L’organisateur de la Coupe du monde de football est accusé de promouvoir avec ses sponsors une alimentation nuisible à la santé. Et la Fifa de botter en touche sur le choix de "style de vie approprié".
Les rangs de ceux qui dénoncent la cupidité triomphante de la FIFA viennent d’être rejoints par un opposant inattendu à savoir, le Fonds pour la Recherche Mondiale contre le Cancer (WCRF) basé à Londres.
L’organisation caritative qui se consacre à la prévention du cancer au niveau mondial dénonce en effet l’égoïsme des organisateurs de la grande kermesse du football planétaire auxquels elle reproche de conclure des partenariats avec des entreprises vendant des produits néfastes pour la santé : en cause, les colossaux contrats de sponsoring avec Coca-Cola, McDonald’s et autre Budweiser omniprésents sur les écrans géants des stades et aux alentours, sans parler des intermèdes publicitaires au cours des retransmissions télévisées.
C’est Teresa Nightingale, la directrice générale du Fonds qui s’y est collée : « ça ne fait aucun doute que dans le combat contre l’obésité infantile, le football pourrait apporter une contribution capitale puisqu’il s’agit d’une activité physique accessible à quasiment tout le monde » ; puis poursuivant sur le même thème elle a ajouté « Je suis certaine que de nombreux enfants sont influencés par le talent et l’adresse des Rooney et Messi. Bien sûr qu’ils tenteront de les imiter comme l’ont fait avant eux leurs parents et leurs grands parents avec Maradona et Pelé » ; pour finalement conclure : « c’est assez décevant que ce soit ce genre d’entreprises qui aient été retenues. Le site web de la FIFA évoque le sponsoring comme un moyen de promouvoir les marques à un niveau mondial. Malheureusement c’est par pur égoïsme qu’elle offre cette possibilité à des entreprises qui sont connues pour leurs produits qui nuisent à la santé. Nul doute que la FIFA apporterait une aide précieuse à la santé publique en annonçant son intention de cesser tout partenariat dans l’avenir avec des entreprises commercialisant de tels produits ».
La contre-attaque ne s’est évidemment pas fait attendre : en la personne de Ian Barber, directeur de la Communication de l’association des annonceurs partenaires de la FIFA qui a rappelé à la charmante Térésa que sans sponsoring, il n’existerait quasiment aucun événement d’une telle importance capable d’influencer positivement les jeunes.
Le tacle glissé est venu un peu plus tard lorsque, vaguement agacé, Barber a conclu sa déclaration : « Si nous sommes sérieux au sujet de l’amélioration de la santé des jeunes, nous devons trouver d’autres moyens de les inciter à choisir des styles de vie appropriés et surtout, perdre moins de temps à proférer de bonnes paroles, reposant souvent sur des preuves insuffisantes et destinées aux mauvaises cibles. »
C’est vrai que les conclusions du dernier rapport du WCRF à partir duquel sa directrice a lancé son missile contre Blatter, sont à la fois inquiétantes et surprenantes (« Food, Nutrition, Physical Activity and the Prevention of cancer : a global perspective ») : pour l’essentiel, il commente une estimation selon laquelle dans le monde, 22 millions d’enfants âgés de moins de 5 ans étaient déjà victimes de surcharges pondérales en 2007, une situation qui n’a fait qu’empirer depuis. 75% d’entre eux vivaient dans des pays à faible ou moyen revenu par habitant.
Sachant que la probabilité est élevée qu’ils soient obèses une fois devenus adultes, le rapport laisse donc supposer une prochaine explosion des cancers de l’œsophage, du pancréas, et des reins, fortement corrélés avec l’obésité selon les experts consultés.
Contrairement à une idée bien arrêtée, ce ne sont pas les jeunes Américains gavés au Big Mac qui remportent la Coupe du Monde de l’obésité en classe biberon. Et de loin. Avant l’âge de 5 ans, le tiercé gagnant de l’épreuve de surcharge pondérale, d’après le WCRF, est l’Ukraine avec 25% des gamins, suivis des jeunes Serbes (19%) et des Irakiens (15%). Plus surprenant encore, il y aurait davantage de gosses grassouillets en Ethiopie qu’en République Tchèque ! Les ricains n’occupent que la 9ème position avec 7%. C’est vrai qu’ils doivent largement se rattraper en grandissant, par une pratique insuffisante du soccer qu’ils dédaignent, et une fréquentation trop assidue de leurs McDo si chers au cœur de Blatter.