Les Libyens prennent le Rafale à l’essai

« Cette fois-ci, c’est fait ! L’institution militaire libyenne a tranché. Le colonel Rifi, le patron des forces aériennes est persuadé de la supériorité multifonctions du Rafale, adaptée aux différents besoins et usages des forces armées libyennes », glapit un haut fonctionnaire du ministère français de la Défense. Petite précision, l’ultime feu vert dépend encore du « guide », le colonel Mouammar Kadhafi.

Sauf contretemps majeur, le contrat doit donc être plié d’ici un an, un an et demi… et porte sur l’acquisition par Tripoli de douze à seize Rafale, l’avion de chasse que Dassault-Aviation a le plus grand mal à vendre, doux euphémisme, en raison des pressions américaines et de ses maladresses maison. En effet, s’il arrive à terme, ce contrat sera le premier réalisé à l’export pour cet avion de chasse présenté par les VRP de Dassault comme le meilleur de sa génération. Champagne !

Rafales de Libyens

© Masioni

Le général Norlain, ancien pilote de chasse lui-même, a du mal à cacher son intense satisfaction. La SOFEMA, la société qu’il préside, assure le cadrage de ce marché ô combien stratégique. Et le bidasse étoilé jubile d’autant plus qu’il a parfaitement réussi à mettre hors d’état de nuire les inévitables « chasseurs de commissions et rétro commissions », en l’occurrence les tristes sieurs Djouhri (cf. Djouhri ou la belle vie in Bakchich # 8 du 10/04/06) et Ziad Takkieddine (cf. Bakchich #5 du 20/10/06).

La même SOFEMA assure l’encadrement et la formation de sept pilotes libyens qui ont commencé à tâter les bêtes depuis un mois. Les coûts élevés de cette période d’apprentissage des pilotes libyens, qui va durer jusqu’à la livraison des premiers appareils, sont assumés par Tripoli qui travaille actuellement au montage financier de la totalité du marché.

Les apprentis pilotes de Rafale libyens sont installés, dans le plus grand secret, sur la base de Mont-de-Marsan, dans les Landes. La base aérienne 118 abrite le CEV (Centre d’essai en vol) de l’armée de l’air, mis à disposition de Dassault-Aviation pour les démonstrations opérationnelles du Rafale.

Chez Dassault aussi, on se frotte les mains à la veille du prochain Salon du Bourget qui aura lieu en juin prochain. À cette occasion l’avionneur français a décidé d’annoncer – plus ou moins officiellement – la bonne nouvelle aux concurrents et autres clients potentiels. Une petite difficulté toutefois, l’option libyenne ferme définitivement les portes au marché saoudien, indépendamment du fait qu’il reste la chasse gardée des marchands de canons américains.

Et les Dassault boys sont d’autant plus remontés qu’ils peuvent, désormais expliquer à leurs partenaires commerciaux que l’avion « a été dépucelé sur un vrai théâtre opérationnel » souligne poétiquement un pilote d’essai de la maison. Avant de quitter l’Élysée, Jacques Chirac a fait un grand, un très grand cadeau à la famille Dassault en donnant le feu vert à l’engagement de l’avion en Afghanistan. Trois machines sont basées aux côtés des Mirage 2000 à Douchanbe au Tadjikistan, douze autres Rafale de l’aéronavale française, embarqués sur le porte-avions Charles De Gaulle, sont également opérationnels. Et pas seulement pour des missions de protection et de reconnaissance.

En prévision du Salon du Bourget que l’insubmersible MAM et ses conseillers du ministère de la Défense ont pris la lourde responsabilité de médiatiser cet engagement afghan, sans susciter beaucoup d’émotion chez les députés d’opposition.