Des règles de conduite encadrent enfin l’activité des lobbies dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. Las ! Ils ont déjà changé de pratiques.
Février 2009. Depuis un mois, une quarantaine de députés (sur 577) débattent de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » à l’Assemblée nationale. Jusqu’aux amendements concernant la vente d’alcool. « Trente députés ont surgi pour défendre leur vin. Le ton est monté avec ceux qui s’occupent des questions de santé et un socialiste a dit à une autre “Tu en veux une ?” » se souvient, estomaquée, Marisol Touraine, député d’Indre-et-Loire qui digère mal que l’on défende des positions corporatistes sur des sujets d’intérêt général.
Dans sa ligne de mire : les lobbies. Les exemples attestant de leur influence au Parlement fourmillent.
Ainsi, le 5 octobre, l’assistant parlementaire Samuel Le Goff se demandait malicieusement sur son blog « Comment reconnaître un amendement venant d’un lobby » ? Fastoche : quand des députés de bords opposés déposent le même texte d’amendement à la virgule près. Et Le Goff de pointer la loi sur les jeux en ligne, truffée d’amendements de lobbies : « Sur l’article 50, un amendement identique a été déposé à la fois par Charles de Courson (Nouveau Centre) et par des députés du groupe communiste. » Comprenez, l’amendement a été écrit ailleurs.
Pour cet autre assistant parlementaire, « on a besoin des lobbyistes car un député n’a pas la capacité de rédiger un amendement technique ». A ceci près que même le bureau de l’Assemblée nationale, qui régit le bon fonctionnement de l’institution, a jugé utile d’encadrer les activités des lobbyistes.
Des pratiques (légales) que les journalistes Vincent Nouzille et Hélène Constanty dénoncent dans leur livre Députés sous influences : recrutement d’assistants parlementaires en poste, députés qui embauchent des lobbyistes comme collaborateurs… « Lorsque j’ai travaillé sur la définition de règles encadrant les lobbies au sein du Bureau, j’en ai découvert de belles » se souvient la députée PS de Paris, Danièle Hoffman-Rispal. « Une parlementaire a dit que des représentants d’un lobby ont suscité des articles hostiles dans la presse locale. »
Après trois ans de maturation, les premières règles censées encadrer les représentants d’intérêts ont finalement été adoptées par le bureau de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2009 et sont entrées en application le 1er octobre. « Institutionnalisation du lobbying ! » crient leurs détracteurs. Elles n’ont en tout cas pas marqué tous les députés. François Bayrou est tombé des nues à la mi-octobre lorsque l’association Anticor l’a informé de leur existence.
Pour les parlementaires, de toutes les façons, cela ne se joue plus dans les couloirs de la maison. Place au lobbying viral ! Ainsi, Lionel Tardy, le député UMP de Haute-Savoie, hostile à la loi Hadopi, a reçu jusqu’à 200 mails par jour des lobbies anti-Hadopi.
A lobby friqué, mœurs plus classes. En ces temps de grippe A, les laboratoires pharmaceutiques sont soupçonnés d’avoir exercé des pressions sur le gouvernement pour lui refourguer 94 millions de doses de vaccins. Pour Florence Vesin-Etterlen, directrice des affaires gouvernementales et parlementaires de Sanofi Aventis France, le travail consiste d’abord à « présenter l’industrie pharmaceutique sous toutes ses facettes ». Et donc rappeler qu’elle génère 30 000 emplois en France.
Sous-entendu : si un médicament n’est plus remboursé par la Sécurité sociale, des usines peuvent fermer et les chômeurs augmenter dans les circonscriptions. Pour faire passer ses messages, Sanofi Aventis a, entre autres, créé un groupe d’étude rassemblant dix députés qui se réunissent avec des acteurs de la Santé dans les locaux… de l’Assemblée nationale.
A l’instar d’autres lobbies, l’industrie pharmaceutique a bien d’autres cordes à son arc pour caresser le député dans le sens du poil. Colloques aux Etats-Unis pour l’association Agipharm, universités d’été dans le village provençal de Lourmarin pour le patronat pharmaceutique…
Détestée par les laboratoires pharmaceutiques pour son militantisme anti-lobbies, Catherine Lemorton, députée PS de Haute-Garonne, aime raconter l’une des rares fois où elle a accepté de participer à un de leur raout. « En septembre 2008, on m’a proposé d’animer une table ronde sur les génériques qui a été annulée deux fois de suite ».
