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Le scandale français de la pollution au mercure

Environnement / jeudi 5 février 2009 par Benjamin König
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France-Nature-Environnement tient conférence de presse ce jeudi pour lancer sa campagne nationale. Et dévoile, à titre d’exemple, un dossier explosif sur la pollution au mercure. Bakchich l’a potassé pour vous…

Tout commence en aout dernier. En compagnie d’un chercheur allemand, Reinhold Moeseler, Marc Sénant, chargé de mission à FNE, se balade près de l’usine de chlore du groupe Arkema de Jarrie (Isère). Avec l’appareil de mesure en temps réel du mercure mis au point par son collègue (et reconnu par l’EPA, le ministère de l’écologie américain), il est loin de se douter de ce qui l’attend. Voilà déjà plusieurs mois qu’il bosse sur ce dossier. A proximité de la rivière qui longe l’usine, sur le domaine public, l’aiguille s’affole : pendant 10 secondes, le taux de mercure dans l’air atteint 10000 fois la présence naturelle (entre 13000 et 30000 ng/m3 pour les lecteurs chimistes) ! D’autres relevés, effectués autour du site, montrent que le mercure est présent partout, en proportions importantes. Et jamais à moins de 300 nanogrammes/m3, soit la norme acceptée par l’EPA (il n’existe aucune norme officielle en France). Dans une école, à un kilomètre du site, les niveaux sont encore très élevés. Repérés, quatre dirigeants de l’usine les interceptent. Et leur demandent leur identité. Refus. Reinhold Moeseler et Marc Sénant s’en vont : ils ont leurs relevés : « On préfère parler d’instantanés, on n’a pas prétention à dire que ces normes sont des évaluations scientifiques. On ne mesure pas la quantité totale des rejets », précise t-on à FNE.

Abasourdis, ils décident de revenir le 17 septembre. Cette fois, ils n’ont même pas le temps de sortir le compteur. Ils sont six cette fois-ci pour les alpaguer. Les intimidations sont de sortie : « On s’est renseigné sur vous. On sait qui vous êtes, et ce que vous faites là. » Et demandent à nouveau les cartes d’identité. Nouveau refus. Alors les six dirigeants appellent les gendarmes. Qui s’empresseront de vérifier les papiers des deux empêcheurs de mercuriser en rond, qui battent en retraite : pas de relevés cette fois-ci. Peu importe : ils ont largement de quoi informer.

Le mercure, thermomètre d’une industrie obsolète

Car la problématique du mercure est emblématique : il est possible de ne pas polluer, mais par manque de volonté des entreprises, on continue d’exploiter un procédé industriel vieux comme Hérode. Eh oui ! Le pire, c’est que ce procédé, mis au point en 1888 et qui fut à l’origine du célèbre gaz moutarde, est aujourd’hui obsolète : depuis les années 1970, deux autres techniques existent, qui nécessitent 30% d’énergie en moins, et surtout – on touche là à l’ubuesque – qui n’utilisent pas de mercure ! La question est bête à bouffer du foin : pourquoi ne change t-on pas ? La réponse l’est tout autant : le pognon.

Car le chlore n’est plus rentable, et Arkema, la filiale chimie de Total, rechigne à investir. FNE ne veut stigmatiser qui que ce soit, préfère élargir le débat et « mettre l’accent sur l’environnement comme moteur du redressement économique ». D’ailleurs, six usines en France utilisent encore ce procédé au mercure. Selon FNE, « Il existe des problèmes sur tous ces sites, notamment de pollution diffuse. Car il faut bien comprendre que ces sites ont un passif au mercure qui date de leur implantation ! ». A Jarrie, c’était en 1916. Nul ne sait combien de tonnes de mercure ont été dispersées dans les environs. Un chemin d’accès au lotissement voisin a carrément été construit sur un ancien site de stockage, et ce sans aucune information des riverains. Il avait même été question d’en faire un parc pour enfants, mais une étude avait déconseillé que des enfants y restent plus de deux heures par jour. Ça donne confiance…

