On ne pouvait pas imaginer une estocade plus violente, une prise de position aussi cinglante et fatale que ces quatre mots qu’arboreront nos sportifs lors des jeux olympiques pékinois : « Pour un monde meilleur », slogan massue censé réaffirmer l’attachement de la France aux droits de l’homme et faire la nique au gouvernement chinois lequel a dû blêmir à l’annonce de cet haïku pacifiste dévoilé jeudi dernier par le premier de nos sportifs, Monsieur David Douillet. Court, efficace, facilement mémorisable et déjà présent dans la charte olympique.
Non, les athlètes français ne baisseront pas les bras, mieux, ils iront crânement planter les graines de la démocratie en terre chinoise, flanqué d’un pin’s subversif s’inscrivant dans la grande tradition de l’engagement à la française. Pour un monde meilleur : ce n’est pas pour rien qu’on a fait la Révolution, décidément, la radicalité coule toujours dans nos veines. Un brainstorming furieux de la commission des athlètes, la conjugaison de moult compétences et la volonté farouche de ne pas sortir des clous (risque de disqualification a précisé l’ex-judoka) ont donc abouti à cette prise de position couillue, même si dans les couloirs du comité olympique français, on murmure qu’un autre slogan (« Contre un monde pas bien ! » ), finalement jugé trop violent, fut abandonné.
L’idéal olympique s’est donc dressé, encore une fois, droit dans ses bottes, imaginant une résistance nouvelle et au carré. Face à tous ceux qui bafouent le Bien, les ambassadeurs de la paix, les émissaires du Bien et autres sentinelles de la planète que sont les lanceurs de javelot et de nains, les sauteurs de haie et de moutons, opposeront une fin de non recevoir participative. Une sorte de « J’y vais mais quand même ! » insolant. L’immense intérêt de ce manifeste, c’est qu’il peut se décliner à l’infini et dans toutes les langues : « Que le Bien l’emporte ! », « Un bouquet de fleur pour tous ! », « Pas touche au Bien ! », « La pluie ne passera pas par moi ! », l’excellent « We want des bisous » (lu quelque part sur Dailymotion) ou encore « Génération super ! ».
Rien à dire, en France, on a pas la langue dans notre poche. Quand il faut y aller, on sait trouver les mots qui feront mouche, faire preuve d’opiniâtreté. Dès jeudi, Monsieur Diagana a montré l’exemple et n’a pas hésité à trottiner, torche en main, avec le badge de la résistance, certes au centre d’une bulle militaire impressionnante mais à quelques centaines de mètres d’une foule hostile. C’est la preuve de la force subversive du slogan : des centaines de policiers et de militaires, des hordes de cerbères chinois (survêts et oreillettes) à rollers, en vélo et en planches à voiles, furent mobilisés afin de protéger Monsieur Courage et éviter que la flamme olympique ne reçoivent des bombes à eaux. Ben Laden et le Pape n’auraient pas fait mieux.
J’imagine que les résistants de tous bords méditent en ce moment le coup de génie de Douillet et de ses ouailles. Libérer Bétancourt ? Un lâcher de badges « pour un monde meilleur » sur la jungle colombienne. Vaincre le SIDA ? Un lâché de badges « pour un monde meilleur » sur la Gay Pride. Trouver un leader au PS ? Un lâché de badges « pour un monde meilleur » sur la rue de Solferino. Augmenter le pouvoir d’achat ? Un lâché de badges « pour un monde meilleur » dans les rayons « jambons » des grandes surfaces. Nous voici enfin revenu aux grandes heures de la contestation politique. Il était temps.
Je suis entièrement d’accord, ce badge est consternant d’hypocrisie….les dirigeants chinois doivent vraiment trembler à l’heure qu’il est face à cette initiative d’un courage inouï !!!
Par contre, par pitié, moins de fautes d’orthographe siouplé, ça aussi c’est insupportable !