La constance du patron de la DST dans le fayotage lui vaut une convocation dans le cadre de la tortueuse affaire Clearstream
À quoi joue le préfet Pierre de Bousquet de Florian, le très sélect patron de la DST, dans le feuilleton Clearstream ? Voilà une question qu’un juge parisien va bientôt tenter d’éclaircir. Le directeur du contre-espionnage est en effet la cible d’une plainte en bonne et due forme pour « faux et usage de faux », déposée discrètement ces dernières semaines par un as de l’intelligence économique. Hervé Séveno, un ancien flic de la division nationale anti-terroriste (DNAT) et de la brigade financière, cherche en effet à savoir pourquoi Bousquet a voulu, selon lui, le mouiller dans la manip’ Clearstream. Dans une note transmise le 9 décembre 2004 à Dominique de Villepin, alors ministre de l’Intérieur, Bousquet a impliqué Séveno et deux autres de ses collègues comme ayant pu « déployer des moyens techniques en relation avec l’affaire Cleastream ».
En clair, la DST a accusé Séveno d’avoir aidé Jean-Louis Gergorin et Imad Lahoud, aujourd’hui seuls mis en examen dans l’affaire, à fabriquer les faux listings. Ce que Séveno dément avec la plus grande énergie… et qu’aucun juge ne lui reproche d’ailleurs aujourd’hui. Pourquoi alors les services ont-ils lancé cette fausse piste ? Parce que Bousquet a voulu se faire bien voir par son ministre, Villepin, en lui faisant croire qu’il savait beaucoup de choses ? Possible. Car le boss de la DST semble n’avoir qu’un principe de fonctionnement : celui de se faire bien voir de son ministre. Aussi, après avoir fidèlement servi Villepin place Beauvau, il sert aujourd’hui les intérêts de son successeur et ennemi juré, Sarko.
Auditionné par les juge D’Huy et Pons, en charge de la pantalonnade Clearstream, le 18 octobre dernier, Bousquet a raconté sur procès-verbal tout ce que son nouveau ministre de tutelle voulait qu’il dise pour enfoncer un peu plus le Premier Ministre. Par exemple qu’il a fait savoir à Villepin, via une note manuscrite, dès septembre 2004, que l’auteur de la manip’ s’appelait sans doute Gergorin. Et que cette note a été passée au broyeur dans la journée. Laissant ainsi à croire que Villepin a détruit un document vital pour l’enquête. Un délit passible de 5 ans de prison, comme le rappelle Le Monde ces derniers jours avec une gourmandise peu dissimulée. Une belle construction intellectuelle du quotidien du soir que ne renieraient pas les meilleurs propagandistes sarkozystes !
Car quel intérêt de détruire en septembre une note manuscrite mentionnant Gergorin… et moins de trois mois plus tard, dans une note officielle du 9 décembre aujourd’hui visée par la justice, présenter sans la moindre ambiguïté Gergorin comme à l’origine de la manip’ ? Pourquoi, si Bousquet avait reçu l’ordre de Villepin de dissimuler le rôle de Gergorin, la DST a-t-elle ensuite transmise cette note à la justice… après avis favorable du même Villepin ? Bref, le juge qui va se pencher sur le rôle de la DST dans l’affaire Clearstream aura sans doute plus besoin d’un guide sur les coups bas en politique que d’un code pénal.