A partir d’un fait trop méconnu, le placement d’enfants réunionnais dans des familles en Creuse pour repeupler le département, l’écrivain Eugène Durif raconte la vie de deux orphelins, entre les souffrances de l’enfance et les failles du présent.
Curieusement, on l’oublie. Mais dans les années soixante, à l’initiative de Michel Debré, député de l’île de la Réunion, des centaines d’enfants réunionnais sont déportés et « placés » dans des familles en Creuse, pour repeupler le département…
A partir de ce « fait divers » historique, Eugène Durif construit un road movie limousin à la recherche d’une enfance brisée. Léonard est un ancien « populart ». Naguère en France, le quolibet « populart » désignait les « enfants de la population française », autrement dit des orphelins. Adulte, Léonard est devenu gardien de prison. Jusqu’à ce jour où il ne peut plus continuer. Gagné par la compassion, dépressif, il démissionne et part à la recherche de Sammy, jeune réunionnais placé dans la même famille d’accueil cinquante ans plus tôt, Sammy avec qui il partageait tout : une paillasse dans une grange où les confidences et leurs rêves d’enfants chuchotés dans le noir rendent la nuit moins froide, des journées à travailler dur dans les champs pour une famille d’accueil qui n’a rien d’accueillant. Après le passage de l’assistante sociale tout de même un peu inquiète, les deux garçons doivent aller à l’école et rencontrent là une jeune femme, une camarade de classe qui les prend sous sa protection. Jusqu’à la fuite dans la forêt, le désir de vivre là, tous les trois ensemble… Et la fin du rêve… Entre l’enfance et les failles du présent, Léonard et Sammy enfin retrouvés vont tenter de comprendre et de donner un peu de sens à ce qu’ils ont pu vivre. Eugène Durif signe un livre tendre qui vous prend aux tripes, où la résilience prend la figure d’une jeune fille du nom de Célimène, où elle passe aussi par la découverte presque accidentelle de la lecture ou d’une cabane dans la forêt qui devient le pays où l’on n’arrive jamais.