Non seulement Barack Obama est assuré d’être le prochain candidat démocrate à la présidentielle, mais il a aussi des chances de l’emporter face au candidat républicain. Dans plusieurs Etats traditionnellement conservateurs, de jeunes pousses démocrates ont emporté les élections partielles, rompant les vieilles branches du Parti Républicain.
A ce stade des primaires démocrates, la mathématique électorale est implacable. Et parce que Barack Obama a maintenant la majorité absolue de délégués élus, elle dicte qu’il sera le candidat démocrate à l’élection présidentielle du mois de novembre. Même après sa cuisante défaite dans le Kentucky le 20 mai, mais surtout grâce à sa confortable victoire le même jour dans l’Oregon. La puissante chef de file des Démocrates à la Chambre des Représentants et speaker de cette même instance, Nancy Pelosi, ne s’y est d’ailleurs pas trompée. Elle a estimé que l’investiture reviendra de droit au candidat qui aura la majorité des délégués choisis par les électeurs démocrates. Autant de délégués auxquels il faut ajouter les 24 super-délégués qui ont rallié le camp d’Obama après la défaite de celui-ci à la primaire de Virginie Occidentale le 13 mai.
Mathématiquement parlant, il ne manque donc au sénateur de l’Illinois que 61 délégués pour atteindre le chiffre magique des 2025 délégués nécessaires pour être investi lors de la convention du Parti Démocrate en août. Autant dire qu’avec les trois primaires qui restent, Hillary Clinton ne pourra plus rattraper son rival en nombre de délégués élus. Restent toutefois ces 204 super-délégués qui ne se sont pas encore prononcés pour Obama ou Clinton. Une centaine d’entre eux sont des membres du Congrès, et le reste des politiciens pur jus. Comme 115 d’entre eux viennent d’Etats qui ont voté Obama lors des primaires et des caucus, il est impensable qu’ils puissent aller à l’encontre de leurs électeurs dans leurs Etats respectifs. Là encore, la mathématique électorale est implacable.
Pourtant, Hillary persiste à prétendre dans ses discours de campagne qu’elle sera plus forte que son rival contre le Républicain John McCain en novembre. Du pipeau ! Tous les sondages montrent qu’Obama est bien plus fort parmi les électeurs indépendants qui ne sont inscrits dans aucun des deux grands partis qu’Hillary. Pourquoi donc ? Tout simplement parce que Clinton n’est pas crédible à leurs yeux. Pire, elle est perçue par ces indépendants (ainsi que par de nombreux démocrates) comme une menteuse récidivante, comme quelqu’un prêt à dire tout et son contraire pour caresser l’électeur dans le sens du poil. L’argument qu’Obama ne peut pas gagner en novembre sans les voix des blancs de la classe ouvrière est, lui aussi, bidon. Prenons le cas du Kentucky. Le 20 mai, les aficionados d’Hillary brandissaient un sondage de sortie des urnes voulant que 30 % de ceux qui ont voté lors de cette primaire choisiront McCain en novembre. Rien de nouveau à l’horizon puisque le Kentucky, comme plusieurs Etats de la région des montagnes Appalaches, est coutumier du fait et vote rarement démocrate lors d’une élection présidentielle. Par exemple, en 2004, 30 % des Démocrates ont voté pour George W. Bush et non pour John Kerry, le candidat démocrate de l’époque. Malgré cette donne quasi structurelle, deux études passées inaperçues dans la presse américaine, suggèrent qu’Obama n’a pas besoin de ces électeurs pour battre John McCain.
Roy Teixeira est un sociologue expert en élections pour le très respecté Institut Brookings, à Washington. Selon ses savants calculs, le candidat du Parti Démocrate n’a pas besoin de faire l’unanimité au sein de la classe ouvrière pour gagner en novembre. Il lui suffira de réduire la marge de victoire républicaine à 10 % parmi les « cols bleus » et non de 23 % qui correspond à l’avance enregistrée par George W. Bush en 2004. En parallèle, les primaires ont montré une participation sans précédent des électeurs noirs parce qu’Obama était dans la course. En Caroline du Sud, le nombre de votants blacks a plus que doublé par rapport à 2004. En Georgie, le vote black a explosé, passant de 289 000 votants en 2004 à 536 000 en 2008 ! Et c’est la même chose en Virginie, dans le Maryland et même en Louisiane où l’ouragan Katrina a obligé de nombreux Noirs à fuir l’Etat suite à la destruction de leurs maisons. Selon l’analyse de David Bositis, un expert estimé et spécialisé dans le vote noir au sein du think tank black le plus important, le Joint Center for Economic and Political Studies, les chiffres de 2008 sur la participation des noirs dans les primaires sont « stupéfiants ». Du jamais vu en quelque sorte. Si Obama a gagné plus de 90 % du vote noir contre Hillary (malgré les manœuvres raciales du camps Clinton), pour Bositis, les électeurs noirs voteront Obama et non McCain tant ils sont fidèles au Parti Démocrate. Les Républicains en ont d’ailleurs conscience et on les a vu jouer la carte raciale contre Obama en instrumentalisant ses anciennes relations avec le Pasteur Jeremiah Wright.
