Chez les Clinton, on aime l’argent. Passionnément. Impardonnable pour notre chroniqueur américain, Doug Ireland, qui se fait un plaisir de farfouiller dans les arrangements financiers de Bill et Hillary.
La sénatrice Hillary Clinton a refusé de rendre publique sa déclaration de revenus. Or, non seulement le sénateur Barack Obama l’a fait, mais la coutume veut de surcroît que, depuis le scandale du Watergate en 1974, les candidats à la présidentielle se plient à cette règle tacite. De son côté, Bill Clinton a refusé de divulguer auprès du grand public les noms des donateurs de sa Bibliothèque Présidentielle construite dans l’Etat de l’Arkansas pour la bagatelle de 165 millions de dollars.
Autant de dénis de transparence qui amènent à se poser les questions suivantes : comment Hillary et Bill ont-ils fait pour amasser une fortune leur permettant de prêter cinq millions de dollars pour la bonne marche de la campagne d’Hillary en janvier dernier ? Pourquoi les époux Clinton jouent-ils les cachottiers ? En 2003, Hillary a été obligée de se plier aux règles du Sénat et donc de rendre public le fait que le couple possédait une fortune comprise entre 352 000 dollars et 3,8 millions de dollars. En 2005, leur tas d’or avait visiblement grossi, puisque dame Clinton déclarait posséder avec son mari entre 10 et 50 millions de dollars. Elle ne s’est pas expliquée sur le pourquoi du comment de la croissance exponentielle de l’épargne du couple.
La presse s’est, elle, chargée de fournir quelques réponses à toutes ces questions. En novembre dernier, la chaîne de télé ABC News révélait qu’en dépit de son refus de communiquer les noms des donateurs, le William J. Clinton Presidential Library (la bibliothèque de l’ex-président) a vendu la liste secrète de ses soutiens financiers à InfoUSA, une société qui commercialise des bases de données. Et, selon le New York Times, cette même entreprise a vendu certains de ses produits à des escrocs qui les ont ensuite utilisés pour arnaquer des personnes âgées. En effet, InfoUSA commercialise une liste de 4,7 millions de vieilles personnes baptisée « Suffering Seniors » (séniors souffrants). Au menu : des noms d’individus atteints d’un cancer ou de la maladie d’Alzheimer.
Ce n’est pas là le seul lien entre cette société aux moeurs étonnantes et les époux Clinton. Selon le New York Times du 26 mai 2007, le patron d’InfoUSA, un certain Vinod Gupta, a utilisé en 2002 l’avion privé de son entreprise pour offrir des vacances au couple présidentiel à Acapulco, une station balnéaire de luxe mexicaine. Coût du cadeau : 145 000 dollars. Mais ce n’est là que la partie visible de l’iceberg. Toujours selon le New York Times, InfoUSA a rémunéré Bill Clinton à hauteur de deux millions de dollars pour de vagues services de « conseiller » et Gupta a dépensé plus de 900 000 dollars pour transporter Hillary pendant sa campagne électorale à travers tous les Etats-Unis.
Sans oublier Bill qui sillonne la planète au nom de sa Fondation et aux frais du même Gupta. En 2005, ce dernier a également signé un contrat pour payer à Bill 1,2 million de dollars supplémentaires et l’a gratifié de 100 000 stock options d’InfoUSA sans date d’échéance. Gupta a enfin fait don d’un million de dollars à la bibliothèque de l’ex-président.
Comme l’a écrit le magazine Newsweek, Bill Clinton « considère que sa bibliothèque est cruciale pour la construction de son héritage historique. » Cette oeuvre revêt l’allure d’un imposant bâtiment de verre et d’acier planté sur un terrain de 75 hectares avec vue sur la rivière Arkansas. La bibliothèque héberge en outre le William J. Clinton School of Public Service de l’Université de l’Arkansas et la fondation qui gère l’établissement finance les activités publiques de l’ancien chef d’Etat.
Selon le Washington Post du 15 décembre 2007, la bibliothèque de Clinton a reçu plus de 10 millions de dollars de la part de la famille royale d’Arabie Saoudite et plus d’un million de dollars des gouvernements respectifs de Taiwan, du Koweït, du Qatar, des Emirats et de Bruneï. Au moins trois hommes d’affaires saoudiens (Abdullah al-Dabbagh, Nasser al-Rashid, et Walid Juffali) y ont également contribué à hauteur d’au moins un million de dollars. Tout comme l’ex-député et vice premier ministre libanais, Issam Fares.
