9 heures du matin - Branle-bas de combat, mercredi dernier, dans les couloirs de l’hôtel George V à Paris. Organisé en véritable commando, le personnel au grand complet passe les chambres au peigne fin annonçant à leurs occupants qu’ils ont une heure pour faire leurs bagages et vider les lieux. Ordre suprême de la direction… la dernière nuit sera gracieusement offerte. Pas d’autre explication. Les hommes d’affaires américains et japonais qui occupent le grand hôtel pour la durée du Salon aéronautique du Bourget n’en croient pas leurs yeux et leurs oreilles. La plupart d’entre eux se retrouvent sur les trottoirs à errer dans le quartier des Champs Élysées. En effet, avec le Bourget, les hôtels sont bourrés. Pour certains de ces messieurs qui ont le bras long… ça ne se passera pas comme ça ! Les coups de fils pleuvent sur l’Élysée.
Les plus chanceux d’entre eux apprennent qu’ils ont été délogés sur ordre du président Sarkozy lui-même afin de loger le roi d’Arabie Abdallah et sa suite. Tout l’hôtel a été réquisitionné sur ordre du Château, tant le roi Abdallah est devenu une véritable obsession pour le nouveau locataire de l’Élysée. Il y a tout d’abord l’initiative française sur le Liban qui consiste à réunir toutes les factions qui déchirent le pays du Cèdre, d’ici la fin du mois à Paris, et bien sûr, l’Arabie saoudite est un passage obligé pour la réussite de cette initiative qui risque fortement de tourner en eau de boudin… Et puis, il y a surtout le vieux dossier MIKSA. Cette affaire, démarrée au milieu des années 90 consiste à bâtir une architecture globale pour la sécurité des frontières saoudiennes. Il se présente sous la forme d’un système centralisé de gestion de moyens de surveillance – radars, satellites, électroniques – susceptible de garantir au ministère de l’intérieur une capacité d’observation optimale sur l’ensemble des 7.500 kilomètres de frontière. Le marché est chiffré à 6,9 milliards d’euros.
À partir de janvier 2003, en pleine phase finale de négociation, les rivalités Chirac/Sarkozy face au ministre saoudien de l’intérieur conduisent l’Élysée à ne plus vouloir signer avec le prince Nayef mais directement avec le roi Abdallah bin Abdul Aziz. Après de multiples avertissements, la décision du prince Nayef de recourir à un appel d’offre, en décembre 2004, fait capoter l’offre française, victime de pratiques peu adaptées aux mœurs de la famille royale. Déchiraquiser le dossier MIKSA… voilà qui justifiait bien l’expulsion des clients du George V…