Les riches qui font vœu de pauvreté parviennent généralement mieux à leurs fins que les pauvres qui font vœu de richesse.
Quand on doit annoncer une bonne et une mauvaise nouvelle, on commence par la seconde, c’est connu.
Donc, la mauvaise nouvelle, c’est l’augmentation brutale de la misère, chez nous, où le nombre de personnes qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté se situe, désormais, autour de 8 millions.
La bonne nouvelle, maintenant : selon les calculs d’une grande banque suisse, à peu près 9 % des millionnaires en dollars qui vivent dans le monde habiteraient la France, ce qui est un bon chiffre. Certes, les pauvres sont plus nombreux, mais peut-être pas autant qu’on ne le pensait. Et du coup, les perspectives de rapprochement paraissent beaucoup moins chimériques.
On connaît les vertus des pauvres : simplicité, frugalité, tempérance. Au point que, si la sagesse allait de pair avec le dénuement, les indigents sauteraient de bonheur. Les riches, on le sait par les Évangiles, ont plus de mal à monter au ciel. Et pourtant, comme nous le démontre le succès du film monacal Des hommes et des dieux, les riches qui font vœu de pauvreté parviennent généralement mieux à leurs fins que les pauvres qui font vœu de richesse, ce qui prouve que la vertu existe aussi dans les beaux quartiers. Mais là réside sans doute le vrai problème, qui vient principalement d’un éloignement géographique : les riches semblent tenir à habiter les quartiers riches, tandis que les pauvres demeurent obstinément accrochés à leurs quartiers pauvres. Heureusement, il y a les week-ends.
Que n’organise-t-on des rencontres, des pique-niques, des sorties, des pince-fesses qui mettraient ces deux groupes en présence et les aideraient à vaincre une timidité bien naturelle ? Les réseaux sociaux comme Facebook pourraient y aider. Ainsi verra-t-on les barrières naguère infranchissables s’effondrer, ou du moins s’effriter. Il est 3 heures du matin. Dans la pénombre d’une boîte de nuit, Marcel Gaulard, délégué syndical SUD-Rail dans un service public bien connu, danse, soudé contre Isabelle du Rabot, directrice des ressources humaines dans une entreprise du CAC 40. Lui, soudain : « Excusez mon trouble… C’est la première fois que j’embrasse une suppôt du grand capital. » Elle : « Voyons, mon ami. Qu’est-ce qui nous sépare ? Quelques milliers d’euros par mois… » Lui : « … et deux siècles de luttes ! »
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