Depuis plus de cinq ans, l’État et ses services s’acharnent sur une structure visant à promouvoir une agriculture durable en Pays Basque. Un comportement pas très grenello-compatible…
Le nouvel épisode en appel de la saga Laborantza Ganbara s’est traduit par une nouvelle relaxe pour l’association de paysans basques. Les juges de la cour d’appel de Pau ont estimé qu’il n’y avait pas de confusion possible entre la chambre d’agriculture départementale et l’association EHLG (pour Euskal Herriko Laborantza Ganbara, littéralement la chambre d’agriculture du Pays Basque).
Et une gifle de plus pour le représentant de l’État Philippe Rey qui, depuis plus de cinq ans, s’acharne sur la structure. En portant plainte à deux reprises contre Laborantza Ganbara, le préfet considérait que l’appellation « chambre d’agriculture » (même en basque) revient uniquement à la Chambre d’agriculture départementale des Pyrénées Atlantiques, établissement public reconnu par l’administration préfectorale.
Mais une nouvelle fois, les juges ont reçu pleinement les arguments de la défense : l’avocate et ancienne ministre, Corinne Lepage, avait rappelé longuement dans sa plaidoirie le caractère « inconstitutionnel » de la poursuite judiciaire, dans laquelle, elle voyait une atteinte à la liberté d’association.
De son coté l’avocat bayonnais Jean-René Etchégaray avait notamment dénoncé « l’amalgame permanent qui caractérise cette affaire avec des revendications politiques annexes ». Enfin et surtout, la seule langue officielle de la République est le français. Les juges ont considéré que deux mots basques traduits en français n’ont pas de valeur juridique.
En février EHLG publiait un pavé de 700 pages qui retraçait la pression permanente, quasi hebdomadaire qu’elle subit depuis sa création. « Nous espérons vivement que cette nouvelle relaxe se traduira par l’arrêt des poursuites contre nous, explique Mattin Ihidope, coordinateur de la campagne de soutien, cette série de procès est un énorme gâchis en terme d’énergie et de moyens ».
En effet, en réponse à l’énoncé du verdict, le président de l’association Michel Berochoirigoien a rappelé que la seule finalité de Euskal Herriko Laborantza Ganbara était l’agriculture paysanne et durable, avec le souci de développer une alternative à un modèle agricole en « crise et à bout de souffle ». Petit clin d’œil à la chambre d’agriculture de Pau, qui entre les mains de la FDSEA, s’était porté partie civile lors du premier procès à Bayonne l’année dernière.
Aujourd’hui, encore débouté, le préfet Philippe Rey a cinq jours pour renvoyer l’affaire devant la cour de cassation. S’y risquera t-il ? C’est une hypothèse peu probable selon Textx Etxeberri d’EHLG : « Nous sortons renforcés de cette épreuve. On espère vraiment le caractère décisif de cette victoire. D’autant plus que le préfet vient tout juste d’essuyer deux revers au tribunal administratif, renforçant ainsi le caractère grotesque de sa démarche ».
En effet, en marge du procès à la cour d’appel de Pau, la commune basque de Saint Pée sur Nivelle et le conseil général des Pyrénées Atlantiques étaient sur le banc des accusés du tribunal administratif départemental pour avoir attribué une subvention à Laborantza Ganbara. Dans ces deux cas, l’État, décidément tenace, a été débouté et condamné à verser des indemnités aux parties mises en cause.
Ces deux affaires font surtout suite à des désaveux répétés des pratiques de Philippe Rey, très zélé dans l’application des idéaux bessoniens en matière de sans-papiers. Il a notamment été sanctionné le 19 mars 2009, par la cour d’appel de la Haute Garonne pour une pratique illégale visant à transférer au centre de rétention de Toulouse des sans-papiers interpellés dans les Pyrénées Atlantiques, dans le seul but de « faire du chiffre ».