Halim Mahmoudi, dans son premier tome BD "arabico", aux éditions du Quadrants, jette un regard sensible sur sa prime enfance dans une cité délabrée.
Si le plan banlieue de Fadela Amara n’est pas près d’amarrer, la bande dessinée, elle, n’en finit plus de débarquer sur notre bitume mouillé. C’est pourquoi une herbe folle a si bien poussé entre les quidams du macadam : Arabico, écrit et dessiné par Halim Mahmoudi. Ses planches rappellent "La Cité des enfants perdus" chère à Jean- Pierre Jeunet. Sauf que l’orphelin est ici un gamin algérien moulé au béton des banlieues, qui a perdu sa carte d’identité. Pas si grave quand on habite Neuilly, plus emmerdant quand on crèche à Saint-Denis.
Autant dire que le tome I, Liberté, qui sera suivi par Égalité et Fraternité, a valeur d’autofiction. Mahmoudi dessine son quotidien et rassemble ses souvenirs d’enfant fragile qui ne comprend pas si « fils d’immigrés, c’est français ou étranger ça ? » Entre rondes de flics, problèmes de scolarité au collège Jacques-Foccart – ancien patron de la barbouzerie gaulliste, il fallait oser –, conneries entre potes et drames familiaux, l’artiste dépeint la vie d’un môme grignoté par la brutalité de son milieu. Sans commisération, on est rapidement saisi par le réalisme du dessin qui donne à l’ensemble une humanité rare. Le coup de crayon comme un dessin au fusain, aux contours noirs très appuyés et aux couleurs mates et voilées, apporte une étrange douceur à un parfum d’enfance d’une triste mélancolie. Avoir 10 ans avec lui, c’est comme en avoir 20 avec Nizan, « je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie »
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