Positivons dans la langue de bois grâce à la méthode de l’indicateur Bertrand.
La plupart des Français, nous disent les sondages et les urnes plutôt creuses, vomissent aujourd’hui l’UMP et exècrent ses dirigeants. Moi, l’UMP, je lui dis merci. Son comportement au cours des deux récentes soirées électorales, à l’occasion des régionales, m’a appris la sagesse.
Désormais, comme M. Xavier Bertrand, l’homme qui aime à humilier les journalistes, j’applique la méthode dite des « éléments de langage ». Souvenons-nous, le premier soir : « Non, l’UMP n’a pas perdu. L’importance de l’abstention démontre qu’au contraire les électeurs ont impitoyablement sanctionné les présidents de régions socialistes. » Puis, après le second tour : « Nous avons reçu cinq sur cinq le message des Français. Ils nous demandent à l’évidence d’accélérer les réformes. Nous allons accentuer notre politique. » Quand l’heure est grave, par exemple après un suffrage pas assez universel, on réunit les têtes de gondole conviées à la télé et on leur confie les éléments de langage, les mots de passe pour exposer le mieux du pire.
Cette attitude positive change ma vie. Mes éléments de langage personnels me rendent beaucoup plus fort pour aborder les problèmes du quotidien. Je ne savais comment révéler à ma femme qu’en raison de retards réitérés, de certaines négligences déontologiques et d’un petit prélèvement malheureux dans la caisse de mon employeur, mon licenciement venait de m’être signifié. L’exemple de Xavier Bertrand m’a soufflé quoi lui dire : « Amour joli, j’ai décidé de participer davantage à la vie du foyer. » La Société générale ayant, par voie de conséquence, sucré notre compte commun, j’ai pu développer cet élément de langage : « Mon coeur, à partir d’aujourd’hui, nous ne composons plus avec l’ultralibéralisme financier. » Enfin, ayant été l’autre soir conduit en garde à vue après une interpellation musclée pour ivresse sur la voie publique, j’ai usé du coup de téléphone légal pour appeler chez moi en ces termes :
– « Chérie… je ne voudrais pas me vanter, mais j’étudie présentement de très près le travail de la police. Pour un journaliste, c’est captivant.
– Ah ? Tu es en reportage ?
– Une sorte d’interview questions-réponses… Mais très vive ! ».