Le petit monde du yachting n’est pas aussi tranquille que vous le croyez ! Il y a les voleurs de ces joujoux. Et puis il y a les mauvaises rencontres que l’on fait. La pègre marseillaise, par exemple.
Amis millionnaires, camarades milliardaires, gare à vos joujoux ! Accessoires de plage aussi indispensables pour le riche plaisancier que le jeu de boules pour l’humble vacancier, les yachts provoquent parfois de menus désagréments. Pullulant dans les eaux méditerranéennes en plein été – sans doute la période de reproduction –, ces monstres des mers sont en effet sauvagement chassés… À l’instar du Beru Ma, propriété du gourou de la banque d’affaires Lazard, Bruno Roger, par ailleurs pote de Chirac et soutien de Sarko Ier. Et principal acteur d’un imbroglio diplomatico-judiciaire entre la France et la Tunisie. Un épisode raconté aux tout premiers temps de Bakchich, à l’été 2006.
Ou comment le neveu préféré de Leila Trabelsi, la régente de Carthage et néanmoins épouse du président Ben Ali, s’est pris d’affection pour un yacht qui mouille aux abords de Bonifacio. Dérobé en mai, le bateau baigne ensuite dans les eaux de Sidi Bou Saïd, où Imed Trabelsi joue les skippers du dimanche. Après une longue enquête sur un réseau de chapardeurs officiant sur les côtes méditerranéenne et corse, la justice française décerne à Imed son brevet de pilote. Sous la forme d’un mandat d’arrêt international daté du 3 mars 2007. Également visé, un autre neveu de Leila, le trop méconnu Moaz. Non pour un, mais pour trois bateaux. Avant le Beru Ma, le Blue Dolphin IV, dérobé à Cannes, et le Nando, escamoté du côté du Lavandou, s’étaient retrouvés sur les côtes tunisiennes. Bref, un joli réseau international de vol de bateaux, chapeauté par les héritiers Trabelsi.
D’une visite de Sarko Ier à Tunis en arrangements sous le jasmin, l’affaire a été gentiment vidée de sa substance diplomatique. Le navire fut restitué, et les neveux présidentiels laissés à disposition de la justice tunisienne, qui les lava de tout soupçon. Quand les complices français, eux, furent condamnés, en octobre 2009, par le tribunal d’Ajaccio à des peines allant jusqu’à deux ans de prison ferme. « Un naufrage judiciaire », jugea à l’époque Corse-Matin, quotidien pourtant habitué aux brasses coulées.
Mais bien garer son engin ne suffit pas toujours à éviter les embrouilles. Méfiance ! fortunés vacanciers : on fait parfois de drôles de rencontres dans le petit milieu du yachting. Un malheur est si vite arrivé. Par exemple, à ce pauvre Alexandre Rodriguez, l’héritier du Rodriguez Group, numéro un mondial du yachting de luxe. Installé à Cannes, Rodriguez est le spécialiste des bateaux à 20 millions d’euros pièce. Horreur, au début de juin, l’héritier a vu débarquer sur son Atlas une escouade de flics venus pêcher le marlou. Dans les filets des poulets, quelques gros poissons. Les frères Campanella, Gérald et Michel, accompagnés de Bernard Barresi, mythique figure de la pègre marseillaise, recherché depuis 1994.
Quoi ? Rodriguez aurait copiné avec la crème du milieu marseillais ? C’était à l’insu de mon plein gré ! plaide l’héritier en garde à vue. En tout cas, en pleine avant-saison touristique, c’était mauvais pour le business : le cours de l’action a été suspendu. Que dire alors de ces filiales du Rodriguez Group qui avaient pour habitude de frayer avec des marchands d’armes (Adnan Khashoggi ou Akram Ojjeh), des amoureux du pétrole (André Tarallo) ou des démocrates africains convaincus (Omar Bongo) ? Face au juge, Rodriguez, qui a pourtant engagé l’un des Campanella comme coach personnel, a prétendu avoir péché par naïveté. Il a été remis en liberté fin juillet moyennant une caution d’1,5 million d’euros. Les marins ne voient-ils jamais venir les requins ?
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