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William Bourdon : « Un procès en sorcellerie »

Congo-Brazzaville / vendredi 26 mai 2006 par Setchen Saw
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Au pays du Cobra-Suprême, la bonne gouvernance et l’Etat modeste ne sont pas des slogans creux. La preuve, cette facture pour sept nuits d’hôtel de 81.706 dollars [1] laissée par son altesse Denis Sassou Nguesso lors d’une récente escapade new-yorkaise, qui paraît-il, aurait ulcéré au plus haut point le patron de la Banque mondiale Paul Wolfowitz.

Le brave homme, qui tente de ramener à la raison les plus gourmands du continent africain, a du pain sur la planche : Arrêtés le mois dernier, les deux coordinateurs de la section congolaise de la coalition « Publiez ce que vous payez » Christian Mounzéo et Brice Mockosso, ont certes été libérés, mais les charges qui pèsent sur eux n’ont toujours pas été levées. Ils restent tous les deux accusés d’avoir détourné des fonds de l’organisation fondée par Christian Mounzéo, « Rencontre pour la paix et les droits de l’homme ».

L’avocat et militant des droits de l’homme William Bourdon, qui revient de Brazzaville, décrypte le climat politique dans lequel se sont déroulées ces arrestations.

Comment interprétez-vous ces deux arrestations ?

Il se dégage l’impression très nette d’un procès en sorcellerie. Face à la demande de plus en plus forte de la communauté internationale, de bonne gouvernance et de transparence dans l’utilisation des comptes publics, l’idée qu’un militant des droits de l’homme puisse s’inscrire de façon professionnelle dans cette exigence, c’est quelque chose qui bouleverse le paysage. Ça change les habitudes et les comportements. Et s’agissant de ces deux garçons, ça en fait les enquiquineurs numéro un. Plus encore sans doute qu’un militantisme « classique » qui dénoncerait la torture et les mauvais traitements, parce qu’ils posent le doigt où ça fait mal, c’est à dire la prébende et les détournements d’argent public.

William Bourdon Officiellement, de quoi sont-ils accusés ?

A supposer qu’il n’ait pas été fabriqué de toutes pièces, le litige qui oppose Christian Mounzéo à l’Etat congolais est strictement civil. En tout cas ça n’a rien à voir avec une affaire pénale, et il faut une sacrée dose d’instrumentalisation pour aller encombrer la justice pénale avec une affaire pareille. C’est grotesque ! Est-ce que le plaignant a été manipulé, où est-ce un effet d’aubaine pour le pouvoir, ça, on ne le sait pas encore. C’est sûrement un peu des deux. En tout cas, la télévision avait annoncé leur arrestation avant même qu’elle n’intervienne. C’est dire si ce n’est pas exactement une affaire de droit commun classique comme l’essaie de le dire vainement le procureur de la République par voie de presse. Cette affaire soit disant non politique a occupé l’espace public de façon invraisemblable. Et elle n’intervient pas à n’importe quel moment : le pouvoir de Sassou Nguesso venait d’achever une première phase de négociation avec la banque mondiale.

Et ce qui est tout à fait extraordinaire, c’est que Paul Wolfowitz, qui n’est pas réputé pour être un amoureux absolu du monde des droits de l’homme, a pris position. Il a fait savoir à Sassou Nguesso qu’il trouvait préoccupant qu’on ait touché un cheveu de ces deux types, sachant qu’il y a deux conditions dans la remise de la dette actuellement en cours de négociation avec Brazzaville. Un : la bonne gouvernance, et deux, le renforcement de la société civile. Donc Christian Mounzéo et Brice Mackosso sont au centre de gravité de ce bras de fer entre Washington et Brazzaville.

Quelle est l’ampleur de la corruption actuellement au Congo-Brazza ?

Les gens que nous rencontrons sont très pessimistes. Certains prétendent que c’est la présidence actuelle à l’Union africaine de Denis Sassou Nguesso qui lui fait pousser des ailes… Mais la différence entre maintenant et il y a trois / quatre ans, c’est qu’à l’époque la Banque mondiale faisait mine de croire que les apparences rejoignaient la réalité. Et aujourd’hui, du côté de Washington, on refuse d’être dupe lorsque les effets de leurre sont aussi grossiers. M. Mounzéo et Brice Mackosso en deviennent des symboles.

Quelle est leur situation aujourd’hui ?

Ils ont été libérés au bout de trois semaines, mais nous attendons une décision sur l’issue de la procédure. Nous avons demandé qu’ils soient restaurés dans leur honneur l’un et l’autre et blanchis de toute accusation, c’est à dire qu’ils obtiennent un non-lieu général. Je ne suis pas sûr que ce soit le point de vue du procureur. Nous faisons confiance dans l’indépendance du juge d’instruction pour prendre la bonne décision. La seule façon pour Brazzaville de sortir la tête haute de cette histoire, c’est d’abandonner les poursuites tout de suite. En tout cas s’il devait y avoir des condamnations dans ce dossier, ce serait un très mauvais signe sur la capacité de Sassou Nguesso à sortir du marasme dans lequel il se trouve. S’il y a un procès, je me déplacerai pour les défendre.

[1] l’Express, 25 mai 2006


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