mesures d’austérité qu’il devrait entraîner.
Vendredi 23 avril, le soleil irradie la capitale hellénique de ses rayons. Mais le cœur des Grecs est sombre, rempli d’une inquiétude qui ne cesse de croître depuis que le gouvernement a annoncé, à midi, sa demande de soutien à l’Union Européenne. Soutien qui implique l’arrivée du FMI dans la zone euro. Six heures après l’annonce, une foule de manifestants se retrouvent dans les rues d’Athènes. Combien sont-ils ? Quelques milliers, entre 4000 et 6000, mobilisés pour refuser la main mise sur leur pays.
« Je suis enseignant. Mon salaire a déjà été réduit de 12%, explique Dimitris, 32 ans. On a déjà vu ce que le FMI impose dans d’autres pays : des suppressions d’emplois dans la fonction publique, la privatisation des services… Ils veulent casser la Grèce ! » Economiste, Yannis Dragasakis pense aussi qu’il s’agit « d’imposer un modèle néo-libéral à la Grèce ». C’est pourtant lui qui a mené la Grèce à la situation qu’elle subit actuellement.
Tout a été révélé après l’arrivée de Georges Papandreou au pouvoir. En octobre 2009, à peine élu, ce Premier ministre du Pasok (parti socialiste grec) met au grand jour les comptes publics : ils sont catastrophiques. La Commission européenne, les agences de notation, les banques auraient surévalué la situation budgétaire du pays et fermé les yeux sur des chiffres erronés. Pendant ce temps, les banques prêtaient, sans regarder, à des taux intéressants, et, par différentes opérations, réussissaient à masquer l’endettement… tout en augmentant leurs bénéfices. Mieux, en pleine crise économique, elles ont obtenu, via le plan de sauvetage des banques, des capitaux de l’Etat pour renflouer leurs caisses.
Mais à l’annonce de l’endettement (115% du PIB) et des déficits publics (13,9%), la machine s’emballe : l’élève modèle est devenu le mouton noir de l’UE. La spéculation bat son plein : les taux auxquels l’Etat grec peut emprunter battent des records. Et plus les taux sont élevés, plus l’endettement pèse.
C’est la population grecque, les plus précaires et les classes moyennes en tête, qui en paieront le prix fort. Sous couvert d’anonymat, un ancien ministre Pasok explique : « depuis longtemps, et quelque soit le gouvernement, nous savions que l’endettement était important. Mais la politique menée aujourd’hui par le gouvernement est néfaste : au lieu de dégripper la machine, tout est fait pour étouffer la demande. »
Les mesures prises sont, en effet, des plus draconiennes : gel des salaires des fonctionnaires, diminution des pensions, suppressions des primes… Dans un pays où le niveau de vie est déjà faible, où l’économie traditionnelle a été ébranlée avec l’entrée dans l’UE, en 1992, et laminée avec l’arrivée de l’euro, les salaires sont devenus la variable d’ajustement.
« Comment vais-je faire ? Je ne suis même pas sûr de ne pas être licencié alors que je pensais être fonctionnaire, s’inquiète Dimitris. Déjà, je ne pars plus en vacances ailleurs que dans ma famille. »
La consommation chute, les prix grimpent, le chômage augmente. Dans les rues d’Athènes, la population comprend bien à quelle sauce le FMI veut les manger, soutenu par l’UE : la sauce barbare.
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Les Grèves sont en fait très peu suivies. Le principal syndicat du privé, GSEE,aurait plutôt tendance à être conciliant avec le gouvernement.Le plus virulent PAME, dépend du parti communiste le plus stalinien (KKE)de toute l’Europe occidentale. Contrairement aux Français Geignards, les Grecs n’ont pas l’habitude de se plaindre. Sous Karamanlis ( 2004/2009), il y avait une grève par mois, et autrement plus dure ! La Grèce, qui est affublée d’une image détéstable, largement injustiée, est soumise à une rigueur sans précédent et qui subit une tutelle humiliante, de l’Europe aujourd’hui, du FMI demain.
Mais les Grecs ont une habitude séculaire de l’adversité : occupation Ottomane, guerres balkaniques,occupation allemande, guerre civile, régime des colonels…Alors… Il faudrait cesser de colporter des ragots et des stéréotypes et aller voir sur le terrain, la réalité de la situation.