Au sein de la ville phare de l’économie capitaliste se cache un peuple de l’ombre. À New York on les appelle « les hommes taupes ». C’est l’objet du documentaire de Chantal Lasbats
Tout a commencé dans les années 70. Des vétérans du Viet Nam, exclus du système américain, se réfugient dans les innombrables tunnels et galeries de la ville. Car au début du 20ème siècle, la construction des gratte-ciels accompagnent des projets souterrains, aussi utopiques les uns que les autres comme celui de relier les buildings par des trains privés. Rien n’a été fait.
Un livre de Colomb Mc Cain Les saisons de la nuit racontent l’histoire d’un de ces ouvriers des années 1920. Toute l’histoire porte sur le fait que 60 ans plus tard, son petit-fils pose son sac de misère dans les couloirs glauques de ces sous-sols à l’abandon. C’est en lisant ce livre que Chantal Lasbats cherche à en savoir plus sur ces hommes. S’ensuit deux ans d’enquête et trois mois d’immersion. Il a fallu prendre les contacts un à un, trouver un protecteur qui amenait toujours plus profond Chantal et son équipe, « on est allé jusqu’au -8, on pense qu’il y a des hommes jusqu’au -12 mais on n’a pas pu aller plus loin, c’était trop dangereux ». Il fallait aussi éviter la police, « nous n’avions pas le droit d’aller en dessous, c’est pourquoi nous allions la nuit et que finalement nous avons passé trois mois en immersion pour filmer ».
Aujourd’hui toutes sortes de personnes vivent en dessous. « Aussi bien des drogués, des malades mentaux, des malfrats en cavale que des gens qui ont fait le choix de se retirer du monde. En dessous, les gens vivent par village, par quartier. Les règles existent aussi bien que la solidarité. Des personnes sortent au dessus pour amener de la nourriture à ceux qui restent en dessous. Règne aussi un marché du troc. On estime aujourd’hui à 7 000 personnes les habitants de ce monde souterrain. » Chantal Lasbats est encore émue quand elle en parle. Elle avoue qu’« on ne peut sortir indemne d’un tel reportage ». Elle a été particulièrement touchée par la rencontre avec une femme nommée « Brooklin ». Grâce à la médiatisation du film, elle va obtenir un studio parmi les gens du « dessus ».
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