Dans le manuscrit jamais publié de l’ex-femme de Le Pen, celle-ci raconte comment ils ont hérité des ciments Lambert. Jean-Marie Le Pen a accusé le fisc de lui avoir tout pris, mais un "trésor" gisait en Suisse.
Bakchich s’est procuré le manuscrit, jamais publié, écrit en 1988 par Pierrette Le Pen, l’ex-femme de Jean-Marie Le Pen. Après 25 ans de vie commune, Pierrette Le Pen dresse le portrait intime du leader du Front national.
Un chapitre est consacré à l’héritage Lambert, à l’origine de la fortune de Le Pen. L’occasion d’une âpre bataille avec la famille Lambert, mais aussi d’un pied-de-nez au fisc.
Extraits :
Il serait inconcevable d’écrire sur Jean-Marie Le Pen sans évoquer l’affaire Lambert. (…) Je l’affirme, et l’affirmerai jusqu’à la fin de mes jours, Jean- Marie n’a strictement rien fait pour hériter des Lambert, mère et fils. J’ajouterais qu’il s’est montré envers eux d’une telle désinvolture qu’à l’heure ultime l’héritage aurait très bien pu passer entre d’autres mains… (…)
[Après la mort d’Hubert Lambert, héritier sans enfants des Ciments Lambert, ami du couple Le Pen] Du jour au lendemain, des amis de la veille se retournèrent contre nous. Il y avait Jean Féraudy, il y avait les frères Sidos, dont il convient de dire qu’ils possédaient des testaments de la main d’Hubert Lambert, mais dépourvus de valeur légale, comme ce fut démontré au cours de nombreux procès, tous gagnés par Jean-Marie.
Évidemment, lorsqu’ils apprirent que Jean-Marie Le Pen héritait, ses coreligionnaires se persuadèrent qu’il s’agissait d’un "héritage politique". Chacun traduisait à sa manière et faisait des comptes intéressés. Ceux du Front National étaient dans le ravissement. Ils se voyaient déjà nantis, certains que le parti allait désormais rouler sur l’or.
Jean-Marie précisa dans les meilleurs délais que ce n’était pas un testament politique, mais un testament en faveur de sa famille. Ce fut un beau tollé. Sa cote de popularité tomba en flèche. Jean-Marie alla jusqu’à déclarer publiquement, ce qui écartait encore mieux le caractère hypothétique d’une donation en faveur du Front National : "Le choix des Lambert s’est arrêté définitivement sur nous grâce à la personnalité de Pierrette. Si les Lambert n’avaient pas reconnu en elle des qualités essentielles, si elle n’était pas ce qu’elle est, nous n’aurions peut-être pas hérité". (…)
Par la suite, avec sa malice habituelle, il "noya le poisson" en démontrant que le fisc lui avait tout pris, ou presque.
Il oublie délibérément le plus important.
L’autre "source d’eau claire", dont apparemment personne ne cherche à savoir si elle est "potable" ou pas.
Je veux parler de la Suisse.
Il faut être un rude casse-cou pour narguer le fisc comme le fait Jean-Marie, reprochant à l’administration de l’avoir dépouillé à outrance sur ce fameux héritage Lambert en France, alors que l’essentiel de cet héritage se trouve en Suisse.
Il y est pour la bonne raison que les Lambert, eux aussi souhaitaient échapper au fisc (ils ne sont pas les seuls) et éviter ainsi, par le jeu des « Fondations », d’être assujetti à l’impôt.
Jean-Marie en bénéficiera totalement, ou presque. Il y avait certes les Philippe Lambert, mais un arrangement fut conclu, très heureux pour les deux parties…
Habile comme toujours, Jean-Marie fit tant et si bien qu’il ne laissa apparaître, aux yeux des jaloux et du fisc crédule, que la partie immergée de l’iceberg Lambert.
Quand nous fûmes « envoyés en possession » à Saint-Cloud, nous devions découvrir des documents laissant apparaître qu’un trésor gisait en Suisse.
Encore fallait-il le récupérer.
Depuis une vingtaine d’années, Jean-Marie usait et abusait des services gracieux d’un brillant avocat, Maître André Guibert, qui réussit l’étonnante performance de gagner trente-trois procès dans l’année contre Philippe Lambert, qui se jugeait injustement dépouillé par le testament.
Maître Guibert l’accompagna, nanti du testament l’instituant légataire universel, pour faire valoir ses droits chez MM. Broccard, père et fils, gestionnaires d’une fiduciaire, Grand-Palace à Fribourg, lesquels leur révélèrent l’existence de la « Fondation Saint-Julien ».
Le principe des « fondations » est qu’il libère les héritiers de tous droits successoraux.
Pour ce faire, il est nécessaire d’avoir recours à un notaire.
Jean-Marie choisit le plus averti, le plus célèbre de Genève : Maître Zyclounov, qui le remit entre les mains de Pierre Jaccoud (…), homme affable et sympathique. De surcroît fort efficace, il sut régler toutes les péripéties sans encombre et à notre avantage. Le capital de la « Fondation Saint-Julien » était composé de titres et de valeurs, d’actions, qui furent vendues dans d’excellentes conditions par des spécialistes au niveau de quatre milliards de centimes (1977) [environ 20 millions d’euros, ndlr], et le dépôt fut effectué à l’Union des Banques Suisses (…)
12 octobre 1976, TF1 évoque le sulfureux héritage. Le Pen noie le poisson sur sa future utilisation du pognon des Lambert : « Mes amis ont voulu me laisser le libre arbitre de l’argent que je recevrai d’eux. En conséquent, en temps utile et selon ma conscience, je déciderai de ce que j’en ferai »
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