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Lavis Noir, épisodes 3 et 4 de notre feuilleton de l’été

Roman / samedi 19 juillet 2008 par Briscard, SP. Truptin
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Nouveaux épisodes de « Lavis Noir ». Le Paris de la fin des années 70. Entre rades de Barbès, Clichy, Montmartre. Narré avec l’argot du coin, loin des titis parisiens. Et une histoire d’escroc à la petite semaine qui voit débarquer l’occasion de sa vie. Une jolie fiction d’été, un cadeau des auteurs à « Bakchich », et de « Bakchich » à ses lecteurs.

3. In love

Episode 3, In Love - JPG - 18 ko
Episode 3, In Love
© SP Truptin

Loïc, moi j’l’ai un peu pratiqué quand il s’est mis à fréquenter la Josy ; plusieurs fois il était v’nu la chercher au P’tit Bat’, mon bistro… Et on dira c’qu’on voudra, mais si c’était pas vraiment l’homme qui tombe à pic, ni le loup-garou du bougalou, Loïc était assez beau jeune homme à l’époque, avant qu’les boissons fortes et le tabac brun ne lui ravageassent définitivement la face. En outre c’était un enjôleur de première bourre, porté qu’il était par une libido peu commune et une imagination qui ne s’exprimait pas seulement dans ses illustrations pornographiques, mais également dans un langage fleuri qui se fertilisait du fumier de son âme… Aussi, quand il se mit à avoir des vues sexuées sur Josy, et qu’il commença à l’appeler sa « petite loufiate à miches », cette dernière, pauvre agnelle - servante plus que serveuse au Nord-Sud - ne put retenir les émois que l’artiste provoquait dans son intimité vulvaire ; et lorsqu’il lui commandait un tablier d’sapeur, loin d’évoquer la tripaille lyonnaise sollicitée, elle se prenait à s’imaginer qu’il lui intimait l’ordre de le servir nue avec un tablier. Voire sans tablier. Loïc, bitard, mais piètre connaisseur des ressorts complexes de l’âme féminine, ne se rendit pas compte tout de suite de l’ascendant qu’il avait sur Josy. Et quand elle renversa la crème brûlée de la formule du jour, sur son pantalon de velours côtelé, il attribua ce geste inconsidéré à une maladresse de débutante, et faillit lui r’tourner une mandale façon raquette. Il ne s’agissait en fait que d’un dérèglement des sens, qu’elle avait bien exacerbés, et de certaines moiteurs, qui l’humidifiaient bien fort aussi, bas ventre et d’ssous d’bras, et qui lui rendaient la préhension maladroite… En un mot comme en cent, Josy était en train de tomber in love. Mais sévère grave.

4. La cerise du désir

Episode 4, La cerise du désir - JPG - 26.3 ko
Episode 4, La cerise du désir
© SP Truptin

Ce jour là, Josy remontait gaiement la rue Ordener vers Jules Joffrin, quand Lekervelec, déboulant d’Eugène Sue, faillit lui rentrer d’dans. Reconnaissant sa « petite loufiate », il entreprit de l’accompagner jusqu’au Nord-Sud où elle allait prendre son service. Josy, comme à chaque fois qu’elle était au contact du Loïc, et qu’il lui causait, se mit à avoir les intérieurs embués et les compas en ellipse ! Lekervelec, qui commençait à comprendre qu’il avait -pauvre agnelle !- la gamine à sa pogne, passa, comme pour rire, son bras autour de la taille de Josy, qui se transforma en flaque, aussi sec ! C’est, presque arrivé au Nord-Sud, juste devant l’métro, qu’il lui proposa de passer la chercher un d’ces soirs, histoire d’se faire un gentil petit restau, et un tour by night sur la Butte… Josy aurait dû dire non, ce jour là . Non, Monsieur Lepudubec, non, Loïc La Colique… Oui, elle aurait dû dire non, ce jour là… Mais au lieu du non salvateur, elle annona un « oh oui, mais un jeudi soir, alors, parce que l’vendredi, c’est mon congé … ». Loïc Lekervelec venait de commettre sa première vilénie… car en fait de restaurant et de p’tit tour sur la Butte, il avait plutôt dans les idées d’la faire fluncher et d’la grimper dans sa cahute, au 6ème sans ascenseur d’un immeuble tout pourri, à la Goutte d’Or… Parce que Monsieur Lekervelec, peintre de Montmartre, frayait p’têt à Abesses, mais zonait à Barbès. Josy allait mettre le doigt dans l’engrenage fatal, qui mène les filles du bord de mer des lustres du Casino, à la plage abandonnée, coquillages et crustacés… Mais Josy voulait profiter d’la vie, complètement, à fond, poignée d’gaz dans l’coin, sans remords et, surtout sans regrets. Car comme le lui avait enseigné sa mère : « quand t’as sucé la c’rise, regrette pas l’noyau ». Pour l’noyau, j’sais pas, mais les pépins, ils allaient lui tomber d’ssus, et avant pas longtemps, encore… (à suivre)

Pour lire ou relire le début du roman :

Le Paris de la fin des années 70. Entre rades de Barbès, Clichy, Montmartre. Narré avec l’argot du coin, loin des titis parisiens. Et une histoire d’escroc à la petite semaine qui voit débarquer l’occasion de sa vie. Une jolie fiction d’été, un cadeau (…)

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