Les excuses de Guillaume Pépy, le patron de la SNCF, suite à la grève imprévue des cheminots de Saint-Lazare, s’inscrivent dans un plan de com’ bien en place, qui permet de ne jamais toucher au fonds du problème.
Pas plus les excuses de la SNCF, (réclamées non sans démagogie par Sarkozy) que la ristourne supplémentaire sur l’abonnement du mois de février, annoncée hier soir sur France 2 par Guillaume Pépy, ne paraissent être de nature de mettre un terme au cauchemar enduré par les usagers du service public. « Plus jamais ça », a ainsi proclamé le patron de la SNCF, après la grève « sauvage » des cheminots, qui a paralysé l’ensemble du trafic à partir de la gare Saint-Lazare. Une grève imprévue, qui a contraint des centaines de milliers de voyageurs à regagner leur domicile en usant du système D, et surtout de la seule ligne du RER en service – celle qui conduit à Saint-Germain en laye et qui présente la particularité d’être gérée par… la RATP. Rapidement, des milliers de véhicules ont ainsi convergé vers Saint-Germain pour récupérer un proche. Ce qui a immanquablement provoqué un immense embouteillage. Sur place, d’importantes forces de police étaient déployées pour tenter de canaliser la circulation et une foule prenant d’assaut les trop rares bus mis en place pour acheminer les voyageurs vers les différentes villes du département.
Pour ne prendre qu’un seul exemple, citons celui de ce collégien qui a mis 2h30 pour rallier son domicile distant de 8 km…
Lorsque Pépy indique qu’il a pris la décision « exceptionnelle » de fermer la gare Saint-Lazare pour des « raisons de sécurité », il omet de dire que cette décision a été en partie prise pour éviter que les voyageurs ne cassent son jouet en passant leur colère sur la gare, actuellement en pleine rénovation.
Tout un symbole que cette rénovation de la vitrine d’une SNCF à bout de souffle. Une gare rénovée, « une vitrine » – c’est d’ailleurs la seule amélioration sur laquelle les voyageurs peuvent escompter pour les mois et les années à venir ! On trouve là le fruit de la politique engagée par Guillaume Pépy lorsqu’il était le bras droit de Louis Gallois, avec le lancement du réseau « Transilien ». Des messages publicitaires, 200 gares rénovées, des campagnes de politesse, une politique pour les garages à vélos, bref de quoi satisfaire les bobos. Mais une SNCF en panne qui, depuis 30 ans, n’a procédé à aucun investissement majeur et se contente de gérer au jour le jour les incidents à l’aide rustine.
Le diagnostic est parfaitement connu, et ce n’est pas seulement par hasard si le nouvel « incident » de mardi est intervenu sur la ligne A du RER. Ligne de transport en commun la plus engorgée d’Europe, la ligne A du RER transporte plus de 280 millions de voyageurs par an et régulièrement plus d’ un million par jour. Le seul investissement programmé n’interviendra pas avant… octobre 2011, avec la mise en place de quelques rames d’une capacité légèrement supérieure….
Tandis que, au grand dam des usagers, le service de la communication de M. Pépy persiste à afficher des taux de ponctualité qui frisent les 90%, il n’y a pas grand risque à pronostiquer que les événements « exceptionnels » de ce mardi noir se reproduiront d’ici peu. Les statistiques mirobolantes de la SNCF n’épousent que de très loin les constatations relevées par exemple par le mensuel Que choisir. En 2001 (déjà !), ce dernier avait relevé les horaires de 180 trains pendant le mois de novembre, et constaté que 44%, soit près d’un sur deux, était en retard.
Déjà, le 20 novembre 2003, on pouvait entendre sur l’antenne d’Europe 1 cet échange entre Louis Gallois, alors PDG, et Jean-Pierre Elkabbach.
Elkabbach : « Mais il y a tous ces retards en banlieue, une grogne grandissante des voyageurs…
Louis Gallois : « N’en jetez plus, il ne faut rien exagérer et laissez-moi revenir au TGV ! » [1]
Ce mercredi 14 janvier, les médias annonçaient à l’unisson une reprise normale du trafic. Une information pleinement confirmée par les écrans de la SCNF. Enfin presque… il précisaient toutefois en petit et en bas, « prévoir des perturbations ».
De fait, trains annulés, retards de 15, 20 minutes et plus si affinités, le train-train quotidien du voyageur francilien reprenait effectivement son cours normal. Rappelons qu’à l’origine de la grève mardi, s’est produit un regrettable mais terriblement banal incident, entre un cheminot et trois délinquants, lequel s’est soldé par une interruption de travail de 2 jours.
Le fait réellement nouveau, c’est que cet effondrement constaté du service public du transport ne touche plus seulement les transports de banlieue mais sévit aussi sur ce qui fut l’orgueil et la vitrine de la SNCF : Le fameux TGV. Là aussi, les incidents se multiplient. Le dernier en date a ainsi vu la SNCF mettre une nuit entière pour dépanner un TGV tombé en rade à Tours et lui faire rallier Paris. « Panne de caténaire ». Autant dire que, dans ce contexte, Coupat et sa bande de « terroristes » ferroviaires ont été accueillis comme le messie par un champion de « la com » tel que Guillaume Pépy. On l’a vu se précipiter à la première conférence de presse donnée par Michèle Alliot-Marie annonçant le providentiel coup de filet. Problème, même sous les barreaux, l’ultra gauche corrézienne paraît inexplicablement conserver son pouvoir de nuisance sur les caténaires de la SNCF…
Trains de banlieue en déshérence, TGV en rade, faut-il aussi évoquer la situation catastrophique du fret ? Alors qu’un accord sur le sujet était en passe d’être conclu avec les syndicats, la direction a brutalement reculé, inspirant cette réflexion à Sarkozy : « Pépy, on l’a pas nommé pour cela ». Une exaspération partagée par des usagers, comme par les agents de la SNCF. Il faudra un peu plus que de savantes recettes de communication mitonnées par Guillaume Pépy à Boboland pour redresser la situation. Et conserver son poste !
Lire ou relire sur Bakchich.info :
[1] Cité par les auteurs de « SNCF la machine infernale ». Editions Le Cherche midi / 2004 de Nicolas Beau, Laurence Dequay, Marc Fressoz
Juste une petite remarque sur le lycéen qui a mis 2h30 pour faire 8km.
Je suis assez vieux et fatigué mais je vais plus vite que ça à pied.
Je suis surpris que ce genre de solution ne lui ai pas traversé l’esprit.
La méthode est simple pour les libéraux (hystériques) qui prétendent nous gouverner : désorganiser, démanteler, La poste, la SNCF, tout ce qui relève du Service Public.
Comme conséquence de ce SABOTAGE volontaire et concerté, la populace accueillera avec joie la privatisation et l’arrivée de la concurrence : car bien sûr ma bonne dame, vous voyez comment ces services publics marchent mal ! Avec le privé, ce ne pourra être que mieux !
Ben voyons.
Evidemment la privatisation ne règlera strictement rien, à part peut-être pour quelques grosses entreprises qui viendront parasiter le système en commercialisant des trains de luxe.
Une idéologie de destruction des acquis est à l’oeuvre et elle prend bien des aspects…