Dans les dernières heures de sa présidence, Bill Clinton a gracié un nombre de criminels parmi lesquels figurait Marc Rich, un trader multimilliardaire accusé d’une fraude fiscale de 48 millions de dollars qui a fui le pays avant son procès et trouvé refuge en Suisse puis en Israël. La femme de Marc Rich, Denise, a contribué à hauteur de 450 000 de dollars à la bibliothèque de Clinton peu avant la grâce présidentielle de son mari. Et elle a, depuis, donné plus de 70 000 dollars aux campagnes électorales d’Hillary. Une commission du Congrès a même convoqué Denise Rich afin de l’entendre sur l’éventuel « achat » de la grâce de son époux. Mais, comme on dit en américain, Madame Rich « took the Fifth », c’est-à-dire qu’elle s’est retranchée derrière le 5è amendement de la Constitution qui stipule qu’un citoyen n’a pas à s’auto-incriminer…
Sous le titre « Les grâces ressortent dans la campagne de Hillary Clinton », le Boston Globe du 28 février révèle qu’un des deux frères d’Hillary, Tony Rodham, est actuellement traîné en justice par les héritiers d’un couple de forains fortunés condamnés pour fraude bancaire et gracié par Bill à quelques heures de la fin de son mandat présidentiel. Les héritiers veulent en effet récupérer 107 000 de dollars que le couple avait donné à Tony Rodham.
Circonstance aggravante, avant d’être gracié, le couple en question avait déjà payé 250 000 dollars au frère d’Hillary. Tony est le deuxième frérot d’Hillary à avoir perçu une importante somme d’argent d’une personne graciée par Bill Clinton. En effet, en 2001, un scandale a éclaboussé Hugh Rodham, un autre frère de l’ex première dame qui avait, lui, touché 400 000 de dollars de la part de deux autres criminels ayant bénéficié d’une grâce présidentielle.
Hillary et Bill ont toujours entretenu des amitiés sujettes à caution. Pas moins de cinq des principaux collecteurs de fonds pour les campagnes de la sénatrice Clinton ont déja plaidé coupables dans des procès criminels. Et puis surtout, il y a eu le cas de Norman Hsu, l’un des plus importants « fundraisers » (leveurs de fonds) de Hillary.
Depuis 2003, Hsu a donné et collecté plus de 850 000 de dollars pour sa sénatrice préférée mais, en août dernier, la presse a révélé que l’homme était en réalité un escroc en cavale depuis quinze ans s’étant fait la belle avant même qu’un juge ait eu le temps de prononcer sa peine. Hsu a finalement été appréhendé par le FBI, jeté derrière les barreaux et en plus inculpé dans une autre affaire : une tentative de fraude de 60 millions de dollars. Toujours est-il que Hillary n’a pas hésité à demander à son fidèle Hsu d’exercer ses talents de collecteur de fonds pour le compte des gouverneurs de l’Iowa, du Michigan et du New Hampshire qui en retour ont soutenu politiquement Hillary dans sa course à l’investiture présidentielle.
On pensait qu’Hillary Clinton ne pouvait pas se montrer plus ignoble que ce qu’elle avait été avec les appels multiples de sa campagne aux préjugés racistes. Erreur. Le 6 mars 2008, Hillary donnait une conférence de presse sur le thème de la sécurité du pays où elle était entourée d’anciens généraux et amiraux, et où elle déclarait que le candidat du Parti Républicain, John McCain, avait bien la stature pour être « président des Etats-Unis » à l’inverse de son rival Barack Obama . Dixit La Clinton : « C’est un impératif catégorique pour chacun des présidentiables de démontrer qu’il peut atteindre le seuil de qualités nécessaire pour être le commandant en chef. Moi, je crois que je l’ai fait. Le sénateur McCain l’a certainement fait. Mais il faut aller demander au sénateur Obama ».
Et Hillary d’ajouter : « Le sénateur McCain apporte toute une vie d’expérience à la campagne présidentielle, moi j’apporte aussi une vie d’expérience, mais le sénateur Obama n’apporte qu’un discours qu’il a fait en 2002 ». Une référence à l’allocution du sénateur métis dans laquelle il déclarait son opposition a l’invasion de l’Irak. Dans la cinquième année de la guerre en Irak, le sénateur McCain, 72 ans, en reste un défenseur ardent, et il a promis non seulement que l’occupation militaire de l’Irak pourrait durer « pour 100 ans » mais qu’il y aura « d’autres guerres » a l’avenir. Et Clinton le préfère a Obama ? Les commentateurs étaient tous abasourdis par cette nouvelle saillie de Madame Clinton.
