Pas vraiment gâté par le contexte de sa nomination, le préfet Bernard Bonnet a fait un peu trop d’étincelles en Corse, notamment avec l’affaire de la paillotte Chez Francis… Sauf que les mystères de la justice et de l’administration n’ont pas éclairci son cas. Et tout le monde l’oublie…
Nommé en Corse à la suite du meurtre de Claude Erignac, Bernard Bonnet est ce préfet réputé à poigne qui fut chargé de rétablir un semblant d’ordre républicain dans l’île de beauté. Une mission pour laquelle l’Etat lui avait donné sinon carte blanche, au moins de gros moyens, mais qui devait se solder par une humiliante nouvelle défaite de l’Etat avec l’inénarrable et picaresque feuilleton de la paillote « Chez Francis ».
Construit dans l’illégalité la plus totale en bord de mer, au sud du golfe d’Ajaccio, ce restaurant est détruit en avril 1999 par un incendie criminel perpétré pas une unité d’élite de la gendarmerie, laquelle pas fute- fute, réussit l’exploit de se faire pincer…
Le scandale –considérable – remonte jusqu’au super préfet Bonnet, accusé d’avoir sinon explicitement ordonné l’opération, de l’avoir couverte. Il est condamné le 15 janvier 2003 par la Cour d’appel de Bastia pour « complicité de destruction de biens appartenant à autrui » arrêt devenu définitif le 13 octobre 2004 par un arrêt de la Cour de cassation. Condamnation qui ne fait pas bon genre pour un Préfet dont les jours sont donc comptés au sein de l’administration…
C’est pourquoi si tôt connues les réquisitions de l’avocat général à la Cour de cassation (lesquelles ne laissent planer aucun doute sur le sort qui l’attend) le Cabinet de Dominique de Villepin conseille à Bonnet de demander d’urgence sa mise à la retraite anticipée. Faute de quoi, une fois l’arrêt rendu, le préfet risquait de se retrouver sur la paille ; sans retraite notamment…
Ce à quoi se résignait Bernard Bonnet qui était admis à faire valoir ses droits à la retraite par un décret du 5 octobre 2004 « avec effet pécuniaire différé au 11 février 2008 ». Une sage, une prudente décision semblait-il alors. Sauf que… Dans le même temps, une autre procédure suit son chemin. Celle engagée par « l’ami Francis » déterminé à obtenir de l’Etat des dommages et intérêts pour la destruction de sa gargotte. Mais ce que conteste avec vigueur le ministère de l’Intérieur en faisant valoir que le restaurateur installé illégalement sur le domaine public, « Francis » n’est titulaire d’aucun droit réel immobilier, ni d’un droit d’exploitation lui permettant de justifier d’un quelconque préjudice !
En Février 2005 la cour d’Appel administrative de Marseille donne raison à l’Etat en relevant notamment le caractère erroné de la qualification de « destruction de biens appartenant à autrui ». C’est pourtant sur cette base juridique que Bonnet avait été condamné à Bastia alors que pour les mêmes faits, l’Etat était lui déclaré parfaitement innocent. Par ailleurs il n’échappait pas au préfet déchu que les gendarmes ayant participé à l’opération avaient –eux – retrouvé après leur condamnation, rapidement une affectation au sein de la gendarmerie.
Bref, notre Préfet déchu, non sans arguments, trouve que c’est « pas juste ». Il s’en est d’ailleurs ouvert à Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur dans un courrier en date du 27 août 2007 dans lequel il écrit « je ne peux me résoudre à quitter l’administration active en raison d’une infraction dont la justice a fini par admettre qu’elle n’était pas constituée (…) » Puis poursuivant « (…) je vais définitivement recouvrer le 13 octobre prochain le plein exercice de mes droits civiques (…) C’est pourquoi, n’étant pas contraint par une mesure de mise à la retraite d’office et ne souhaitant nullement quitter prématurément l’administration active, j’ai l’honneur de solliciter le rétablissement –à la date du 13 octobre 2007 – de ma position statutaire de préfet hors-cadre (…) Au-delà de ma détermination à voir rétablis mes droits statutaires, je suis aussi porté dans ma requête par la volonté de continuer à servir l’Etat dans les conditions qui lui plaira de définir » .
Pour l’heure, il semble plaire à l’Etat, de faire la sourde oreille.
