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Une virée pétillante chez Coca-Cola

Embedded / vendredi 11 juin 2010 par Anaëlle Verzaux
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Une bien belle visite organisée pour les journalistes à l’usine Coca-Cola de Clamart avec Fillon, Amara, Devedjian. Reportage.

Garées sur le trottoir de l’Hôtel Matignon, trois larges voitures pleines de journalistes s’apprêtent à démarrer. On attend les derniers. Il est à peine 9 heures, "c’est trop tôt pour commencer à travailler !", soupire une passagère, le Nagra calé entre les jambes.

C’est sous escorte policière que la trentaine de journalistes fait le voyage, d’une demi-heure, jusqu’à Clamart (Hauts-de-Seine). Dans la voiture, deux jeunes gens tout juste sortis de l’école de journalisme, se rappellent du bon vieux temps. A coup de “qu’est devenue une telle, et que fait untel ?” Et de grands questionnements : “Mais comment diable fait-on pour passer de journaliste à magnétiseur ?".

Le sujet du jour, lui, n’intéresse visiblement pas beaucoup. Pourtant, ces prestigieux journalistes que l’on promène comme des enfants naïfs, s’apprêtent à rencontrer le Premier Ministre, le grand François Fillon – dont la cote de popularité ne dépasse pas les 42%. Lequel, épaulé par Patrick Devedjian et Fadela Amara, madame Politique de la Ville, vient visiter l’usine Coca-Cola de Clamart. Un modèle d’intégration, un management et une usine exemplaires, paraît-il.

Entrés dans l’usine, les journalistes échangent, au vestiaire, leurs vestes contre une blouse de protection. Ceci fait, la kyrielle de blouses blanches se précipite sur le buffet. Place au petit-déjeuner. C’est chic, les attachés de presse du ministère ont tout prévu, jusqu’au jus multivitaminé.

Les uns parlent appareil photo, les autres racontent leur parcours, leurs études, les CDD accumulés, les salaires qui flanchent, la crise de la presse écrite. Dans un coin, un caméraman pianote sur son iPhone, en attendant de pouvoir s’offrir l’iPad.

Ce petit monde s’ennuie. Place à la visite !

Les bouteilles de Coca défilent sur des chaînes métalliques, suivant une mécanique ininterrompue. Impressionnantes, ces gigantesques salles. Bruyantes. On croise deux femmes en tablier. Mais où sont passés les ouvriers ? Ils attendent debout, plus loin, au fond d’une salle où s’élabore le mélange d’eau et de sucre du soda. Les journalistes ne viennent pas leur parler. Et de toutes façons, voilà Fillon.

Un bide

Face au Premier Ministre, le patron de Coca-Cola Clamart revendique, le menton relevé, une certaine fierté : "nos origines sont américaines, mais nous sommes Français". Et de lancer : "95% de ce que nous produisons est vendu en France".

Coca-Cola Entreprise, c’est aussi le leader français des boissons sans alcool. 2700 employés en France dont 243 à Clamart pour seulement 4 CDD, plus 40 millions d’euros d’investissements. C’est une affaire qui marche !

Après la salle des machines, la petite troupe s’en va trotter jusqu’à la table ronde. Pendant la marche bousculée, Fadela Amara, une main de Fatma en pendentif, prend le bras d’une jolie black, Mariam, en contrat pro chez Coca-Cola depuis 9 mois.

Amara lui parle du mérite de Coca-Cola, qui "s’est engagé à embaucher des jeunes des quartiers". Comme si elle devait convaincre son interlocutrice, elle ajoute que tout ceci a été rendu possible grâce à son plan Espoir Banlieue. La demoiselle écoute. Sans s’émouvoir.

Quelques minutes plus tard, Mariam est la première “jeune” employée de l’usine à être interrogée par le DRH (directeur des ressources humaines).

Tel un oncle s’adressant à sa nièce, le DRH demande : “Alors Mariam, dis-nous. Tu es contente de ton travail ici ?

"Oui, j’ai appris des choses, c’est enrichissant. Mais je ne vais pas rester."

Un ange passe.

On attendait de sa part des démonstrations de joie. C’est un bide.

Car Mariam, son boulot, c’est de rester toute la journée encadrée de machines, à "vérifier la conformité de la bouteille une fois qu’elle a été remplie". Elle fait les trois-huit, avec "des horaires pas faciles à tenir". Elle habite dans le Val-d’Oise, et lui faut deux heures pour venir à Clamart, plus deux heures pour repartir. Et ne compte pas déménager. "Ma famille et mes amis habitent près de chez moi". Alors Mariam, l’intégration à Coca-Cola, autant dire qu’elle n’y tient pas.