La Commission européenne mijotait une enquête accablante sur les pratiques des laboratoires pour torpiller les médicaments génériques. Et quelles pratiques ! Dépôt de brevets en pagaille (jusqu’à une centaine pour un produit), pressions en tous genres sur les autorités gérant les mises sur le marché, avalanche d’actions en justice pour décourager les petits fabricants de génériques… Sur la période 2000-2007, le coût total des litiges sur les brevets au sein de l’UE pour les 68 médicaments ayant donné lieu à action en justice atteint 420 millions d’euros. C. G.
Le nouveau règlement de l’Assemblée entré en vigueur le 1er octobre l’exige, mais la liste des lobbyistes qui y traînent leurs guêtres à longueur de journée n’a toujours pas été rendue publique.
Elle devrait l’être dans les tous prochains jours. A force de gratter, on sait néanmoins qu’une centaine de demandes ont été déposées au Bureau de l’Assemblée nationale et qu’environ 80 d’entre elles ont été validées à hauteur d’un seul badge par entreprise ou groupe d’intérêt (fédérations professionnelles…).
Hors de question d’avoir des pédégés en roue libre dans les couloirs de l’Assemblée, seuls les chargés d’affaires parlementaires sont tolérés. Une seule entreprise — multinationale américaine de l’agroalimentaire — n’a, à ce jour, pas obtenu le précieux sésame. Mais la surprise vient surtout du fait qu’aucune ONG de renom n’a déposé de demande de badge. Pas même les écolos de Greenpeace ou de France Nature Environnement pourtant rompu au lobbying.
Lire ou relire sur Bakchich.info :
Tous ces affairistes n’ont qu’un seul et unique but :
La dérégulation totale et générale des règles qui les contraint.
Les raisons sont évidentes, faire plus de fric sur notre dos.
Les budgets qui leurs sont alloués sont des gouttes d’eau dans l’océan du profit possible, et la ’régulation’ des affairistes n’est en fait qu’une vaste fumisterie destinée à ne laisser entrer que ceux qui auront ’craché au bassinet’ exactement comme le faisaient les nobles pour s’assurer du sermon dominical, sauf que, aujourd’hui, le sermon est télévisuel…
Je veux HURLER !
Je suis contre les lobbies à 100%.
Comment peut-on parler de démocratie [française ou américaine] quand les plus puissants exploiteurs de l’humanité font pression pour obtenir encore davantage aux dépends des plus faibles, sans vote, sans transparence et sans rendre compte ?!
La démocratie de nos jours est une escroquerie et les politiciens qui se targuent d’en être, machouillant ce mot à pleine bouche sont des escrocs !
Ceux qui votent, sont des acteurs à l’encontre de leurs intérêts immédiats et contre ceux de leurs enfants, des imbéciles !
Elle est bien bonne celle-là ! Remettons les choses en place : il n’y a pas de lobbys anti-hadopi. Il n’y a que des citoyens qui sont contre cette loi qui ne favorise que des industriels. Quand un citoyen vote, il a un droit de regard sur ce que fait son député. Les industries cuturelles n’ont jamais voté. Elles ont pourtant plus de droit et de pouvoir que les citoyens qui se trouvent ainsi cocufiés en permanence par ce système malsain. Combien faut-il de citoyen pour contrebalancer l’action d’un lobby ? Je me rapelle la pétition anti-DADVSI de 100000 signatures qui a fini dans le caniveau de Matignon et d’un certain « amendement vivendi » qui a été débattu à l’assemblée.
Les lobbys n’ont rien à faire au parlement. On voudrait nous faire croire l’inverse. Ils n’ont jamais été prévus dans la constitution qui ne reconnait que le vote des citoyens.
Les citoyens ont perdu le pouvoir à l’assemblée censée les représenter au profit des diverses industries.
De grâce, cessez de parler de "lobbys" pour qualifer les citoyens. C’est insultant.