Mahmoud Ahmadinejad vient d’être réélu. De quoi assommer un peu plus une jeunesse déjà désenchantée.
Lors des derniers jours de la campagne électorale, les jeunes ont pu se défouler, saisir le mince espace de liberté laissé pour l’occasion et descendre dans la rue. Crier leur désir de changement, sous la bannière verte du conservateur modéré Mir Hossein Moussavi.
Mais qui aurait pu croire que tout allait changer ? Que cet enfant de la Révolution de 79, ancien Premier ministre de l’actuel Guide suprême Khamenei, allait changer leur vie ?
Le scrutin plié, les jeunes vont donc rentrer chez eux, résignés, face à un régime affaibli qui pourrait se durcir. Ils vont reprendre ce quotidien oppressant, où l’ennui règne, au royaume des interdits et de la censure. La police des mœurs continuera ses tournées, aux trousses des jeunes femmes mal voilées et des couples clandestins.
De Tabriz à Ispahan, en passant par Téhéran, portrait d’une jeunesse aux espoirs confisqués.
Amir, ni espoir, ni futur
Derrière le comptoir d’une minuscule librairie, Amir se ronge les ongles. Avec ses cheveux mi-longs, sa barbe de trois jours et son regard éteint, ce jeune homme de 28 ans passe ses journées à attendre. Attendre que les badauds viennent acheter ses livres d’art navrant, et que le musée d’Etat où il travaille ferme ses portes. Prisonnier d’un boulot qu’il n’a pas choisi, ce diplômé d’un master de sculpture ne rêve plus, ne se révolte plus, et ne sourit plus. « Il n’y a pas d’espoir ici. Pourquoi est-ce que je sourirais ? Il n’y a aucune raison pour que je souris », lâche-t-il, faisant tourner un crayon à papier entre ses doigts. Il y a bien longtemps que ce jeune Téhéranais ne caresse plus l’espoir de vivre un jour de son art, et son salaire de misère, 200 dollars par mois, est là pour le lui rappeler tous les jours. « Tout le monde rêve de se marier mais moi, avec le peu d’argent que j’ai, je n’y compte même pas ». Amir s’interdit de penser au futur, trop résigné pour penser que quelque chose pourrait changer.
Samaneh, prisonnière de sa féminité
Mini-jupe et bottes de cuir. Samaneh fête ce soir ses 28 ans avec une dizaine d’amis, des ballons de baudruches, de la mauvaise vodka biélorusse, et de la « cheesy music » occidentale. Pour l’occasion, cette jeune prof de physique a enfilé son costume de femme. Et ses copines s’apprêtent à l’imiter. A peine arrivées, les étudiantes filent s’enfermer de longues minutes dans une chambre pour en ressortir sans voile, ni tunique. Mais avec des décolletés à faire frémir les religieux, des talons hauts, et surmaquillées. Très vite, la soirée se transforme en boum, avec en toile de fond DJ Arash, star iranienne qui a dû s’exiler pour échapper à la censure des mollahs. Peu avant minuit, et le départ des derniers convives, Samaneh ouvre ses cadeaux. Parfums, boîte de chocolat en forme de cœur, elle saute au cou de ses convives pour les remercier.
Obsédée par les restrictions vestimentaires que lui impose le régime, Samaneh tente d’exister, prisonnière de sa féminité. Passive, docile, elle provoque mais ne revendique rien.
Bahar : espérer, c’est pouvoir choisir
Bahar est un peu bohème. Cheveux longs, piercing au nez, elle et son petit ami reviennent d’un périple en Inde. Ce soir, ils sont les seuls à avoir déjà voyagé hors d’Iran. Ali a bien mis un pied à Moscou un jour, mais pour les affaires uniquement. Assise à cheval sur un fauteuil du salon, elle parle des jeunes femmes de son pays. Lucide sur son sort, elle défend une forme de féminisme circonstanciel, car Bahar sait bien que le salut passe ici par le mariage. « Aujourd’hui, une jeune fille, même quand elle est majeure, doit obtenir l’accord de ses parents pour sortir du territoire. Une fois mariée, c’est à son mari qu’elle doit demander. C’est encore une société très conservatrice, même dans les milieux très éduqués et ouverts d’esprit. Mais il ne tient qu’à nous, les femmes, de choisir des hommes, des époux, qui ne se comporteront pas comme ça avec leurs enfants ».
Hannah, l’espoir la bague au doigt
C’est la fin du sabbat à Ispahan. Hannah sort de la synagogue. Bras dessus bras dessous avec sa mère, elles partent en vadrouille dans la ville. Jolie brunette aux yeux amande, elle énumère toutes les demandes en mariage qu’elle a déjà essuyées, à seulement 22 ans. « Parmi les jeunes juifs d’Ispahan, aucun n’est à notre goût », regrette sa mère. Et de toute façon, Hannah se rêve déjà aux bras d’un beau Téhéranais. « Là-bas, peut-être, je pourrais trouver un ingénieur, un homme cultivé ». Il y a 2.000 juifs à Ispahan, plus de 10.000 à Téhéran, alors elle se dit qu’elle trouvera bien son bonheur dans la capitale. Et ce bonheur serait de ne pas devenir comme sa mère, femme au foyer. Car Hannah, étudiante en marketing, se voit déjà travailler à l’international, dans une grande banque du pays. D’où l’importance pour elle de « trouver un mari compréhensif », qui l’« autorisera à travailler ».
