Que fait un président togolais de passage à Paris ? Il mange…
Pour sa première visite officielle en France depuis son coup d’Etat par les urnes, Faure Gnassingbe, le président togolais, est venu se faire servir les plats sous les lambris de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris. L’expression est à prendre au propre, puisque, prévu pour un séminaire à 11h30, il est arrivé une heure plus tard, pour le déjeuner. C’est devant un parterre d’investisseurs et une assiette de foie gras qu’il s’est exprimé, sans faux semblants, sur l’état économique désastreux de son pays. Son franc-parler avait de quoi surprendre. Heureusement, son ministre des Finances et des Privatisations, Payadowa Boukpessi, avait préparé le terrain, détaillant dans la matinée la chute drastique des exportations de coton (passées de 180 000 à 70 000 tonnes en un an) et l’extraction de phosphate en berne. La réunion avait pour intitulé « La relance prévisible de l’économie nationale » : au point où ça en est, la situation ne peut que s’améliorer. Alors on s’interroge : à part un copieux déjeuner, qu’attendaient la centaine de représentants des fleurons de l’économie française de cette réunion ? Car sous les cravates, il y avait du beau linge : Philippe Colleu, directeur général d’Accor Afrique, Patrick Lucas, patron du Medef Afrique et Pdg des assurances Gras Savoye, très bien implaté au Togo, Philippe Gautier, chef du service Afrique et développement au Medef, Philippe Delleur, directeur Afrique pour Alsthom ainsi que les représentants de Bolloré et Alcatel. Cerise sur le gâteau, Michel de Bonnecorse, le « M. Afrique de l’Elysée », est venu faire un tour.Et lorsque Son Excellentissime Majestuosité invitait à investir dans les autoroutes ou la Zone franche de son pays (tenue par son frère Kpatcha Gnassingbé), tous opinaient du chef avec une gourmandise qui ne tenait pas qu’à la qualité du repas.
On eut pu les croire plus réticents à investir dans ce petit territoire parmi les plus pauvres du continent, mais non. Explication : depuis l’accord politique global signé à Ouagadougou cet été, le Togo est sur le chemin de la réconciliation nationale, qui doit faire oublier le sang versé lors de l’élection de Faure Gnassingbe. Oublier le sang versé lors de l’élection, mais surtout… ramener les fonds européens ! Pas moins de 90 millions d’euros de subventions devraient renflouer l’économie nationale. De quoi ouvrir de nombreux marchés et chantiers publics… On a donc parlé autoroutes et tourisme en plat principal. Au dessert, on a attaqué les marronniers : prospection de pétrole off-shore, très à la mode dans la sous-région, et crainte de la concurrence chinoise. Le café était serré, l’agenda du président togolais aussi. Après avoir remercié tous les quinquas encravatés, il est parti en quête de féminité retrouver Madame Alliot-Marie.