Après de vilains propos sur le chef du gouvernement espagnol, Nicolas Sarkozy est en Espagne pour deux jours. Et amadoue la presse ibère grâce à Carlita qu’il a emmenée dans ses bagages.
La Sarkomania tourne à plein à Madrid. Il faut dire que le teasing a été bon. Traiter de « pas très intelligent » le type qui est en train de dérouler le tapis rouge pour vous recevoir en visite d’Etat est une manière sûre de chauffer le salle et de se garantir un bon public à votre arrivée.
Les propos dévoilés par Libération, démentis, rectifiés, corrigés mille fois par l’Elysée, ont fait le tour du pays. Quoi, pas intelligent notre Zapatero ? Bilan : plus de 600 journalistes se seraient accrédités pour assister à la conférence de presse conjointe Zapatero-Sarkozy, donnée le mardi 28 avril à l’issue du sommet bilatéral franco-espagnol, histoire de voir comment les deux hommes vont se passer la pommade dans le dos. Un record d’affluence, dit-on du côté du service de presse du palais de la Moncloa, le siège de la présidence du gouvernement.
La dernière fois qu’était venu à Madrid, le président de la République, en mai 2007, tout le monde tenait à l’aise dans la salle de presse. Cette fois, c’est moins sûr. Forcément, à l’époque Sarko n’avait pas pensé à jeter des doutes préalables sur le QI de son voisin d’estrade. Ah, oui, et aussi, il n’y avait pas Carla…
Bon ne soyons pas mesquins : Sarko est une bonne tête d’affiche en Espagne. Il a eu la bonne idée de se faire connaître d’abord comme ministre de l’Intérieur français. Soit un super bon point, puisque la coopération policière transfrontalière contre l’ETA (qui opère en Espagne mais dont les chefs sont repliés dans le sud-ouest français) est l’un des questions clés dans les relations entre les deux pays. Aux yeux de tous, donc, il est l’homme fort de la lutte anti-terroriste, celui qui a mis fin aux ambigüités françaises. « Une réputation un peu usurpée, reconnaît un dirigeant du parti populaire, puisque la collaboration policière et judicaire a fort heureusement commencé avant lui. »
N’empêche, avec Super-Sarko, c’est la grande lune de miel des forces de l’ordre et il ne rate pas l’occasion de le répéter. « Matin, soir et nuit, je suis contre l’ETA », affirme-t-il dans un entretien donné à El Pais et publié à la veille de son arrivée. Avec des mots pareils, forcément, tout le monde aime Sarko, normal. Avec fascination et agacement à la fois.
La droite espagnole l’aime parce qu’il est le premier leader de droite français à ne pas avoir un regard condescendant. Il rattrape le temps perdu par la droite française. Jusque là, le courant n’était jamais vraiment bien passé. Dans les années 70, Giscard trop méprisant, avait joué l’attentisme au lieu de tendre la main à la récente démocratie espagnole après la mort de Franco. Chirac avait eu le don, ensuite, d’exaspérer José Maria Aznar. La jovialité de l’un buttant sur la raideur crispée de l’autre. Sarkozy, lui raccommode les morceaux.
Au moment où le parti populaire espagnol avait le vent en poupe comme formation libérale européenne, il est venu à Madrid chercher des idées et des conseils pour préparer la refondation du gaullisme dans l’UMP. « Il est arrivé en égal, pas en Français paternaliste, comme ses prédécesseurs », assure un dirigeant du PP (Parti populaire).
A gauche on l’aime… parce qu’on ne peut pas faire autrement. Sarko, c’est l’ami du chef. Pour les socialistes, c’est une situation tordue. On embrasse Ségolène en meeting mais on remercie Sarko. C’est lui tout de même qui a donné un strapontin à Zapatero au dernier G 20. Donc, on ravale les critiques pour ne pas déranger. Et puis il a l’avantage d’arriver la bouche pleine des valeurs de la République, pour défendre la laïcité, et remettre l’Eglise à sa place, ce qui fait toujours du bien. Sans parler de sa vie privée scandaleuse et glamoureuse, qui a fait tordre le nez à toute une partie de la droite conservatrice, ce qui fait toujours rire.
La presse attend de pied ferme le couple. La semaine dernière, La Vanguardia a ouvert le bal avec la republication des photos signées Annie Leibowitz d’une Carla Bruni hollywoodienne dans les salons de l’Elysée. Le quotidien El Pais, proche des socialistes espagnols a offert cinq pages entières à Sarko, en ouverture de son dans son édition de dimanche.
Il joue de sa fibre hispanophile et se flatte de ses amitiés avec Felipe Gonzalez, Aznar, Zapatero, le Roi Juan Carlos… Les temps changent : avant il se prévalait des origines de Cecilia, descente du compositeur Rafael Albéniz, maintenant il affirme sa passion pour la corrida. Si certains chroniqueurs ironisent sur le « festival de moi » offert par le « Petit Napoléon », tout le monde se pressera à la (brève) réception donnée en son honneur à la résidence de l’ambassadeur de France. Pour le voir de près. Lui ? Enfin Carla, surtout.
A lire ou relire sur Bakchich.info
pourquoi tant d’éminents journalistes relatent aussi fréquemment les fresques "people" sarkoziennes ?
J’aurai bien aimé lire les aventures de Tonton avec la Pingenot notamment, entre 1981 et 1995…
Ils étaient ou à l’époque, les mêmes journalistes ? Heureusement, ils ont retrouvé leur plume (ou la parole) depuis 1995. Ouuuuuf la démocratie est sauvée
Je commence à en avoir ras-le-bol de lire des papiers aussi légers à propos de "Sarko" (sic) où l’ironie ressemble à du premier degré et demi.
Je vais installer l’extension Firefox Sarkofree. Pas sûr qu’ensuite il restera encore quelque chose à lire sur Bakchich…