Après le Palais de Tokyo en 2008, Sidaction met encore les petits plats dans les grands pour sa soirée de lancement au VIP Room Theater. Des people, des grands patrons, du champagne et des petits fours à gogo.
Arrivée en même temps que Line Renaud, marraine du Sidaction depuis quinze ans déjà qui se fait mitrailler par des photographes en rang d’oignons à l’entrée, je n’ai pas droit aux mêmes honneurs. Les invités se pressent dans le club, entre bouteilles de Dom Pérignon exposées dans des alcôves en verre et jeunes serveurs en chemise scintillante et kilt en cuir noir. Premier constat : très peu de représentants de la fameuse diversité chère à Monsieur Sarkozy, à l’image des têtes d’affiche des grands médias, dont tous les patrons sont présents ce soir.
Le point presse, prévu à 19 heures, peut enfin commencer, avec un Pierre Bergé ému, qui remercie les médias pour leur implication dans une maladie qui touche le monde entier. Pointant le manque de moyens de la recherche et l’accès aux soins insuffisant pour les malades, le Président du Sidaction insiste sur l’importance de l’action de l’association, qui se substitue de plus en plus aux pouvoirs publics en investissant équitablement l’argent récolté chaque année entre la recherche scientifique et les organismes s’occupant des malades. Différents intervenants se succèdent sur scène, dont certains bien remontés contre l’action, ou plutôt la non-action, des décideurs politiques.
Ainsi, le Docteur Yves Lévy, Président du Comité scientifique du Sidaction, qui fait remarquer que l’insécurité sanitaire en France n’est pas près de diminuer, puisque « si l’argent pour la recherche dans le domaine public ne régresse pas, c’est que nous avons de la chance », Frank Rodenbourg du Collectif Interrassociatif TRT5, qui crie sa rage contre les nombreuses réformes de la Sécurité Sociale (« De plus en plus de malades doivent aujourd’hui renoncer aux soins »), de l’hôpital public (« La tarification à l’activité rend la prise en charge difficile, voire impossible ») ou encore de la biorecherche médicale (« Des menaces pèsent sur l’Institut National de Recherche et de Sécurité »).
Le contexte économique actuel, morose à cause de la crise mondiale, permet d’ailleurs à Eric Fleutelot, responsable des programmes internationaux de Sidaction, d’interpeller l’audience sur le sort réservé aux malades, victimes collatérales de la crise dans les pays en voie de développement : « Moins de traitement en Côte d’Ivoire ou au Kenya parce qu’il faut sauver l’industrie automobile en Allemagne, moins de préservatifs distribués en Haïti parce qu’il faut sauver les banques suisses. », et d’accuser, lui aussi, ces décideurs qui n’ont jamais tenu leurs promesses. On le voit, le cru 2009 du Sidaction est éminemment politique, et le public est en phase. D’ailleurs, en parlant de public, aucun responsable politique n’est en vue, ce que personne n’a manqué de relever, si ce n’est deux représentantes du Ministère des Affaires Étrangères qui ont bien du mal à faire démentir ces accusations de non-assistance à personne en danger.
Les discours coup de poing, bien salutaires en ces temps sinistrés, sont entrecoupés de messages de stars du petit écran, allant du classique « Sortez couverts » lancé par un Christophe Dechavanne pouvant mieux faire au « Pécho c’est bien, se protéger c’est mieux » pour un Cyril Hanouna en verve. Les invités peuvent maintenant laisser ces tristes considérations derrière eux et profiter de l’open-bar (n’en déplaise à Madame Bachelot) et des petits fours, pendant que des DJ en vue s’activent aux platines, et que des bénévoles de Sidaction tentent, tant bien que mal, de vendre des billets pour la tombola prévue plus tard dans la soirée, avec un argument choc : « Pour 30 euros, vous avez une chance sur cinq de gagner des lots prestigieux ! ». La lutte des malades du SIDA est peut-être une bonne cause, mais pour récolter des dons lors d’une soirée, les lunettes de soleil Tom Ford, les cravates en soie Hermès ou les verres en cristal Baccarat sont le meilleur des arguments.
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