Mohammed : « L’espoir, c’est Ahmadinejad »
Il commence toutes ses phrases par « l’Islam dit ». Assis, dans son costume bleu-gris, Mohammed converse dans le train qui le ramène chez lui, à Tabriz, dans le nord-ouest du pays. Il parle fort, et avec beaucoup de conviction. Il a voté Mahmoud Ahmadinejad, comme son père. « C’est un bon musulman, il pense aux pauvres ». Les réformateurs, il ne veut pas en entendre parler. A 22 ans, Mohammed se consacre à ses études d’ingénieur et ne pense ni aux filles ni à se marier. Pourtant le voile est l’une de ses obsessions. Il ne comprend pas comment les Occidentaux peuvent laisser les femmes dévoilées, à la merci de la « tentation ». « L’Islam dit que nous devons couvrir nos femmes. C’est notre culture. Et pourquoi nous les couvrons ? Dans les bijouteries, les plus belles pièces ne sont jamais en vitrine et sont conservées dans des coffres forts. Et si vous demandez à les voir, on vous les présentera toujours dissimulées dans un tissu de velours noir. Et bien pour nos femmes, c’est pareil ».
Soheil : « Le destin est entre nos mains »
Soheil a 29 ans et vient de dire « oui » à la ravissante Sahide. Propriétaire d’un trois pièces coquet dans le nord de la capitale, il travaille comme ingénieur pour un fabriquant de climatiseurs danois. Accoudé au bar de sa cuisine américaine flambant neuve et suréquipée, il se lance volontiers dans de grandes discussions politiques, en sirotant un alcool local, fabriqué clandestinement. « Je suis un réformateur et je crois en l’avenir de notre pays », dit-il, en remuant son verre. Et pour lui, la première étape d’une quelconque émancipation, commence par les urnes. « Je pense que tout peut changer. Trente millions d’Iraniens ont aujourd’hui moins de 30 ans (sur 71 millions d’habitants, ndlr). De plus en plus de jeunes vont à l’université et adoptent un style de vie moderne. Et c’est précisément dans ces jeunes que se trouve l’espoir de changement ».
Pour Arash, l’espoir, c’est partir
Manchester ou Milan. Peu importe. En septembre, Arash sait qu’il ne sera plus là. Il sait aussi que son départ mettra un terme à son histoire avec sa petite amie, qu’il fréquente illégalement depuis deux ans. Mais la perspective de cette rupture ne l’émeut pas aux larmes. Arash ne pense qu’à une chose : partir pour conquérir sa liberté. Il veut étudier, avoir « un profil international », pour peut-être ne jamais revenir. « Les mollahs ont détruit notre pays », confie ce jeune homme issu d’une famille très éduquée et suffisamment aisée pour transgresser les principes de la loi islamique. Arash a les moyens de se payer régulièrement de l’alcool de contrebande à 40 dollars la bouteille, fume, surfe sur Facebook et sur les sommets qui enlacent Téhéran. Il fait l’amour chez lui quand ses parents ne sont pas là. Arash n’est pas un jeune Iranien comme les autres, et il en a conscience. Et c’est peut-être pour cette raison qu’il a « envie de réussir » sa vie. Ailleurs.
