L’éditeur-blogueur-chroniqueur mais aussi auteur, vient de publier « Le cabinet noir, au cœur du système Yves Bertrand », où il raconte comment l’ex patron des RG a tenté de le manipuler. Portrait.
« Je n’aime pas trop parler de moi », lâche Guy Birenbaum quand on lui apprend que Bakchich va lui refaire le portrait. Difficile à croire quand on sait que le monsieur tient chronique depuis le 7 février 2006, d’abord, sur le blog NRV, sur 20 minutes.fr, puis depuis août sur sa « plage privée », hébergée par le Post.fr. Le saltimbanque vient de publier aux Arènes « Le cabinet noir, au cœur du système Yves Bertrand ». Et comme à chaque fois, la mise en scène est réglée comme du papier à musique. Teasing sur son blog, (déjà en 2006, quelques billets elliptiques ont fait allusion à l’affaire Clearstream, mais Guy Birenbaum a repoussé la parution du livre), création d’un site internet, multiplication des passages en plateau télé, radios et web (France 5, Canal +, BFM, France Inter, nouvelobs.com… Cet as de la com ne fera pas Ruquier à son grand désespoir). Sincère ? Peut-être. Mais comme le confie un de ses proches, sous ce vernis rebelle, « Guy fait partie du système ».
En 2006, lui, se voyait plutôt comme un « blogueur en déroute. Éditeur à la rue. Universitaire en disponibilité ». Deux ans plus tard, voilà comment il se présente sur son blog : « Médias, politique, édition. J’ai un pied dedans. Deux pieds dehors. Ou le contraire. Ça dépend des jours. Et de mon humeur. Mais ce que je préfère c’est ma plage… »
La plage, c’est celle de Trouville, où il fuit le week-end l’agitation politico-médiatique qu’il aime tant fréquenter la semaine. Les médias, ce fut VSD, Canal +, RTL, Choc, ou encore Europe 1. Comme éditorialiste, gouailleur, ou chroniqueur en colère. Une colère maîtrisée, car Guy Birenbaum l’a compris, le système médiatique broie les âmes un peu trop vives. Il en fera l’amère expérience quand, peu après la publication par sa maison d’édition Privé, d’un livre sur les barbouzeries à Canal +, [1], il « disparaîtra » de l’antenne. Mais chez Guy Birenbaum, comme chez Lavoisier, « rien ne se perd, tout se transforme ». Censures, auto-censures, enquêtes et contre-enquêtes contribuent à créer la marque.
Guy Birenbaum a un petit côté donneur de leçon qui, s’il ne disait pas des choses pertinentes, pourrait lasser. Dans un long entretien accordé à des étudiants montpelliérains, l’éditeur donne son avis sur l’état de la presse française. Le constat est pessimiste. Il revient sur les évolutions du métier de journaliste et sa pénible mutation sur internet. Et assure qu’à la différence de tous « Moi, j’ai l’esprit du net ». De tous ? Non. Le Post.fr, l’hébergeur de son blog, a ses faveurs. Or, selon un sondage My opinion réalisé sur un échantillon de six personnes représentatifs de la population de Bakchich, plus quelques proches de l’intéressé, 100% des personnes interrogées préféraient lire le blog qu’il tenait sur 20 minutes.fr que celui du Post.fr. CQFD.
Docteur en sciences politiques, l’homme aime faire des « coups » et le reconnaît. C’est d’ailleurs principalement avec sa casquette d’éditeur qu’il en a réalisés. Chez Denoël d’abord, avec la collection Impact, où il a édité des livres d’Eric Halphen, ancien juge d’instruction, ou encore d’Arnaud Montebourg, puis chez Privé, qu’il cofonde en 2004 avec Pierre-Louis Rozynès, fondateur du site Desourcesûre (qui a fusionné avec Bakchich) et Emmanuel Pierrat, avocat spécialiste du droit la presse. Des échecs peut-être, mais des pavés dans la mare aussi. Comme lorsqu’il publie, cette fois comme écrivain, « Nos délits d’initiés », édité chez Stock. Un petit traité d’explications des compromissions journalistico-politique, où il se fera pour l’occasion et avec son consentement, bon nombre d’ennemis. Une sortie courageuse dans ce milieu rongé par la confraternité.
