Chronique de l’essai "Medias, la faillite d’un contre-pouvoir" de Philippe Merlant et Luc Chatel.
Il existe encore des journalistes pour prêcher la pénitence de leur profession. Bénis soient-ils. Philippe Merlant et Luc Chatel, publieurs de vérités à « La Vie » et « Témoignage Chrétien », ilots de liberté préservés par Dieu, sont les ultimes spécimens d’un métier oublié que l’on nommait journalisme. Leur ouvrage, « Médias. La faillite d’un contre-pouvoir », sent le Coca chaud et le café froid de ces salles de rédactions où se blottissent les petits soldats d’une presse réconfortante, donc peu dérangeante. Les deux auteurs du bouquin dénoncent le glissement progressif d’un journalisme debout vers un journalisme assis et qui finira, si rien ne l’arrête, couché. Que dire de l’investigation, cette « fouille des recoins » et de « l’exploration des marges » ? Le résultat est, qu’apparemment, « il ne s’y passe rien », puisque la presse ne relève plus, ou presque, que les petits clapotis du « reflet superficiel de la société ».
Le livre est une ethnographie limpide du journalisme de notre temps. Comment les faits divers continuent-ils de faire diversion des vrais drames, comment les journalistes s’enferment dans une vision du monde qu’ils croient « naturelle », comment le spectaculaire et la fascination pour « les gagnants du pouvoir » invite à la passivité plus qu’à l’engagement. Enfin comment la « rivalité mimétique », entre journaux, condamne le lectorat à ce que « le monde reflété dans les colonnes ou sur les ondes ne soit plus le leur ». Ce qui explique la rupture entre le public et le journal.
A trop se regarder dans le miroir, la presse écrite en oublierait presque que cette glace peut devenir mouroir. L’introspection des dérives du système médiatique a valeur d’extrême onction : « C’est la confession et non le prêtre qui donne l’absolution », disait Wilde. Merlant et Chatel donne des solutions pour que la presse se redresse, au propre comme au figuré. Bakchich fait partie des recettes élues dans ce livre ! Deo gracias.