Le paquet fiscal du président Sarkozy n’est que l’ultime touche à une oeuvre commune des gouvernements de droite et de gauche. Baisser les impôts des plus riches. Une entreprise de 10 ans.
Une des grandes victoires idéologiques de la pensée libérale a été de réussir à faire passer l’idée que payer plus de 50% d’impôt était foncièrement injuste ; et arriver à faire croire que le bouclier fiscal , selon les termes mêmes du Ministre du Budget, le sémillant Eric Woerth, était, « une mesure de justice fiscale ».
Évidemment… les 834 plus gros bénéficiaires de ce bouclier se sont partagés humblement la modeste somme de 306 912 000 € soit 368 000 € par personne , et personne ici ne viendra contredire M. Woerth : toucher plus de 25 ans de Smic en une fois conforte effectivement le sens de la justice fiscale du contribuable qui en bénéficie !
Toutefois la mémoire s’avère parfois trompeuse, et souvent oublieuse. Qui se souvient ici que pendant des années, et sous des gouvernement de droite et sous des gouvernements de gauche, le taux supérieur d’imposition des revenus excédait 50% ? Et que des contribuables aisés payaient plus de 50 % de leurs revenus en impôt (et cela sans inclure ni l’ISF ni la CSG) et cela même avec un ministre du budget nommé Nicolas Sarkozy (de 1993 et 1995) et même encore avec un ministre de l’Economie et des Finances du même nom, en 2004/2005 !
En dépit de ces taux élevés, aucun Arnault, aucun Pinault ni aucun Dassault n’ont quitté le territoire, comme quoi les milliardaires arrivent à survivre avec des taux d’imposition élevés !
Mais il fallait baisser les impôts de nos miséreux milliardaires !
Ainsi le taux supérieur d’imposition de 56,8% qui était le taux en vigueur en 1991 et qui est resté inchangé jusqu’en 1996 a connu sa première baisse, sous le gouvernement Juppé, qui l’a ramené à 54,8%. Une bouffée d’oxygène pour les plus démunis des nantis…
Sous le gouvernement Jospin, et oui, il faut savoir donner des gages, ce taux a également baissé et a été ramené pour 2001 à 52,75%.
Après une nouvelle baisse sous le gouvernement Raffarin, le taux est descendu de 52,75% à 49,58%. La grande réforme a eu lieu avec le gouvernement Villepin qui a présenté la mesure comme une simplification consistant à baisser tous les taux de toutes les tranches d’imposition avec comme corolaire de simplification, la suppression concomitante de l’abattement de 20 % sur les salaires et les bénéfices des commerçants, artisans et des professions libérales.
Mais la mesure la plus parlante a été celle dont il a été peu fait état à l’époque , la baisse du taux supérieur d’imposition qui a été ramené de 49,58% à 40 %.
Cette mesure a eu pour effet de faire baisser surtout l’impôt des plus hauts revenus. [1]
Ainsi par exemple un couple avec deux enfants et 60 000 € de salaires cumulé a payé, en 2006, 4 160 € d’impôt sur ses revenus de 2005.
Pour les revenus de 2006 le même couple pour 60 960 € de revenus (+1,6% de revenus pour tenir compte de l’inflation) a payé en 2007 3 904 € soit une baisse de 254 €.
Pour nos contribuables très aisés, la réforme a dû être jouissive ! Ainsi, pour un couple avec deux enfants et avec deux salaires importants, 1 500 000 € au total, l’impôt payé en 2006 pour les revenus de 2005 se montait à 661 655 €.
Grâce la réforme Villepin, l’impôt payé en 2007 pour les revenus de 2006, 1 524 000 € (+1,6%) s’élevait à 570 726 € soit une modique baisse de 90 929 € !
Après ces baisses importantes de l’impôt payé par les contribuables les plus aisés, il ne faut pas s’étonner que l’impôt sur le revenu représente un % de plus en plus faible des recettes fiscales de l’Etat.
Comme quoi, sous couvert de simplification fiscale, supprimer l’abattement de 20% sur les salaires et compenser par la baisse des taux d’imposition des diverses tranches de revenu, le gouvernement de l’époque a réussi un magnifique tour de passe-passe fiscal et est parvenu à ses fins. En gros, baisser fortement l’impôt des plus hauts revenus en insistant uniquement sur les gains des revenus moyens !
Et oui, la baisse constante du seul impôt progressif, l’impôt sur le revenu, est compensé par la hausse des recettes des impôts proportionnels, TVA et Taxe sur les produits pétroliers (TIPP) principalement.
Mais qui calcule annuellement le montant de la TVA et de la TIPP qu’il paye ?
S’agissant des baisses d’impôt, le tableau suivant permettra d’y voir plus clair.
Il compare à montant constant l’impôt payé pour les revenus de 1998 avec celui payé en 2009 pour ceux de 2008. Le calcul est fait sur la base d’ un couple marié avec deux enfants.
Le coefficient retenu pour aligner les revenus 1998 avec ceux de 2008 est celui de l’inflation. Pour une base 100 en 1998 la base retenue pour 2008 est 118.
Les bases des revenus en francs ayant servi aux calculs sont : 150 000 Frs, 200 000 frs, 300 000 Frs, 400 000 Frs,750 000 Frs, 1 000 000 Frs, 2 000 000 Frs, 5 000 000 Frs,10 000 000 Frs, 20 000 000 Frs et 50 000 000 de Frs.
Revenus 1998 en euros | Impôts payés en 1999 | Impôt 1998 actualisé valeur 2008 | Revenu 2008 sur base 1998 | Impôts 2008 | Gains en euros | % de revenu supplémentaire à dépenser |
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