Du Porte et des jeux, et vous aurez la paix sociale ! C’est pour ça qu’il doit absolument rester en place.
La polémique qui chauffe les orteils de Didier Porte est de saison. L’humour politique a moyennement bonne presse dans les sphères du pouvoir et fort est de constater que certains jugent qu’un exemple en place publique est nécessaire pour calmer les ardeurs de ceux qui chaque jour se paient la poire de nos glorieux dirigeants.
La curée était pour Guillon il y a un an, un coup d’épée dans l’eau. Cette année c’est Porte la cible. Passons sur la qualité de la chronique incriminée dont l’auteur reconnaît lui-même (voir plus bas en vidéo) qu’elle n’était pas du meilleur cru. Nous n’osons croire qu’un petit « j’encule Sarkozy » prononcé au second degré puisse provoquer le licenciement d’un chroniqueur aux dix ans de maison et milliers de papiers dont aucun n’a donné lieu à une quelconque plainte…
Nous ne prendrons pas la défense de Porte, les auditeurs de France Inter qui inondent de courrier la direction de cette magnifique station s’en chargent, c’est leur rôle. France Inter est avant tout leur radio. Ils en sont doublement propriétaires. Ils la financent avec leurs impôts et ils lui donnent une existence en l’écoutant. Cherchons juste à dégager la signification politique de cette tempête dans un verre d’eau.
De quoi Porte est-il le nom ? De l’humour politique, de la satire radiophonique ? Est-ce parce qu’il est le chroniqueur le plus clair et le plus politique de sa station, voire de France, qu’on veut défriser sa moustache ? Ou parce qu’il ne rate personne et que sa botte est aussi redoutable que redoutée ? Non. Porte est le chiffon rouge de la révolte, agité devant le nez du peuple énervé. Un dérivatif aux envies d’en découdre. Du Porte et des jeux, et vous aurez la paix sociale ! C’est pour ça qu’il doit absolument rester en place.
Ce que le pouvoir imbécile n’a pas compris, c’est que le poil à gratter des ondes roule pour les puissants, et ce depuis toujours. Il nous « presse de rire de peur d’être obligé d’en pleurer » comme aurait dit Beaumarchais. Ce qui en fait l’allié objectif du régime. Après l’avoir écouté, l’auditeur retrouve le sourire et peut reprendre le cours de sa journée, sa révolte rangée au placard du rire, et ne songe plus à prendre la Bastille. La chronique de Porte est ainsi une version contemporaine du carnaval d’ancien régime, quand le peuple était autorisé à moquer l’aristocratie, ça défoulait et ensuite chacun retournait à son état.
Si Porte est dégagé, on pourra pas dire qu’on n’avait pas prévenu. L’auditeur en manque deviendra très vite grognon, digérera mal son déjeuner et cassera les noisettes de tout son entourage l’après-midi, chaque jour de la semaine. Cela multiplié par deux millions d’auditeurs, ça peut vous stresser tout le corps social, faire sauter deux ou trois points de PIB et briser tous les effets positifs des réformes courageuses du gouvernement pour que la France retrouve le sentier lumineux de la croissance. Porte, c’est que du bonus. Les salariés heureux bossent mieux et repoussent leur révolte à la chronique suivante. Ce serait non seulement injuste de le virer car il fait bien son travail, mais en plus inefficace économiquement - un crime en période de crise.
Super la démonstration, mais on peut aussi bien appliquer cette logique de défouloir à tout ce qui critique le pouvoir. Le brave couillonné politique "métro (auto)/boulot/dodo" et qui en a marre de l’austérité qu’on lui inflige alors que les puissants se gavent tant et plus et qui lit les dénonciations de cet état de fait par des médias comme Bakchich se sent rassuré par l’existence de ce "contre pouvoir" qui finira bien par faire prendre conscience aux autres de la nécéssité d’arrêter le massacre et peut retourner bosser l’esprit rassuré par cette perspective d’un changement dont il n’aura pas à prendre l’initiative.
Autrement dit tant qu’on est pas dans un régime complètement totalitaire la dénonciation des abus par les médias "contre pouvoir" ne finit elle pas par devenir un alibi de"démocratie" pour le pouvoir en place ?
En attendant Didier Porte a pour lui d’avoir dénoncé régulièrement la détention arbitraire de Julien Coupat quand ça ne faisait plus le buzz depuis longtemps, et Backchich ?
On a connu meilleure défense des humoristes…
Pourquoi D.Porte ? peut-être parce qu’il fait (le plus souvent) dans ses chroniques un véritable travail de journaliste politique.
2 erreurs : c’est un certain S. qui est le propriétaire de FI - dixit P.Val.
les courriers à FI se plaignaient de cette chronique - pour exemple, le courriel de cette mère d’une petite fille de 8ans se plaignant de devoir ( !) et ne pouvoir expliquer un certain terme. Décidément, on n’apprend plus rien à l’école !
Remarque tout à fait lucide.
Ce sont des militants qui manquent de nos jours, qu’ils soient comiques, acteurs, salariés, ou autres.
Ah oui, j’allais oublier ! Et des syndicats aussi…
S’il manque des syndicats, il manque aussi des syndiqués ! Il est toujours de bon ton de critiquer les politiques (que nous élisons …), et les syndicats (auxquels les salariés n’adhèrent pas !). Le 24 juin, nous nous compterons dans la grève, mais aussi dans la rue. (Et quand ces mouvements ont lieu le samedi, c’est pire !!)
Nous aurons les retraites que nous méritons.
>>S’il manque des syndicats, il manque aussi des syndiqués !
Et pourquoi d’après vous ? Se syndiquer à des syndicats étatistes et légitimistes c’est se tirer une balle dans le pied, c’est aussi absurde et vain que de voter dans des élections où tout est pipé (candidats du système, média des possesseurs des outils de production). Vouloir éteindre un feu avec de l’essence, voilà ce à quoi revient l’idée de lutter par le biais de syndicats non révolutionnaires et "réformistes" ou par le biais de la mascarade démocratique.
Se sont les ouvriers et les salariés unifiés qui, seuls, peuvent prendre leur destin en mains (via les AG intersectorielles, la désignation de camarades chargés de tâches préétablies et circonscrites, révocables à tout moment et avec un salaire d’ouvrier moyen etc…) et en aucun cas de petits chefs syndicaux ou des aristocrates politiques, toujours laquais des maîtres des moyens de production, n’agiront dans l’intérêt des ouvriers/salariés.
C’est pourtant bien les partenaires sociaux qui signent les accords avec le gouvernement concernant les retraites non ? Manifester, pour qu’après Chérèque, Thibault et compagnie aillent signer sans rechigner, je vois pas trop l’intérêt.
Je ne rejette par ailleurs pas la faute sur les syndicats. Si les médias en France n’étaient pas autant inféodés au grand patronat, peut-être que "l’opinion publique" penserait autre chose de ses acquis sociaux et que les décisions seraient différentes.
Concernant les politiques, on pourrait dire qu’on élit les politiques qu’on nous propose aussi…
Cdlmt