Lire ou relire l’interview de Farad Khosrokavar, chercheur à l’EHESS qui raconte pour Bakchich la jeunesse iranienne
A lire ou relire sur Bakchich.info
Pour moi ce sera ni l’un ni l’autre,le pouvoir est maudit,construisons une société d’égaux et bannissons ce type de rapport social. Les néocons et les tiers-mondistes sont les deux faces d’une même médaille.Ils ont chacun leur camp,et les pertes(toujours dans les rangs des peuples)du "camp d’en face" sont minimisées. Les tiers-mondistes n’ont qu’à aller vivre en Iran,s’ils trouvent que la société y est idéale et émancipatrice.Ou qu’ils aillent manifester à Caracas avec les Insurgentes,ces anarchistes antiautoritaires qui sont régulièrement tabassés et embastillés par les milice du chevalier blanc Chavez !Si tu es contre Chavez,tu es forcément de droite !Pourtant,ceux qui rabâchent ce discours jusqu’à plus soif réduisent au silence les révoltés à la gauche de Chavez qui luttent contre l’autoritarisme et le militarisme(voir l’excellent article du monde libertaire de la semaine sur les "charognards du marché des armes dont le bel Hugo est un des meyeurs clients avec les usa ou la Chine) du "leader" de la "révolution" macro-capitalistico-bolivarienne Quant-aux philosophes atlantistes-sionistes-néocons à la Val,BHL,Taguieff,Glucksman ou Finkielkraut,qu’ils dégagent vivre en Israël ou aux USA,si c’est si fabuleux de s’y ébattre !Qu’ils partent eux même envahir l’Irak,l’Afghanistan ou le Pakistan la fleur au fusil,puisque c’est là que,parait-il,se joue la Grande Aventure Humaine,tellement palpitante à vanter dans les colonnes du Point ou de Libération.Quand BHL prend la défence de la politique de l’Etat d’Israël et loue la grandeur d’âme des criminels de Tsahal sans jamais y avoir vécu(ou je me trompe ?),lui qui est plus israëlien que les israëliens eux-mêmes,quand il falsifie la réalité(romanquête oblige)au Kosovo ou en Géorgie,décrivant des affrontements auxquels il n’a même pas assisté pour être lâchement resté embusqué bien à l’abris ou ne pas s’être aventuré plus avant que sur les terrases des hôtels grand-luxe,qu’il aille plutôt verser son propre sang.Je suis sûr qu’un tel défenseur des droits de l’homme irait jusqu’à sacrifier sa propre vie pour épargner aux autres la souffrance…A moins bien sûr que les belles envolées lyriques dont il saupoudre on bloc-note ne soit que de la poudre aux yeux,mais je n’ose y croire,ce serait plus que cynique,non ?
Finalement,les deux faces de la médaille donnent dans la théorie du choc des civilisations,bien qu’ils s’en rejettent mutuellement l’usage ! Ils sont complices,les uns n’existeraient pas sans les autres. Et les peuples trinquent pendant ce temps.
Ni Chavez,ni Obam,ni Ahmadinedjad,ni Brown,ni Berlusconi,ni Sarkozy,ni Zapatero,ni Lula,ni Correa… Ni etat,ni marché.Autogestion et libre fédération. Prenons nous mêmes nos affaires en main !
Quand va-t-on arrêter de faire de la géo-stratégie politique ?
Il est évident que les magouilles électorales ne sont pas propres à l’Iran et que ni la France ni les usa n’ont la moindre leçon à donner.
Mais Ahmadinedjad ne doit pas être blanchi pour autant,pas plus d’ailleurs que son principal "adversaire",ce "réformateur" qui fit torturer et exécuter plus de 8000 opposants quand il était premier ministre !Tous les concurrents du régime sont formatés par le même moule de toute façon,puisqu’ils ont reçu l’aval du Guide Suprême de la Révolution pour avoir le droit de concourir.
On ne lutte pas contre Sarkozy pour soutenir Ahmadinedjad ! C’est NI L’UN,NI L’AUTRE. Pendant que nous rejouons la guerre froide,les peuples trinquent,sous Sarko comme sous le régime des mollahs !
Je suis vraiment au comble du bonheur quand je lis les commentaires rédigés à la suite de cet article ! cela prouve au moins qu’un certains nombres de personnes dans ce pays refusent de se faire ramollir le cerveau à coup de révolutions colorées(CIA copyright)…c’est vraiment rassurant ! parce-que ça pue le think-tank à plein nez dans tous les médias "offiziels" !
La fameuse "voix des jeunes" iraniens dont Sarkozy se gargarise…qu’en a-t-il fait dans son propre pays ?!? les jeunes français qui manifestaient après son élection étaient-ils la preuve d’une fraude électorale massive ?!? à priori le nabot en connait un sacré morceau sur le sujet…
Sarkozy le "président" fraudeur devrait vraiment s’abstenir de donner des leçons de légitimité…lui qui est un président illégitime :
http://www.politique.net/2008040201-nicolas-sarkozy-et-les-listes-electorales.htm
J’ai senti comme un malaise ces derniers jours, tous nos médias sous le charme de cette révolution verte, j’ai eu l’impression de revivre ce que ces mêmes médias nous avaient narré au moment de la révolution orange …
Tout ça sentait la manipulation à plein nez, et ça continue aujourd’hui avec les résultats de l’ élection qui ne plaisent pas à l’occident..
Sommes-nous manipulés encore une fois, derrière la jolie révolution verte, encore la CIA ?
haaa ! oué d’accord !!! parce-que quand Sarkozy a été élu en France…100% des français été EU-PHO-RI-QUES !!!
Y’a qu’à voir les émeutes et manifestations qui se sont poursuivies durant 3 jours aprés le soir de l’élection du nabot…pour se rendre compte que les français étaient U-NA-NI-MES ! émeutes réprimées dans la violence(par une police hypnotisée par "le petit")…jusqu’aux lances à eaux(le fameux karcher peut-être…)pour être sûr de faire taire la moindre contestation !
La France vire à la dictature…et vous n’avez rien d’autre à faire que de juger l’Iran…honte à vous !