Et retrouver les exploits d’autres anciens préfets, auxquels Bakchich rend hommage en ce dimanche de Pentecôte
Pour ma part, en tant que corse (et qui plus est, indépendantiste), je considère que ce qui fut véritablement scandaleux et profondément choquant dans cette histoire, ce n’est pas tant que le préfet ordonnasse de détruire illégalement une paillotte illégale… ça, c’était plutôt pour le côté « comique » de l’affaire, si j’ose dire, et je suis convaincu que s’il n’y avait eu que ça, l’indignation aurait été quasi-inexistante. Non, ce qui était d’une gravité extrême, dans cette affaire, et à ce titre, je suis convaincu qu’il fût sous-sanctionné pour ces faits, c’est la pseudo-revendication que les gendarmes avaient prévus de laisser sur place (à savoir « Ferraud, balance des flics », à destination du propriétaire de la paillotte, Yves Ferraud). Une telle revendication, qui sous-entendait que Ferraud était un délateur avait de quoi échauffer bien des esprits quant à la question de la véracité de l’argument, et certains auraient pu même s’en convaincre… peut être même jusqu’au point d’envisager l’élimination physique d’Yves Ferraud (ce qui est nettement plus grave qu’un simple incendie sur une paillotte). En outre, il s’avéra, après divers interrogatoires et saisies de documents appartenant au préfet déchu, que ce triste sire de Bonnet avait également prévu d’organiser des mitraillages de maisons appartenant à des nationalistes, qu’il aurait ensuite fait passer pour des actes émanant d’autres nationalistes. Etant donné le contexte d’alors, où le mouvement nationaliste se remettait à peine de la tragique « guerre fratricide » des années 1993-1996, probablement orchestrée en sous-main par un certain Pasqua, et au cours de laquelle une vingtaine de militants ont été assassiné, pour rien, il paraît évident que l’objectif de Bonnet était de relancer cette guerre, de relancer les meurtres fratricides entre nationalistes… L’ancien préfet a été jugé pour la destruction illégale d’un bien illégal (ce qui en soit, n’est pas bien grave), je n’ai pas entendu dire qu’il fût jugé pour sa tentative avortée d’appel à la haine et à la violence… Le mouvement nationaliste dans son ensemble, l’avait cependant percé à jour, puisque quelques mois après la disgrâce du préfet, devaient se tenir les Accords de Migliacciaru, accords de la réconciliation générale entre tous les mouvements nationalistes.
Pour plus d’information sur la Corse, il y a aussi mon blog.
Assez comique de donner des leçons de corsité quand on s’appelle Fulbock…
Mais je pense que vous êtes le Pinzutti de service des séparatistes.
Ca fait quoi de poser au résistant dans un Etat libre qui vous laisse faire vos encagoulades un peu trop librement, ou utiliser les fonds de "l’Etat colonial" pour subventionner votre activité politique massivement rejetée par les insulaires ?
Des fois, je regrette qu’on soit pas au Chili de la belle époque mais faut croire qu’on a les "martyrs" qu’on mérite.
Heureusement que ceux-ci sont assez évolués pour s’entre-massacrer en sanglants règlements de compte.
A l’occasion, faites-moi signe, si je peux donner un coup de main…
Dernièrement, lors de mes précédents messages, je vous avais clairement exprimé mon désaccord par rapport à vos points de vue… Il m’a parût juste de vous répondre, cette fois-ci, que je suis d’accord avec vous quant à l’action du préfet Bonnet concernant l’enquête sur l’assassinat de son prédécesseur. Il est vrai que ce ne fut pas le tonitruant Roger Marion qui permit de faire avancer les choses, préférant s’entêter à arrêter le plus de gens possible, espérant tomber un jour ou l’autre sur le ou les coupables… Mais il est vrai également que la FIDH a également pointé du doigt ce que je dénonce depuis le début des évènements ; à savoir que le procès d’Yvan Colonna manqua singulièrement de partialité, entendant par là que sa culpabilité fut établie comme un postulat, et qu’il lui fut demandé de démontrer son innocence, alors que la Loi sur la Présomption d’Innocence stipule précisément le contraire…
Quant à la fameuse « piste agricole », quoique ce ne soit pas le propos, je me fais un plaisir tout particulier de rappeler que Mathieu Finidori, agriculteur de son état et militant nationaliste connu, demeura à tort plusieurs mois en prison, parce que des explosifs avaient été retrouvés dans l’une de ses exploitations ; explosifs dont il sera reconnu par la suite, dans un ouvrage que l’on peut considérer comme sans lien avec le mouvement national, que les explosifs avaient été préalablement cachés dans la propriété, afin de faire tomber Mathieu Finidori. Etranges pratiques, non ? Cela pourrait prêter au rire si le but non avoué n’avait pas été de trouver à tout prix un coupable, et si possible un coupable bien médiatique, même s’il est innocent, quitte à truquer les preuves.
Ce que je trouve personnellement très comique, pour reprendre vos propres termes, c’est que vous puissiez penser que je m’appelle réellement Louis Fulbolk… je ne sais si vous êtes sérieux ou bien pince-sans-rire, mais je préfère préciser qu’il s’agit là d’un pseudonyme, tout comme j’ai du mal à croire que vous vous appeliez réellement Czar… Mon prénom n’est même pas Louis…
« Mais je pense que vous êtes le Pinzutti de service des séparatistes. » me dites-vous… Vous ne pouviez pas être plus loin de la vérité. Car d’une part, je suis parfaitement corse, depuis toujours, serais-je tenté de dire si l’expression ne paraissait pas à ce point stéréotypé (et quand bien même ne serais-je pas corse de naissance, ce qui n’est pas le cas, je me fais un plaisir bien particulier de vous rappeler le principe de la Communauté de Destin, stipulé par le mouvement national dans les années 1980, qui stipule qu’est corse toute personne vivant en Corse depuis au moins dix ans, qui se sens corse au plus profond de son être, et qui adhère aux principes définis par la Lutte de Libération Nationale). De plus, je ne suis au service de personne, m’estimant parfaitement capable de penser par moi-même, et non pas de suivre aveuglément la pensée de l’un ou l’autre des différents chefs du mouvement national, avec lesquels je peux parfois être en désaccord.