Alors que la présidentielle s’est enfin tenue dimanche, un rapport secret de l’ONU montre que le pays est toujours en proie aux luttes armées et au racket de ses ressources économiques.
« Dans le nord du pays, des milices quasi privées contrôlent les ressources naturelles et continuent d’extorquer des loyers aux entreprises locales et à la population civile », lit-on dans un rapport rédigé par un groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire, remis au président du Conseil de sécurité le 8 avril 2009 et que Bakchich a pu se procurer.
On apprend également qu’il existerait « des pistes d’atterrissage non surveillées dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, région frontalière du Liberia » et que « les unités des FDS-CI [les forces de défense favorables au président Laurent Gbagbo, ndlr] et des FDS-FN [les Forces nouvelles, celles du nord de la Côte d’Ivoire] ont délibérément retiré des armes des sites et installations avant les inspections ou n’ont pas déclaré les lieux de stockage de ces armes ».
Ce rapport d’une quarantaine de pages, qui n’est pas destiné au public, constate la présence d’hélicoptères immatriculés en Afrique du Sud, de munitions fabriquées au Mali. « Le groupe [d’étude] a obtenu des preuves matérielles indiquant des violations systématiques de l’embargo onusien [sur les armes] », affirme le rapport, notamment sur les « kalachnikovs, mais aussi des armes lourdes, y compris des mitrailleuses montées sur camion ».
Les armes passent souvent par la Guinée. Pour se réarmer, les deux clans taxent les richesses du pays en rackettant les entreprises. Chaque société active dans le coton a été contrainte de verser 160 000 dollars (116 000 euros) pour la campagne 2008-2009. « Des éléments du gouvernement ivoirien et des Forces nouvelles exploitent de puissants réseaux économiques. » Des réseaux bien ancrés dans le cacao, le café, le bois, le coton, la noix de cajou… sans oublier les diamants. Pour échapper à cet autre embargo onusien, les pierres précieuses changent de nationalité et deviennent ghanéennes ou maliennes. Le rapport remis au Conseil de sécurité de l’ONU constate qu’il n’y a pas de fouille corporelle à l’aéroport d’Abidjan ! « La surveillance peu rigoureuse à l’aéroport facilite le passage clandestin de diamants en violation de la résolution 1643. »
En clair, la Côte d’Ivoire est toujours un pays divisé en deux, le Nord contre le Sud, avec des armes de chaque côté.
Rappelons que Laurent Gbagbo, leader du Front populaire ivoirien, a été élu en octobre 2000 pour un mandat de… cinq ans. Il avait obtenu 59,4 % des voix, mais avec un taux de participation de 37%.
Depuis 2005, Gbagbo a joué la carte de la terreur (Nord contre Sud, rébellion armée, commission électorale pas prête…) et est ainsi parvenu, mois après mois, à repousser la prochaine échéance électorale.
Au fait, qu’a fait l’ONU depuis qu’elle sait tout ça ? Rien.