Deux détenus ont été victimes de violences de la part du personnel pénitentiaire consécutivement à une prise d’otages dont ils étaient les auteurs. La juge confrontée à la loi du silence a rendu un non-lieu.
« Jetés au sol dans la cellule du mitard », « bouclier sur le coup et 2 boucliers sur les chevilles », « vêtements déchirés », « frappé à l’œil droit », « mis à quatre pattes », « dernier coup de matraque sur le crâne »…Voilà ce qu’André Allaix détenu longue peine à la maison centrale de Moulins prétend avoir reçu comme traitement de faveur de la part du personnel pénitentiaire le 24 novembre 2003. 6 ans d’instruction, plusieurs mise en examens et finalement un non-lieu rendu le 10 février dernier.
Tout commence en cette triste journée d’automne du 24 novembre 2003 quand André Allaix et Cyrille Bastard tous deux détenus à la Centrale de Moulins décident de prendre en otage plusieurs détenus et un groupe de surveillants. Une bien mauvaise idée qui après 10 heures de tensions leur vaut une reconduite musclée au mitard et in fine 4 années de prison supplémentaires.
Assez vite des rumeurs de violences postérieures à la prise d’otages, commises sur les deux détenus lors de leur conduite au mitard se propagent dans la prison. Ce qui est sûr c’est que les deux détenus souffrent au choix pour l’un de contusion de la boîte cranienne pour l’autre d’hématomes, de contusion diverses et d’une entorse du pouce. De leurs cellules, ils clament avoir été victimes de violences. Et le 27 novembre, le procureur de la République de Moulins saisit le SRPJ de Clermont-Ferrand pour ouvrir une enquête.
Un an plus tard, l’enquête se termine. Pour le directeur de la prison, « les interventions relevaient des techniques d’immobilisation enseignées et nécessaires à l’événement. » Et d’ailleurs, l’analyse de la vidéo surveillance n’a fait ressortir aucune violence. Pourtant les Eris ont confirmé que des coups avaient été portés par des surveillants. Entre temps, la Commission nationale de déontologie et de sécurité (CNDS) "relève des manquements graves à la déontologie de la part des personnels de l’administration pénitentiaire ».
Plusieurs membres des ERIS confirment les violences et précisent un peu les faits, assurant même avoir tenté de protéger les détenus tout en essuyant, eux-aussi, des coups. Mais à ces déclarations, s’ajoute une constante. Tous ou presque ont vu des coups partir. Mais aucun d’eux ne sait d’où il venait. La loi du silence a eu le temps de s’installer. Tous cagoulés au moment de « l’intervention », les gros bras ont la mémoire qui flanche et la vue qui se trouble lors de l’audition. Oui il y a eu des violences, mais l’on ne peut identifier les auteurs.
Deux surveillants sont mis en examen. L’un d’eux reconnaît avoir « bousculé au niveau de l’épaule le détenu Cyrille Bastard ». On est bien loin des accusations de violences volontaires. Et l’enquête n’a pas permis de délier les langues ni de faire apparaître des preuves matérielles. Une ordonnance de non-lieu est rendue. Mais c’était sans compter sur la pugnacité d’une avocate. Me Boesel, défenseur de André Allaix qui s’en va ce mardi demander devant le tribunal de Riom un retour du dossier à l’instruction pour des actes complémentaires. Et tenter de briser la loi du silence.
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Contrairement à ce que mentionne un commentaire, on n’en est pas au stade de savoir si les détenus disent vrai ou non. Les faits ont parfaitement été établis et sont rappelés dans l’ordonnance de non-lieu.
Que ce soit pour la vidéosurveillance qui a filmé :
le passage à tabac par des gardiens cagoulés de Moulins (le port de la cagoule étant illégal puisque réservé aux ERIS) dans les couloirs menant au quartier discîplinaire
l’entrée de nombreux gardiens dans les 2 cellules (un ERIS a témoigné du fait qu’il étouffait…)
la projection des vêtements dans le couloir
Ou par les témoignages :
des gardiens, qui ont dit que les détenus avaient été fouillés au sol, sans que leur soit donnée avant la possibilité de se déshabiller eux-mêmes
des ERIS, qui ont reçu des coups de leurs "collègues" en escortant ces détenus, et qui ont confirmé avoir découpé les vêtements au cutter (parce que les autres gardiens tiraient dessus au point d’étouffer les détenus)
du négociateur du GIGN, qui est arrivé après la fouille et a vu des détenus blessés et nus au sol
du médecin qui n’a été appellé que le lendemain après-midi, et a constaté que les détenus étaient en partie dévêtus, et ne disposaient de rien en cellule, y compris le papier toilette.
Le juge n’a pas ordonné de non-lieu parce qu’il n’y avait pas eu d’infraction :
il y a eu violence illégitime (il ne s’agissait pas de gestes de maîtrise, chaque détenu étant menotté et encadré par des ERIS)
ainsi q’un traitement dégradant (pas de demande d’ôter eux-mêmes leurs vêtements avant d’employer la force, nombre injustifié de gardiens assistant passivement à la fouille)
S’il y a non lieu, c’est parce que le juge a considéré qu’aucune charge suffisante ne pouvaient être retenue contre quiconque, l’identification des coupables étant rendue impossible par le fait que les personnels étaient intervenus cagoulés…
A l’époque le livre du Docteur Vasseur avait fais déplacer les députés dans les prisons, les détenus ont droit à un avocat, mais la prison reste un état de non droit.
Battre un prisonnier ou un mis en examen est interdit, ses violations du droit par ceux qui doivent faire respecter la loi sont intolérables.
Cet article est particulier d’un point de vue journalistique.
Il semble donner les positions des deux parties ce qui est la moindre des choses.
Là où le bas blaisse, c’est quand les témoignages des membres du personnel sont malicieusement dévalorisés (Tous cagoulés au moment de « l’intervention », les gros bras ont la mémoire qui flanche et la vue qui se trouble lors de l’audition.).
A l’opposé, les accusations des détenus sont prises pour argent comptant puisque l’auteur parle sans détour de "loi du silence" sous-entendant clairement que les faits dénoncés ont bien eu lieu mais que l’omerta empeche d’en apporter la preuve.
Ca s’appelle un article orienté. Ca vaut ce que ça vaut.
Sur le fond, j’ai du mal à croire que vous allez émouvoir dans les chaumières en présentant comme des victimes deux taulards preneurs d’otages qui se sont retrouvé avec une bosse sur la tête et un pouce retourné …