Dans son dernier roman, Fadéla M’Rabet nous conte l’histoire d’une Algérie resplendissante peuplée de femmes belles et douces, que l’auteur souhaite être la solution à la dictature du gouvernement algérien.
Alger. Nana, la douce et généreuse, la femme de l’oncle Ali, est dans son linceul blanc. Autour d’elle, sa famille et ses proches se sont réunis pour la pleurer. On se souvient, et peu à peu, remontent à la surface les souvenirs d’enfance dans la maison de famille de Skikda, ville de la côte méditerranéenne. Là-bas y régnait une quiétude douce aromatisée de café, de fleurs d’oranger et de jasmin. Une sérénité unique. L’auteur aussi y est née. Là-bas, vivaient sous le même toit Nana, Fella et Yasmina, la grand-mère Djedda, Baba, oncle Ali et Yemma. C’était la guerre d’indépendance algérienne et la vie était belle et pleine d’espoir.
Même les moineaux du patio de Skikda et le chat aux yeux d’or sont venus pleurer Nana. Parce qu’elle avait un quelque chose cette nana-là… Crac ! Les vingt premières pages lues, et se dévoile alors la réelle intention de cette fiction de Fadéla M’Rabet : dénoncer. De Paris à Montpellier, d’Alger à Skikda, dénoncer. Dénoncer la situation de la femme en Algérie parce que « de tout temps, les tyrans se sont acharnés sur elle pour en faire un monument funéraire. Elle peut détourner l’homme de la prière et de la soumission totale à Dieu ». Dénoncer l’obscurantisme du gouvernement algérien parce que « c’est ce qu’ont trouvé les nouveaux possédants de l’Algérie pour justifier leur mépris du peuple, le déshumaniser, en lui faisant croire qu’il n’est capable que d’excréter et de fabriquer des déchets ». Dénoncer un Islam détourné de sa vocation première parce qu’« évoluer dans le respect du passé, de notre personnalité, conformément à notre spécificité arabo-musulmane : on sait ce que valent ces arguments, d’où ils viennent et qui ils servent ». Dénoncer une atmosphère de résignation parce que « le colonisateur a mis tout en œuvre pour nous dévaloriser. Il y a en partie réussi. »
Où sont passés les élans de la guerre d’indépendance ? L’auteur, l’une des premières féministes algériennes, docteur en biologie, analyse la situation désespérée de l’Algérie actuelle. Même si son propos est parfois virulent, notamment à l’égard des hommes, elle prône toujours la raison pour qu’algériennes et algériens sortent leur pays de la dictature des généraux… un premier pas vers la démocratie.
Le chat aux yeux d’or de Fadéla M’Rabet, Des femmes, 10 €.