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Foire d’empoigne pour la Villa Médicis

Culture / mercredi 26 mars 2008 par Amédée Sonpipet
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Alors qu’une quinzaine de nouveaux pensionnaires se préparent à investir la Villa Médicis, à Rome, la polémique sur la nomination de George-Marc Benamou, conseiller de Sarkozy, comme prochain directeur, fait rage. La Villa, il est vrai, est un sanctuaire convoité et les candidats étaient légion, menant une rude bagarre de dagues en coulisses, comme le révèle « Bakchich ».

L’un des plus beaux palais romains, la Villa Médicis, fait rêver esthètes et petits protégés du pouvoir. L’Académie de France à Rome qui y est installée a en effet pour vocation de servir depuis le XIXème siècle de résidence à des artistes ou historiens d’art français (sélectionnés sur un projet par un jury, pour une durée allant de 6 à 24 mois), et de servir de refuge à ceux que l’Elysée veut recaser, comme Georges-Marc Benamou, conseiller culturel de Nicolas Sarkozy.

La somptueuse demeure s’est enrichie depuis Malraux d’une mission de diffusion de la culture française en Italie, qui n’est pas toujours la priorité des patrons successifs de la Villa.

Georges-Marc Benamou - JPG - 18.5 ko
Georges-Marc Benamou
© Kerleroux

La discrétion entoure la vingtaine de pensionnaires qui y résident en permanence, lesquels bénéficient d’un traitement allant de 3 500 à 5 000 euros mensuels. Cette discrétion est à la hauteur du tapage autour de la personnalité du directeur censé insuffler à l’Académie dynamisme et prestige. Ancien proche de feu-François Mitterrand, Georges-Marc Benamou, à en croire les pétitionnaires qui se déchaînent dans les colonnes du Monde, n’a peut-être pas le coffre nécessaire.

Les travaux perso des patrons de la Villa

Il faut dire que la confusion qui règne traditionnellement autour de la nomination du directeur de Médicis encourage ce dernier à se considérer comme un super pensionnaire, bénéficiant du plus grand appartement et, bien évidemment, du meilleur traitement. Pour ne citer que les derniers, rares sont les directeurs n’ayant pas mis à profit leur « séjour » à Rome pour divers travaux personnels.

Ainsi, Bruno Racine (proche de Juppé, que Jean-Jacques Aillagon avait intronisé au Centre Beaubourg pour lui succéder), actuellement président de la Bibliothèque nationale de France (BNF), avait publié des ouvrages divers et variés tels les romans La séparation des biens et Le tombeau de la Chrétienne [1]. Sans oublier le définitif Art de vivre en Toscane édité en 2000 chez Flammarion, développant sur 250 pages un reportage photo digne de Marie Claire Maison ?

Son successeur, le scénographe Richard Peduzzi, n’est pas en reste. Celui dont la nomination avait été imposée - déjà - par l’Élysée (Jacques Chirac, au grand dam du ministre de la culture de l’époque, le même Aillagon) a mis à profit son séjour pour inonder les théâtres et opéras du monde entier de ses mises en scène. Notons d’ailleurs que, prochainement, au Louvre, s’ouvrira une exposition d’art italien dont la scénographie sera signée de l’auguste pensionnaire-directeur actuel de la Villa dont il a, reconnaissons-le, rénové et redécoré de nombreux espaces.

Des candidats à la pelle

C’est donc dans ce contexte d’une institution prestigieuse bien « exploitée » par ses directeurs successifs durant plus d’une décennie que s’inscrit l’enjeu de la prochaine nomination. Les candidats étaient légions et de deux genres, comme Bakchich est en mesure de le raconter. La première catégorie est celle des candidats sérieux, « professionnels de la profession » ayant à cœur de défendre un projet et de réveiller la Villa. Parmi eux, le directeur des arts plastiques au ministère de la culture, Olivier Kaeppelin, faisait figure de favori, tout comme l’actuel directeur de l’école des Beaux Arts de Paris, Henry-Claude Cousseau au dynamisme réputé. Au dernier moment, ils furent rejoints par Geneviève Gallot, « patronne » de l’Institut d’histoire de l’art, autre institution parisienne.

