Branchez Probst sur le monde et la politique française des affaires étrangères, vous arrivez vite en Afrique, son terrain préféré. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas content.
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Monsieur Probst,
J’ai de la sympathie pour vos chroniques sur Bakchich TV, le ton est enlevé, nourri de références et d’anecdotes. Bien construite, l’analyse s’expose et s’illustre aisément, vos convictions gaullistes donnent du nerf et de la hauteur au propos, bref, il est agréable et intéressant de vous suivre.
J’étais donc un de vos fidèles jusqu’au jour où… vous avez cru bon de revenir sur votre position concernant la politique africaine de la France, parlant sans détour de « la nouvelle civilisation afro-européenne que j’appelle de mes vœux » . Ah bon ! Toute cette finesse d’analyse, tous ces clins d’œil parisiens, toute cette culture politique, pour en arriver là, en 2010 !! C’est un peu tard, Monsieur Probst !
Vous placez subitement le mot « civilisation » dans une bien curieuse mayonnaise…
Regardons un tout petit peu en arrière. Après l’épopée des missions d’exploration et de conquête, en à peine un demi-siècle, les Français - en même temps que les Anglais de leur côté - ont colonisé puis décolonisé une partie l’Afrique. Aller et retour en seulement cinquante petites années… Cette visite éclair nous engage-t-elle à épouser définitivement l’Afrique et les Africains ? Cet épisode bâclé de notre histoire, singulier autant que bref, ne nous incite nullement à adopter les valeurs et les mœurs africaines, pas plus qu’il n’engage les Africains à s’ajuster à notre réalité, en dépit des faux espoirs qui ont pu naître, ici et là, de nos collaborations réussies avec ce continent.
Quant à l’idée d’une « civilisation commune » (que vous appelez de vos vœux…) on ne voit même pas de quoi vous parlez, tant cette fusion apparaît invraisemblable et saugrenue en 2010.
Voulez-vous vous référer à l’esprit de l’Union Française inscrit dans la constitution de 1946 ? Ou bien, antérieurement à ce dispositif d’après-guerre qui consacrait une tendance humaniste de la pratique coloniale, vous référez-vous à l’investissement exceptionnel des anciens commandants de cercle qui, à l’image d’un Delavignette, d’un Labouret et de tant d’autres « broussards » remarquables, ont approfondi comme personne après eux l’approche humaine et politique des sociétés africaines ? Ces coloniaux qui, entre 1930 et 1960, ont véritablement donné leur cœur et leur vie à l’Afrique ont fait naître de part et d’autre, c’est vrai, un immense espoir de rapprochement des civilisations… Mais que reste-t-il de cette œuvre ? En quelles mémoires le don de soi de ces hommes d’exception est-il aujourd’hui estimé à sa juste valeur ? Ces coloniaux visionnaires que l’Histoire n’a pas reconnus ont-ils récolté autre chose que l’oubli et le mépris du plus grand nombre ? Puisque, dans le meilleur des cas, ils ne sont aujourd’hui que de belles figures de roman, il faudrait tout le talent d’un Romain Gary Dans Les racines du ciel pour redonner à ces héros de légende une dimension et un renom dignes de leur foi en l’Afrique et en l’homme, (et du même coup, donner un début de crédit à vos thèses !).
Or, De Gaulle est venu, et avec lui un effacement furtif et honteux du fait colonial. Le grand homme n’a jamais vraiment cru à cette « communauté française » de 1958 qui devait théoriquement succéder à l’Union Française de 1946 et qui allait immédiatement sombrer dans la vague des indépendances imposées en 1960.
Désolé, Monsieur Probst, même si l’Appel du 18 juin 1940 trône ostensiblement sur votre bibliothèque, vous n’êtes pas du tout dans la ligne gaulliste, et encore moins gaullienne. Qu’il me soit permis, à ce sujet, de vous rappeler les positions du Général sur nos rapports avec les populations anciennement colonisées.
Voici une citation qui date du 5 mars 1959, rapportée par Alain Peyrefitte dans son ouvrage C’était De Gaulle - Mémoires :
« C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoire ! Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français. Ceux qui prônent l’intégration ont une cervelle de colibri, même s’ils sont très savants. Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et les Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherez-vous de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées. »
« De l’huile et du vinaigre », Monsieur Probst, voilà à quoi se résume, en 2010, votre soi-disant projet de civilisation euro-africaine !
Car l’Afrique est un tout. La composante musulmane y est importante, et pas seulement en Afrique du Nord, comme vous le savez. L’attendrissante et juste évocation de l’Afrique sahélienne par Delavignette dans son œuvre littéraire et politique, notamment dans son roman Les Paysans noirs (1936), ne suffit plus, même dans un beau sursaut d’exaltation nostalgique, pour concevoir sérieusement ce que pourrait être, en 2010, l’apport africain à la civilisation européenne.
En effet, bien plus profondément que l’éphémère colonisation européenne en Afrique, aveuglément décriée aujourd’hui, la pénétration de l’islam s’est enracinée dans ce continent, elle a fini par fausser et dénaturer la finesse et la sagesse des cultures proprement africaines, de sorte que ces dernières sont devenues illisibles et inaudibles derrière l’écran anti-occidental inspiré par l’islam.