Or, la France a signé en 1998 la convention Ospar (pour Oslo-Paris), et s’est engagée à abandonner cette technique au mercure en 2010. Alors les lobbys sont entrés en jeu : le Syndicat des Halogènes et Dérivés (SHD, surnommé le syndicat des javeliers et des chloriers), a obtenu une dérogation : Ô joie, les chloriers pourront utiliser du mercure – et le rejeter – jusqu’en 2020. Alors que le monde entier, scientifique comme politique, est aujourd’hui conscient de la dangerosité du mercure. L’ONU s’y penchera du 16 au 20 février prochain, à Nairobi, pendant le conseil d’administration du Programme des Nations-Unies pour l’Environnement (PNUE). L’UE a prévu l’interdiction des exportations en 2011, tout comme Barack Obama, qui s’est penché sur le problème de cette substance extrêmement toxique dès 2006. Et FNE tient à préciser que le ministère de l’Écologie, alerté, a réagi immédiatement. Un étude contradictoire est prévue : chacun fera ses relevés : FNE, la Drire (Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, qui dépend du ministère), et Arkema. A FNE, on est satisfait : « Nous sommes seulement des donneurs d’alerte. » C’est réussi…

Lire ou relire dans Bakchich :

Avant de discuter environnement ce mardi, le Parlement a adopté un projet de loi qui assouplit, au nom de la relance, la réglementation des entreprises polluantes.


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14 MESSAGES
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Forum

  • Le scandale français de la pollution au mercure
    le vendredi 4 septembre 2009 à 19:09
    Les effets du mercure sur la santé sont de mieux en mieux connus. Notamment l’effet des faibles doses, connu sous le nom de micro-hydrargyrisme. Le mercure est présent partout, et surtout dans la bouche de la plupart d’entre nous. Deux livres bien documentés, avec plusieurs centaines de références scientifiques chacun, sont parus ces dernières années : "Les effets du mercure sur notre santé", de Bernard Windham. "Vérités sur les maladies émergentes", de Françoise Cambayrac.
  • Le scandale français de la pollution au mercure
    le samedi 28 février 2009 à 08:23, paisiblenuit a dit :
    il devrait également faire le tour des cabinet dentaire de France et leur trafique de prothèses via la Chine avec l’appareil de mesure vous serez pas déçue du résultât !!!
  • Le scandale français de la pollution au mercure
    le vendredi 27 février 2009 à 08:48, sloi09 a dit :
    Encore Total …….
  • Le scandale français de la pollution au mercure
    le jeudi 12 février 2009 à 11:34, Estelle Vereeck a dit :

    La question est bête à bouffer du foin : pourquoi ne change t-on pas ? La réponse l’est tout autant : le pognon.

    Dans un domaine voisin, celui du mercure employé en dentisterie, le problème est le même et cette phrase peut s’appliquer à la lettre dans ce domaine aussi.

    Pour quoi continue-t-on d’employer un toxique majeur, poison pour le cerveau, pour obturer les dents de nos concitoyens (15 tonnes de mercure sont annuellement posées dans la bouche des français), réponse : l’argent !

    Le poison est bon marché, alors on pose des plombages !

  • Le scandale français de la pollution au mercure
    le vendredi 6 février 2009 à 12:36

    Habitant de Champ sur Drac, à moins de 500 M de l’usine de Jarrie, je peut vous assurer que la pollution due à l’usine ARKEMA, ex-ATOCHEM, ex -PCUK, ex-Ugine- Kulhmann, ex-Kulhmann, n’etonne personne .

    Construite en 1916 pour fabriquer des gaz de combat, les dirigeants successifs de l’usine se moque de la population environnante, utilisent d’anciennes carrières en guise de décharges. Dans les années 70, une action de la population, sans aucune aide de la municipalité de l’époque (la même q’aujourd’hui)à gêné et stoppé les décharges sauvages sur le territoire de la commune de champ sur Drac.

    Les édiles communaux sont issus du personnel syndical de l’usine. A chaque législature le C.E. de l’usine paie tout ou partie d’un équipement sportif, associatif ou autre, à la gloire de l’équipe municipale en place depuis 1945.

    J’espère simplement que cette nouvelle affaire fera suffisamment de bruit et aidera à la fermeture d’une usine qui dans les belles années employait 3000 personnes et n’en emploie plus que 250/300.

    Malheureusement le sous-sol de nos communes et irrémédiablement pollué, a cause du manque de courage politique de nos élus, allié à la cupidité de certains industriels.

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