D’autre part, ceux qui comptaient «  s’inscrire dans la continuité de leurs prédécesseurs » - en langage plus direct, faire le service minimum et se servir de la Villa comme une retraite pour des projets persos - comptaient dans leurs rangs l’artiste Gloria Friedman (épouse du plasticien Bertrand Lavier) qui avait également fait campagne dès l’été et pour laquelle le ministère de la culture (qui contrôle la Villa) avait sollicité leur soutien aux membres du conseil d’administration. Et ce aux dépens de Michel Schneider, philosophe et fonctionnaire du ministère (qui avait, lui, rendu de nombreuses et discrètes visites à ces administrateurs, notamment en Italie), comme de l’amer Olivier Poivre d’Arvor à qui Georges-Marc Benamou, conseiller de Sarko à l’Elysée, avait « promis le poste ».

Les misères d’un Poivre d’Arvor

Car le vrai dindon de cette farce pas drôle, c’est bien le frère du présentateur du JT de TF1. Cet auteur prolixe, qui commet au mininum deux ouvrages par an (et toujours pas de prix littéraire !), avait soigneusement préparé sa sortie de culturesfrance, officine culturelle du Quai d’Orsay et organisatrice, entre autres, des « saisons culturelles » (Brésilienne, hollandaise, arménienne… pour ne citer que les dernières).

Depuis un an, avec l’aide toujours disponible de son médiatique frangin, contacts et négociations avaient été rondement menés, le tout en ignorant prodigieusement les membres du conseil d’administration , les considérant comme d’aimables figurants et qui, aujourd’hui, prennent plaisir à lui savonner la planche. Certains aidant par leurs réseaux à l’enrichissement de la pétition contre sa nomination et d’autres, comme Philippe Dagen, historien d’art, mais surtout journaliste au Monde, étant particulièrement attentif (et réactif) à la polémique naissante.

Poivre avait cependant obtenu son couronnement – du moins le croyait-il ainsi - en décembre 2007 de Bénamou lui-même, qui avait pris la peine de lui réclamer un projet.

Depuis que le conseiller élyséen est annoncé aux portes de Rome, le candidat déçu active ses réseaux et les artistes qu’il aida généreusement via Culturesfrance, (comme Sophie Calle, dont il organisa la présence à la Biennale de Venise, l’an dernier) sont au rendez-vous de la pétition.

Dans ce jeu de dupe où le désir du prince l’emporte sur l’intérêt général et sur la défense de la culture hexagonale à l’international, la démarche légitime des artistes peut-elle faire plier Sarkozy et l’encourager à la transparence ? Sarko serait, en la matière, bien inspiré de s’éviter une crise avec les milieux artistiques qui pourrait, si elle enfle, se comparer à la crise des intermittents bis. A la veille des festivals (Cannes est dans 45 jours), il serait dommage que ce parachutage lui gâche la fête.

[1] (ed. Grasset 1999 et 2002)


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18 MESSAGES
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Forum

  • Foire d’empoigne pour la Villa Médicis
    le vendredi 4 avril 2008 à 20:38, Eric a dit :
    Si vous voulez avoir une autre vision de la Villa Médicis, voici le bal masqué des pensionnaires… Ciao Eric
  • Foire d’empoigne pour la Villa Médicis
    le lundi 31 mars 2008 à 14:35, haoni a dit :
    Puisque tout le monde doit se serrer la ceinture pourquoi ne pas faire des économies de ce côté là aussi. Je ne suis pas contre un soutien à la culture bien au contraire, mais je ne suis pas sûre que ce soit ceux qui mériteraient le plus d’être soutenus qui se retouvent là-bas.
  • Foire d’empoigne pour la Villa Médicis
    le dimanche 30 mars 2008 à 21:23, PARADISBLEUS a dit :
    VRAIMENT C EST UNE HONTE DE PAYER DES ARTISTES AVEC UN TEL SALAIRE !
  • Foire d’empoigne pour la Villa Médicis
    le dimanche 30 mars 2008 à 14:32, Fil Vert a dit :
    Je ne connais point ce fameux Benamou.Mais sa nomination (aujourdhui invalidée) a été le fait du nouveau Prince règnant,celui que j’appelle le Prince des Ténèbres. Celui-ci n’avait t-il pas promis lors de la campagne présidentielle de soumettre les principales nominations au Parlement ?
  • Foire d’empoigne pour la Villa Médicis
    le vendredi 28 mars 2008 à 12:12
    Petite précision : Geneviève Gallot est directrice de l’institut national du patrimoine (INP) et pas de "l’institut [national] d’histoire de l’art" (INHA).
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