François Mitterrand revival ! Après son blog, voilà qu’un de ses fantômes sort un livre, à paraître le 14 mai aux éditions Ramsay. C’est du Tonton tout craché. « Bakchich » s’en est procuré les bonnes feuilles, dont voici quelques extraits, en avant première.
A tous ceux qui croient à la résurrection des morts, et à ceux qui n’y croient pas, à tous ceux qui croient à la réincarnation, et à ceux qui n’y croient pas, Bakchich se fait un plaisir d’annoncer le grand retour de François Mitterrand sur la scène publique. Ses fans, évidemment le savent, Tonton a repris corps en mars 2007. Il a bien choisi le moment le malin, en pleine campagne présidentielle. Habile, il a opté pour la discrétion et l’utilisation d’un support moderne pour s’exprimer, le blog.
Alors oui, le blog, c’est excellent, pour commencer (90 000 visiteurs uniques par mois en mai et juin 2007). Mais il y a un moment où il faut se faire voir encore davantage. Et le moment, c’est maintenant : Tonton sort un livre, François Mitterrand 2008, il revient, à paraître aux éditions Ramsay le 14 mai… à l’occasion du dixième anniversaire de la dissolution de l’Assemblée Nationale ?
L’ex-président de la République dit ce qu’il pense du Parti socialiste, de la politique du gouvernement, de Nicolas Sarkozy (alias « mon lointain successeur »), de quelques hommes et femmes au parcours plus ou moins ombrageux(euses), etc. Sur tous ces thèmes et sur d’autres, Tonton divulgue, avec ce style admirable, des informations inédites. Car l’auteur du livre est très bien informé sur la vie politique française.
24 novembre : Contentement
Ce titre du Parisien libéré relatif à mon lointain successeur : « Il est content de lui ». Ah bon ? Incroyable. Depuis six mois qu’il gouverne ce pays, je ne m’en étais pas aperçu. Ces gens du Parisien libéré sont de singuliers précurseurs, je les en félicite.
26 novembre : Rénovation et idées
Premier « Forum de rénovation » du Parti socialiste consacré à la Nation. A cette occasion, François Hollande a prévenu les adversaires du PS que ce dernier allait engager « la bataille des idées ». « Enfin ! » serait-on tenté de s’exclamer. Il convient bien naturellement d’approuver cette initiative du Premier secrétaire. Mais, dans le même temps, il est nécessaire de garder présent à l’esprit ce vieux précepte de Machiavel : « Ne jamais déclencher de guerre sans avoir la certitude de la remporter ».
29 novembre : Fin de règnes
Mon lointain successeur vient de s’exprimer à la télévision. On aurait dit un étudiant de Sciences Po passant l’oral blanc de Président de la République. Pourtant, ses interlocuteurs, Arlette Chabot et Poivre d’Arvor, ont été très gentils, polis, lisses, prévenants… Que n’aurait-on pas dit s’ils s’étaient (de leur vivant, j’entends…) comportés avec moi de la sorte ?
Cela dit, je me mets à la place de mon lointain successeur, ça doit être intimidant de se retrouver face à des gens qu’il voyait déjà à la télévision lorsqu’il était enfant. Il a dû se sentir proche de ma génération. Vieux, si vieux, lui qui veut se montrer jeune, si jeune, avec ses culottes courtes et ses chaussures de sport.
Pour ma part, j’avais recours aux services aux services de Poivre d’Arvor lors d’entretiens télévisés quand les circonstances exigeaient dans ce cadre la présence symbolique de l’un de ces représentants des grands médias audiovisuels au service des puissances d’argent. Il remplissait très bien l’office, dont il était ignorant, car il ne résistait jamais à l’envie de faire le malin.
Le 14 juillet 1993, par exemple, il est allé jusqu’à me demander si j’allais appliquer les directives du Premier ministre Edouard Balladur, lors d’un prochain sommet des pas industrialisés. Je l’ai remis à sa place vite fait. J’ai gommé illico son petit sourire méprisant en lui rappelant que, décidément, certains hommes ne changent pas, que la « marque de fabrique » reste la même tout au long de leur vie, et que je le reconnaissais bien là. Il n’a pas moufté par la suite. A la fin de l’entretien, auquel participaient également Paul Amar et Jean-Pierre Elkabbach, ce dernier, toujours un peu mielleux, est venu me voir pour s’excuser du comportement de Poivre. « On lui avait pourtant dit avec Paul qu’il ne fallait pas vous poser cette question comme ça ». Il avait l’air désolé de ne pas avoir pu contenir l’expression des mauvais penchants de son petit camarade et j’ai compris qu’il craignait de passer pour son complice. Je l’ai rassuré ; ça ne coûtait rien.
Quant à Arlette Chabot, mon dieu, quel ennui que cette journaliste… Incapable de parler d’autre chose que de petite politique. Les arbres, les élises, les livres, rien ne l’intéresse, c’est à désespérer. Dès 1974, après un voyage en province accompli en sa compagnie, ma religion était faite. Toujours me presser de questions.
« Et que pensez-vous d’Untel ? Et que ferez-vous d’Untel ? Et vous avez entendu ce qu’a déclaré Untel ? » C’était assommant.
Arlette Chabot promène depuis toujours un visage triste et austère de duègne, ces dames de la petite noblesse ibérique chargée de veiller autrefois à la bonne éducation des jeunes reines d’Espagne. On l’imagine sans peine, la mine sinistre, pénétrant dans la chambre de la souveraine pour lui rappeler les devoirs de sa charge : « Une reine d’Espagne n’écoute pas de musique quand le roi est à la chasse ! », ou bien encore : « Une reine d’Espagne n’accepte pas de fleurs, même pas du roi ! »
Une fois, en novembre 1992, j’ai accepté un entretien à la télévision avec Arlette Chabot et Ruth Elkrief. A la fin, mes collaborateurs m’ont dit que j’avais donné l’impression de privilégier l’une par rapport à l’autre en termes d’attention et de prévenance. Ce n’était pas faux. Dès que je me tournais vers Arlette Chabot et que j’entrevoyais ce visage de duègne inflexible, je me sentais aussi désarmé qu’une jeune reine d’Espagne surprise au balcon à respirer un bouquet de myosotis tout en écoutant suavement une sérénade de Ruy Blas. Mes réponses s’en ressentaient. Je m’étais donc tourné plus qu’à mon tour vers Ruth Elkrief, qui me paraissait joyeuse et avenante. Elle était comme une petite reine d’Espagne, insouciante, oublieuse de sa duègne, contente d’être là. Mon plaisir de m’entretenir avec elle reflétait son plaisir, comme la feuille est un miroir dans lequel se reflète le ciel.
Tout bien réfléchi, Poivre et Chabot, ces deux-là datent un peu. D’ailleurs, cela a sauté aux yeux de mon lointain successeur, surtout Guéant et Louvrier qui, pourtant, ne m’aiment guère, mais ont enfin trouvé un sujet d’agrément. Ils ne l’ont pas dit devant les intéressés, amis à leur maître. Ce dernier a approuvé instantanément : « Trouvez m’en d’autres », a-t-il conclu sobrement.
Ces passages sont exellents !!!
Cette façon de rédiger les pensées d’un "défunt" en balançant quelques portrait est top original !!!
Cela me fait penser au journal de Carla B dans le Canard,
Avant je commençais ma lecture du Canard par par les dessins maitenant, je commence par le journal de Carla B