D’autres jeunes prennent tour à tour la parole, toujours après la question monotone du DRH. Deux très jeunes femmes sont inscrites à l’internat d’excellence de Sourdun, une ville perdue de Seine-et-Marne (voir encadré en fin d’article).

L’occasion pour François Fillon de se lancer dans la promotion du lieu, un établissement qui s’inscrit dans la Dynamique Espoir Banlieue – chère à Fadela Amara –, et avec lequel Coca-Cola a noué un partenariat : "Au moins, quand vous êtes à l’internat, vous ne jetez pas votre cartable sur le canapé, pour allumer la télé", affirme-t-il. Réponse de l’intéressée : "Ça c’est sûr, on ne peut pas regarder la télé ! C’est interdit, sauf le mardi soir, après le travail et les activités".

"Beaucoup de stress"

Coca-Cola ne connaît quasiment pas le CDD, rémunère correctement ses salariés (la plupart touchent entre 1000 et 2000 euros net), intègre, par des contrats de professionnalisation, des contrats en alternance et les partenariats avec les internats d’excellence, les jeunes des quartiers. Serait-ce un modèle de perfection ?

Absolument pas, selon un responsable CFDT, absent de la visite ce jeudi matin, mais joint plus tard par Bakchich.

"Il y a beaucoup de stress ici. Depuis deux ans, les conditions de travail se dégradent. Il y a eu plusieurs suicides. Un employé de Clamart s’est donné la mort dans l’usine même, en 2007. En août, c’était au tour du patron de se tirer une balle dans la tête. Et, il y a trois semaines, un salarié de Coca-Cola Lyon s’est suicidé. Beaucoup sont en dépression nerveuse", affirme-t-il.

Il poursuit : "Certes, Coca-Cola fait beaucoup de choses pour les jeunes. Mais par ailleurs, les contrats précaires et les stages se multiplient. Il y a 27 intérimaires à Clamart, 213 intérimaires, 118 CDD et 221 stagiaires sur l’ensemble des usines Coca-Cola France".

Et de conclure : "Le nombre d’employés n’augmente pas. Le chiffre d’affaires lui, oui. Il est passé de 147 millions d’euros en 2007, à 184 millions d’euros en 2009".

Enjoy.

Dessin de Nardo - JPG - 39.8 ko
Dessin de Nardo

Clic : les Internats d’excellence

Prête à tout pour secourir les jeunes des quartiers, Fadela Amara s’est attelée à la mise en place d’un nouveau concept, les Internats d’excellence.

Objectif : accueillir, dans des collèges-lycées-internats des jeunes issus des zones d’éducation prioritaires (ZEP), qui n’auront pas la chance de faire leurs preuves dans l’enseignement supérieur. Grâce au grand emprunt et au concours du ministère de l’Education nationale, ce sont onze internats d’excellence qui devraient ouvrir leur portes à 20000 élèves, à la rentrée 2010. Un de ces internats spécialisés fonctionne déjà, à Sourdun. Sourdun ? Mais oui voyons, Sourdun, 1200 habitants, à un jet de pierres de Provins. Et à des kilomètres de l’académie, Créteil… Loin donc du centre, loin des cités. L’endroit magique est situé dans une ancienne garnison désaffectée. L’encadrement promet d’être exemplaire, surtout si l’armée a pu recaser quelques vieux serviteurs fidèles.

Le prochain internat d’excellence à ouvrir ses portes, en septembre prochain, sera situé à Barcelonnette. Ah, Barcelonnette ! Ses 2900 habitants, son cadre de vie pré-alpin. Et les parfums de la garrigue provençale ! Là encore, l’établissement est situé sur le site d’une ancienne caserne de chasseurs alpins. Les jeunes viendront des ZEP de Marseille, à 200 kilomètres de là. Et encore, à condition que la route de montagne qui va de la côte d’Azur à Barcelonnette ne soit pas fermée pour intempéries.

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La célèbre multinationale américaine a tenté d’interdire la diffusion d’un film documentaire dénonçant ses pratiques sociales en Colombie, voire son implication dans le meurtre de plusieurs syndicalistes.

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2 MESSAGES

Forum

  • Une virée pétillante chez Coca-Cola
    le lundi 14 juin 2010 à 15:39, JMLB a dit :
    Mon dieu, dans quel monde du travail vivons-nous ? Merci pour ce reportage.
    • Une virée pétillante chez Coca-Cola
      le mardi 30 novembre 2010 à 11:11, seb a dit :
      Travaillant à l’usine de Clamart, je trouve que vous donnez une vision aussi mauvaise que n’importe quel journaliste qui décrit le travail a clamart comme un monde rose bonbon. En effet, c’est comme partout, ce n’est pas tout rose mais ce n’est pas tout noir non plus, étant passé par plusieurs usines avant celle-là, je peux tout de même vous affirmer que les conditions sont excellentes.
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