Mais à trop sortir, on s’enrhume. Et quand il s’apprête, entre les deux tours de l’élection présidentielle, à publier un livre « un peu chaud » signé par l’un des fils de Philippe de Villiers, Michel Lafon, qui chapeaute les éditions Privé, s’agace. « Je ne sais pas quoi faire de toi », lui lâche-t-il. Il faut dire que peu avant était sorti le livre d’Imad Lahoud, l’informaticien de l’affaire Clearstream, qui n’avait guère plu en Sarkozie. Et le grand manitou de l’édition de se séparer sans ménagement de son éditeur un peu revêche.
Rebelote avec RTL où il démontrera par l’absurde qu’il ne fait pas bon « étriller » les confrères. Peu après avoir publié sur son blog une vidéo d’Alain Duhamel, (l’éditorialiste de talent qui n’avait pas jugé bon de parler de Ségolène Royal dans son livre sur les présidentiables en 2006) déclarant qu’il allait voter pour François Bayrou (une vidéo, soit-dit en passant déjà disponible sur dailymotion), RTL, où officient alors Alain Duhamel et Guy Birenbaum, se sépare du second au bénéfice du premier. L’ire duhamelienne aura eu raison du petit blogueur.
« Guy est un homme libre », note Eric Halphen, l’un de ses auteurs devenu ami. « Guy a un truc rare dans ce milieu, il est d’une fidélité absolue en amitié », ajoute Sébastien Fontenelle, un autre de ses auteurs resté ami (par ailleurs blogueur à Bakchich). En fait « Guy est un maître de l’agit prop. Et pour ça, il a pas peur de son téléphone », analyse Pierre-Louis Rozynès, un ancien collaborateur devenu ex-futur ami. Bref, « c’est un agitateur d’idée au sens positif du terme », conclut Arnaud Montebourg, l’un de ses auteurs aujourd’hui ami.
Et toutes ses qualités, il les a mises au service de son dernier coup. Raconter par le menu comment Yves Bertrand, ancien patron des RG et graphomane patenté a tenté d’intoxiquer des journalistes et/ou des éditeurs dans le but de servir Chirac et d’ « assassiner » Sarkozy. Un livre-témoignage comme une pierre de plus à l’édifice Sarkozyste ? L’auteur s’en défend avec vigueur. A part quelques journalistes d’investigations, dont l’un n’a pas hésité à le comparer en privé au journal collaborationniste Je suis Partout - une insulte à la mode en ce moment - la presse a plutôt bien accueilli le livre. Même le Canard enchaîné qui l’avait secoué à la sortie du livre « Délits d’initiés », le caresse de ses plumes. Un retour en grâce médiatique ? Le livre n’a pour l’instant pas été attaqué sur le fond. L’hypothèse d’un cabinet noir fait donc son petit bonhomme de chemin.
De son avenir, Guy Birenbaum ne dit pas grand chose. Il vient de quitter les éditions Ramsay, mais assure que la plume continue à le démanger. « Un pied dedans. Deux pieds dehors. Ou le contraire. »
Pour mieux porter la plume dans la plaie [2] ?
Lire ou relire dans Bakchich :
[1] Un agent sort de l’ombre, par Pierre Martinet, Eds Privé, 2005
[2] Une expression gentiment empruntée à un certain Albert Londres
Ouais, ouais, ouais…
Rien dans cet article sur ses relations avec cet autre "électron libre" qu’est Alain Bauer.Bauer serait-il à ce point infréquentable ?
D’ailleurs je note que dans les publications que Birenbaum met en avant il n’est nulle part trace du livre de l’Adjudant Roussel "Homicide 31".
Personne ne peut douter que les RG et en particulier Yves Bertrand n’aient été au + haut point intéressés par ce que Birenbaum pouvait savoir de cette affaire puante qu’est l’affaire Alègre … et que les RG ne savaient déjà..
C’est bizarre dans toutes ses dernières interventions médiatiques, Birenbaum a oublié son action comme éditeur de l’Adjudant Michel Roussel. Il n’en parle plus…
Pourtant on le croyait défenseur de la veuve et de l’orphelin et grand pourfendeur des "délits d’initiés"… Y aurait-il des dossiers auxquels il ne faut plus toucher même quand on on est "un électon libre" ?
Eric Halphen qui est très courageusement revenu pantoufler dans la magistrature (à la circulation…), on ne ricane pas dans les rangs… le renseignera probablement sur les turpitudes du milieu.