En effet, les Républicains ont déjà essayé de jouer sur le prétendu « effet Wright » à deux reprises. D’abord le 13 mai, lors d’une législative partielle dans l’Etat du Mississippi où ils se battaient pour un siège au Congrès qu’ils détenaient depuis des décennies. Ils ont dépensé presqu’un demi-million de dollars pour diffuser à la télévision un spot publicitaire qui liait le candidat démocrate local, un blanc du nom d’Erskine Childers, au Révérend Wright au travers d’Obama, en montrant des prêches enflammées du pasteur. Et au final, les Républicains ont obtenu exactement l’inverse de l’effet escompté. Non seulement le Démocrate a été élu confortablement avec huit points d’avance, mais le taux de participation des blacks a été multiplié par deux entre le premier et le second tour. Le lendemain, les mines défaites des membres républicains au Congrès en disaient long sur leurs pensées : que leur cuisant échec dans le Mississipi soit celui de leur parti en novembre ! Même Newt Gingrich, leader de la soi-disant « Révolution républicaine » de 1994 qui a mis fin à quarante années de majorité démocrate à la Chambre des Représentants, a prédit un « tsunami » démocrate qui emportera des dizaines de membres du Congrès et de sénateurs Républicains !
Cette victoire inattendue dans une circonscription du Mississippi est la troisième du genre ce printemps. Le 4 mai, un siège du Congrès pour la Louisiane détenu par les Républicains depuis 34 ans est facilement revenu à un jeune démocrate cajun novice et presque inconnu, Don Casayoux. Le même spot publicitaire mettant le Pasteur Wright en vedette et que les Républicains ont utilisé dans le Mississipi a également été déployé contre Casayoux. Sans succès. Deux mois plus tôt, le siège de l’ancien Speaker de la Chambre des Représentants, Dennis Hastert, qui a pris sa retraite après trois décennies au Congrès est, lui aussi, tombé entre les mains d’un démocrate débutant.
L’ancien gouverneur de l’Arkansas, Mike Huckabee, qui a gagné huit Etats dans la « Bible Belt » (la ceinture biblique incluant les Etats sudistes et le middle-ouest) avant d’être battu par John McCain lors des primaires républicaines, disait après le résultat dans le Mississippi que l’étiquette « républicaine » a fatalement été plombée par George W. Bush, la guerre en Irak qui n’en fini pas et la crise économique. Il a aussi déclaré qu’« avec un prix de l’essence de plus en plus élevé, quand il faut payer 75 dollars pour faire le plein de sa bagnole, un nain sur patins à roulettes pourrait battre le candidat républicain » en novembre. Le « tsunami » démocrate s’annonce d’une telle envergure que seul un scandale imprévu et particulièrement sale visant Obama, ou une balle tirée dans sa tête par un illuminé raciste, pourrait empêcher le sénateur de l’Illinois de devenir le prochain locataire de la Maison Blanche.
Quelques corrections à votre article :
1/ Obama a encore du chemin à faire chez les ouvriers qui etaient majoritairement favorables à Clinton
2/ Si les Noirs sont massivement derrière Obama, il n’en va pas de même pour le Latinos, hors ces derniers sont maintenant supérieur en nombre dans la population des Etats Unis
3/ Récemment l’électorat Juif a émis des réserves sur la personnalité et le passé d’Obama, il aura du mal a convaincre une majorité de cette communauté.
En résumé Clinton n’a bien sûr plus de chance d’être dans la course, mais dans son combat avec Mc Cain, il a encore bien des électeurs à convaincre pour éviter un vote "tout sauf Obama", car je crois peu à l’attrait intrinsèque de Mc Cain.
Je suis tout à fait d’accord avec l’analyse de cet article. J’y ajouterai quelques points en faveur d’Obama : 1) les tiraillements auquel doit faire face McCain au sein de son propre parti , où la frange droite n’arrive pas à l’aimer et dont une partie pourrait se reporter sur le candidat libertaire Bob Barr.
2) Le fait que Obama donne tous les signes de vouloir mener une campagne au centre , ce qui est le meilleur moyen de gagner les indépendants.
3) le contraste ahurissant de charisme entre Obama et McCain. En meeting, Obama écrase McCain, et en débats, dans ses bons jours, il n’aura aucune difficulté non plus.
En défaveur d’Obama : 1) le fait que McCain, lui aussi, a un énorme atrait pour les indépendants. 2) le vote sécurité qui reste très fort aux US, où bon nombre d’électeurs ont peur du monde. 3) la couleur d’Obama
Ceci posé, je pense qu’Obama a plus de chances que Kerry en 2004.