Mais non, les politiques ne sont pas tous des personnages tristes et rigides. La preuve : le ministre libyen des Affaires étrangères, Abdelrahmane Chalgham qui, loin des lourds dossiers de Tripoli, écrit des poèmes… d’amour. Mieux que la fameuse prose de Dominique de Villepin ? Faut voir…
Le ministre libyen des Affaires étrangères est un surprenant monsieur. Abdelrahmane Chalgham vient d’adresser à la presse française – Bakchich peut en témoigner – un petit livre, ni vert, ni rouge : ses poèmes. Un petit ouvrage de 56 pages où pas une seule fois (ô l’insolent) le nom du Guide, le colonel Kadhafi, est cité. La lettre de présentation accompagnant le recueil est, par contre, plus dans le ton, un peu martial. L’en-tête invoque à la fois la « Grande Jamahirya arabe libyenne populaire socialiste » et son émanation, le « comité populaire des liaisons extérieures et de la coopération internationale ». Ouf, ça va mieux quand c’est dit.
Loin des rêves d’un continent africain réunifié grâce à Kadhafi, Monsieur le ministre, qui se présente comme « intellectuel » avant d’être « diplomate » dans son petit CV de quatrième de couverture, joue aux bardes énamourés. Amour, amour, amour, quand tu nous tiens : les poèmes de Chalgham ne sont que femme bien-aimée, baisers et soupirs, regards et nuits qui frémissent… On est bien loin des dossiers chauds de ces derniers mois à Tripoli : la libération des infirmières, les négociations d’achat d’avions Rafale français, il n’est point question. Seul compte :
« Un baiser »
« Les coupes errent sur nos lèvres
Et nous avons bu l’errance amour et démence
Nous nous sommes éparpillés vers le mystère des artères
Et nous sommes devenus un baiser à la vie séculaire
Tous les soupirs de l’amour sont passion
Et toutes les larmes de la vénération sont joie sourde. »
Mais Abdelrahmane Chalgham prend soin de préciser qu’il ne faut pas lire cette prose brûlante au premier degré. Dans son avant-propos Chalgham « évoque le charnel pour mieux l’évacuer ». Ben voyons ! Il précise : « La bien aimée implorée n’est-elle pas en vérité le Bien-Aimé, Dieu ? ». Ah bon, pourquoi pas…
Tradition de la poésie arabo-islamique, soufis sahariens… voilà à ses yeux la filiation littéraire directe du chef libyen de la diplomatie. Pardon, du poète de Tripoli.