Charles Manson n’en finit pas de fasciner. A tel point que le neuvième art s’est saisi de l’affaire en publiant une BD en deux tomes du serial killer des années LSD.
1967. Une orgie dans une maison bourgeoise américaine avec Charles Manson en chef d’orchestre des ébats de chair. Le décor est planté dès les premières pages de ce second volet BD ("l’ombre de Californie") consacré au meurtrier des années yéyés. Vous savez, celui qui a commandité en Août 1969 le meurtre de la femme de Roman Polanski, Sharon Tate, alors enceinte. Ou qui demandait à ses fidèles sous LSD d’aller trucider quelques blancs de bonne famille à Los Angeles pour ensuite accuser les noirs du crime. Tout ça pour quoi ? Réaliser sa modeste prophétie du ralliement de tous à sa sainte parole, lui qui se définissait comme la résurrection du Christ.
Du pain béni, en somme, pour Paoli Bisi, dessinateur du tome 2 édité chez Glénat, manifestement adepte des tueries parfumées à l’éther hallucinogène des années 70. Car là réside bien le pari de l’artiste : jeter un regard neuf sur le parcours d’un serial killer dont on sait aujourd’hui à peu prêt tout et d’une époque qui nous siffle toujours aux oreilles, 40 ans après Mai 68. Le coup de pinceau comme seconde peau au bourreau de ces dames ?
Du point de vue graphique, les couleurs sont brillantes et lumineuses, le trait sûr et les contours soignés. En revanche, le barbare à barbe ressemble plus à un Chuck Norris relooké qu’à un dangereux psychopathe obsédé et possédé. L’aspect cartoon-télé autour d’une bande de dégénérés empêche de saisir ce qui a façonné le mythe Manson. Celui d’un homme qui était le visage déformé, torturé, monstrueux d’une Amérique en proie à de violents conflits intestinaux : Libération des mœurs et guerre du Vietnam, pacifisme et émancipation des noirs, consumérisme et messianisme national contre le danger bolchévique. Quant au scénario, on bute à suivre le récit entrecroisé du procès de Charles Manson en 1971 avec ses divers meurtres plus clownesques que morbides. De quoi faire frémir un instant les amateurs de Nicky Larson. Pas ceux d’Akira.
En guise de réconciliation, remettons-nous en à l’appel de l’une des pulpeuses demoiselles du forcené : « Hé les garçons ! On a besoin de vous à l’intérieur ! Pour une orgie ! ». Voilà qui devrait tous nous satisfaire. Pour cela, pas besoin d’aller au-delà de la page 3.
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