Homme au grand coeur, Francis Cabrel tombe sous le charme des politiques. Des Maoïstes dans les années 70 à Sarkozy aujourd’hui. C’est ce que revèle Hugues Royer dans une bio du chanteur.
« Tous les ans, on me propose la fête de l’Huma ou celle de Chirac, je n’y vais pas. (…) Je ne vote pas, je ne voterai jamais ; même dans mon village, je ne vote pas aux municipales », tonne Francis Cabrel dans les années 80. Le mousquetaire de la chanson française s’est toujours présenté comme un artiste au grand coeur qui cultive davantage son jardin dans son village d’Astaffort que l’engagement façon Jean Ferrat. Bref, son métier, c’est de gazouiller. Pas si simple. Cabrel, l’élégante biographie du journaliste Hugues Royer, publiée le 3 novembre (éd. Flammarion), déflore les pérégrinations politiques de l’ami Francis. Un coup à gauche, un autre à droite, encore un en direction des Verts… les opinions de l’artiste oscillent au rythme de sa musique. Normal, chez les Cabrel, on n’est pas très éduqué politiquement. « Ma mère a voté longtemps pour Chaban-Delmas, sans savoir s’il était de gauche ou de droite, juste parce qu’elle le trouvait beau garçon », confie celui qui a vendu des millions de disques.
À 15 ans, Cabrel tâte de la politique en grenouillant chez les maoïstes. L’ado a sa propre vision du Grand bond en avant : « On luttait pour avoir les cheveux aussi longs que l’on voulait ; j’étais moi-même soi-disant un perturbateur. » Dans les années 80, il participe aux grandmesses humanitaires. Famine en Éthiopie, ours pyrénéen en perdition, Palestiniens en territoires occupés… Le monde est trop injuste pour le troubadour, alors il réagit. Plus avec son coeur qu’avec sa tête. D’où des aphorismes étourdissants : « Ce que l’on fait aux Palestiniens, ce que l’on fait aux Indiens : c’est comme si on me volait moi-même », clame Cabrel en 1987. La montée du FN lui fait sortir sa sarbacane et tirer Saïd et Mohammed (1983), avec le naïf espoir que son texte puisse stopper net la percée du parti d’extrême droite. « Ce fut une désillusion artistique et sociétale… »
En 1989, celui qui a toujours refusé de s’embrigader tombe dans le chaudron de la politique locale et se présente sur une liste « gauche et ouverture » aux municipales. Pendant douze ans, Cabrel applique à la lettre l’antienne « agir local, penser global » de l’altermondialiste José Bové, à qui il voue d’ailleurs une admiration sans borne, jusqu’à le soutenir dans sa croisade contre la malbouffe en lui offrant un concert à Millau, le 28 juin 2000. Mais son attirance pour le discours écolo et son combat pour la justice ne l’empêchent pas de voter Sarkozy en 2007. « On peut être à la fois très humain et voter à droite », se justifie-t-il. La gauche laïcarde a toujours rebuté ce Français aux racines chrétiennes. Avant un énième virement de bord en 2012 ? Le 7 novembre, il était l’un des invités de Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de Vivement dimanche…
………