Sans vous en rendre compte peut-être, et au nom de je ne sais quel élan amical inspiré par les plus belles pages de notre histoire franco-africaine, vous êtes donc en train de prôner une fusion culturelle que quatorze siècles de guerres et de frictions avec les musulmans ont continuellement démentie. Comment osez-vous proposer aux Européens, même en paroles, même en rêve, un programme culturel aussi contraire à leurs modes de vie et de pensée ? Ce n’est pas sérieux, Monsieur Probst.
De surcroît, quand on rapproche votre suggestion de vos prestations de services auprès des chefs d’Etat africains, on ressent comme un malaise, Monsieur Probst. Un peu comme dans les amphis de mai 1968, on a envie de dire : « D’où tu parles ? ». En se remémorant vos missions de conseil auprès des élites africaines, on comprend mieux à qui vos discours s’adressent… En somme, vous ne sauriez déplaire à vos « clients. » Du coup, on se sent un peu floué de vous avoir écouté et pris au sérieux.
Karolus magnus, empereur dédaigneux,
Derrière vos épithètes peu flatteuses, on cherche un raisonnement politique, ou un raisonnement tout court, et on ne trouve qu’une incantation béate : l’Afrique, l’Afrique, l’Afrique comme d’autres s’obsèdent avec : l’Europe, l’Europe, l’Europe. Désolé mais, dans ces litanies, je n’aperçois toujours pas le début d’un argument en faveur de ce qui nous est présenté comme le souverain bien : la construction d’une prétendue « civilisation » euro-africaine. What is it ?
"Stylé", dites-vous ? Ce terme est presque inquiétant. Désolé, il me fait davantage penser à Kouchner avec son sac de riz qu’au De Gaulle du discours de Brazzaville.
Cédant à un cliché, vous reprenez une formule bien connue, parlant d’une « civilisation de l’Atlantique à l’Oural ». Soit. Mais que viendrait y faire une extension vers l’équateur ? au nom de quelle logique ? dans quel but ? pour le bien de qui ? Plus gênant encore : avec l’adhésion sincère de quels peuples ? de quelles figures politiques de l’histoire ou du présent ? On ne voit pas.
Quant à la préservation de la « paix » incidemment mentionnée au passage, il existe pour cela des instances internationales où sont déjà représentés les pays et les groupes d’influence des différents continents. N’y ajoutons pas d’autres « machins »…
Non, franchement, je ne vois pas sur quoi se fonde cet unanimisme pro-africain artificiellement prôné par M. Probst et par vous-même. Fantaisie d’africanophiles parisiens qui n’ont connu sur place que les palaces climatisés et le chouchoutage des élites.
Restons ce que nous sommes, c’est déjà quelque chose, vous ne trouvez pas ? Et contentons-nous de vivre en bonne entente avec les autres nations et les autres civilisations, proches ou éloignées. Il n’est pas nécessaire de devenir l’Autre pour s’entendre avec lui. Au contraire, c’est en conservant nos identités propres que nous tendons vers l’équilibre (et non en voulant nous « unir » à tout prix pour ressembler à l’autre).
Les rapports internationaux ne sont pas des « unions » mais des rapports de force et d’intérêt dans lesquels chacun essaie de trouver son bénéfice en modérant au mieux les conflits nés ou à naître. L’Afrique, comme les autres régions du monde, tire comme elle peut son épingle du jeu : jouant ses atouts, biaisant, subissant, marchandant, suivant le contexte, suivant l’interlocuteur, comme tout un chacun.
Qui sommes-nous pour prétendre englober leurs civilisations dans la nôtre ? Encore une fois, dans un nouvel enrobage (qui prétend tourner le dos au passé mais qui en reprend toujours les vieux réflexes) vous voulez leur refaire le coup de l’aide au développement et de la « civilisation » ? Vous ne croyez pas qu’ils ont déjà donné ?
Une prière : laissez aussi les citoyens Européens en dehors de vos fantasmes civilisateurs. A eux aussi on leur a déjà fait le coup de la « mission » universelle. C’est bon, restons en là, et laissez-nous tranquilles avec l’Afrique comme objet d’émotion. Les Africains sont nos voisins, comme d’autres le sont, ce ne sont pas nos compagnons de voyage. Nous n’avons pas avec eux de communauté de destin.
MAYONNAISE VINAIGRETTE ,SAVANT CUISTOT CE GRAND CHEF JAMES BORDEAUX, PROBALEMENT IGNORANT DES ASSEMBLAGES TELS QUE:CHOUCROUTE,BOUILLABAISSE,CASSOULET,POTEE OU SOUPE AU CHOUX,SALADE NIçOISE,TIEP,ATTIEKE,NDOLE CREVETTE, POULET YASSA, MAFFE AU BOEUF, COUSCOUS MECHOUI ET TOUTES LES SALADES DE FRUITS….. VIVE L’AMOUR !!!
jean de PARIS,
Bakchich, pourquoi cautionner un tel homme ?
Lui qui dit se préoccuper de l’avenir des africains mais a poussé au retour du dictateur Sassou Nguesso, fricottait allègrement avec les hommes de Foccart ou de Bongo…
Cf. cet autre article du Nouvel Obs : http://hebdo.nouvelobs.com/sommaire...
Si le ton et l’analyse est plus que discutable, les infos sur Probst en valent la peine.
C’est de l’hypocrisie pure.