Comme le disait si bien a la télé Margaret Carlson, l’analyste politique de Bloomberg News, « C’est très mauvais pour les Démocrates, car elle ne pourrait pas aller plus loin pour dire, ’Il faut que ce soit moi la présidente, sinon je préfère un Républicain ». Il y a tant d’adjectifs qualificatifs qui ont déjà collé à la peau de Hillary Clinton : « froide », « opportuniste », « hypocrite », « manipulatrice », « menteuse »… Mais avec la déclaration solennelle de sa préférence pour le candidat des Républicains contre celui de l’homme qui passionne les foules démocrates et remplit les stades pour ses meetings, Hillary vient d’ajouter au thésaurus de ses défauts le pire épithète qu’il y a dans la politique : « Traître ».
D.I.
Il faut dire qu’en retour Hillary a toujours su remercier les généreux donateurs qui mettaient la main au portefeuille pour financer ses campagnes électorales. Selon le Los Angeles Times, depuis qu’elle est au Sénat, elle a pesé de tout son poids pour faire passer des lois octroyant des aides financières de l’Etat à 59 entreprises. La facture pour le contribuable américain ? 500 millions de dollars ! Toujours selon le quotidien californien, 64% de ces sociétés ont par la suite donné des sommes importantes pour les campagnes d’Hillary, que ce soit par l’intermédiaire de leurs conseils d’administration, de leurs cadres ou de leurs lobbyistes.
Quant à Bill Clinton, il s’est beaucoup enrichi depuis la fin de sa présidence en donnant des discours pour lesquels il touche des sommes mirobolantes. Par exemple, pour une seule journée de conférence au Canada, Bill a gagné 475 000 dollars pour deux discours. Soit plus que le double de son salaire présidentiel !
Quand il disserte devant les collaborateurs de grandes entreprises ses honoraires tournent autour des 150 000 dollars. Selon une enquête du Washington Post publiée le 23 février 2007 sur les discours rémunérés de Bill Clinton, « beaucoup de ses discours payés plus de 100 000 dollars ont été donnés à des sociétés qui figurent parmi les plus importants donateurs aux campagnes électorales de sa femme ».
C’est le cas des deux géants de Wall Street : Goldman Sachs, qui a payé Bill Clinton 650 000 dollars pour quatre discours et qui a donné plus de 200 000 dollars aux campagnes de Hillary depuis l’an 2000 ; et Citigroup, qui a rémunéré Bill plus de 200 000 de dollars pour un seul discours en France. Citigroup, impliqué comme Goldman dans de nombreux scandales financiers a, toujours selon le Washington Post, donné plus de 320 000 dollars à Hillary.
Ce sont toutefois les sociétés étrangères qui se montrent les plus généreuses avec l’ex-président. Parmi elles, on peut citer les banquiers saoudiens Dabbagh (600 000 dollars pour deux discours), le JingJi Real Estate Development Group, un géant chinois de l’immobilier (200 000 dollars pour un seul discours), Gold Services International, une societé colombienne (800 000 dollars pour quelques discours en l’Amerique Latine), ou Power Within, une societé canadienne fondée par Salim Khoja, un immigré kenyan coupable quelques années auparavant de fraude boursière puis interdit de bourse à vie (650 000 dollars à Bill pour des discours au Canada).
La cupidité de Bill et Hillary Clinton est grande et tout ceci n’est qu’un aperçu de leur amour immodéré pour l’argent. Dans bien des cas, ils se sont montrés fort peu soucieux de l’origine des fonds dont ils bénéficiaient. Et le Parti Républicain ainsi qu’une certaine presse conservatrice ne manqueront pas d’utiliser ces déboires si en août prochain Hillary venait à emporter l’investiture présidentielle du Parti Démocrate, le soi-disant « parti du peuple ».
Heureusement, cette possibilité est des plus minces : avec ses larges victoires dans le caucus du Wyoming le 8 mars et lors de la primaire du Mississippi le 11 mars, Barack Obama a gagné plus de délégués qu’Hillary lors de ses victoire dans l’Ohio et au Texas la semaine dernière. Aujourd’hui, le sénateur métis reste largement en tête tant en nombre de délégués qu’en nombre de votes populaires.
Doug Ireland
Merci à Bakchich de transmettre à son collègue américain Doug Ireland mon exaspération devant son utilisation systématique de l’adjectif "métis" en référence au sénateur Obama (encore 2 fois dans cet article).
Ou alors, qu’il fasse systématiquement référence à H.Clinton comme "caucasienne".
C’est d’un pénible à lire, encore plus quand c’est répété dans un même article. Une fois, ça peut être une info pour les gens qui n’ont encore jamais entendu parler du sénateur Obama, mais systématiquement comme le fait Doug Ireland, c’est autre chose.
A7, étant moi-même métis (ou mulâtre pour être plus précis), je suis constamment surpris que les médias français se contentent d’imiter leurs homologues US. Barack Obama n’est pas noir !! Il n’est pas blanc non plus… Désolé si cela choque les gens qui n’arrivent à assimiler le fait qu’un être humain soit biracial.
Sylvain