Pourquoi fallut-il que l’entretien de Nicolas Sarkozy sur France 3 à la veille de son entrée en fonctions de Président de l’Union européenne commençât par une petitesse, mais pas de son fait ?
Dans son introduction, Paul Nahon, directeur de l’information de la chaîne, remarque que c’est la deuxième fois (seulement) qu’un Président de la République se déplace chez les journalistes quand c’est d’ordinaire l’inverse. Ah bon ? Quel Président ? La question, pourtant évidente, ne recevra pas de réponse. Le maître de cérémonie craindrait-il de citer un pareil précédent, un pareil exemple devant son hôte ?
La suite de l’émission montrera qu’il a eu tort. Nicolas Sarkozy reprendra l’information incomplète. Comme pour tendre la perche à son interlocuteur et moquer sa prudence à la fois. Pas de réaction. Mais lui sait bien que le précédent remonte au 22 mars 1988 lorsque François Mitterrand se rendit sur le plateau du 20-heures de ce qui s’appelait Antenne 2 pour mettre fin à un secret de Polichinelle : qu’il était candidat à un second mandat.
La pusillanimité du directeur de l’information était d’autant plus malvenue que, ce soir-là, Nicolas Sarkozy avait limé ses dents. Il était tout sauf agressif ou même sûr de lui. Véhément souvent (la TVA sur les produits pétroliers, les reconduites à la frontière, l’avenir de France Télévision), mais toujours circonspect, sinon fataliste ; n’allons pas jusqu’à désabusé, encore moins résigné ; ce n’est pas le genre de la maison.
La « prestation » avait des allures de remake. On croyait retrouver le candidat de l’an passé dans ses déclarations. La présomption en moins. Oserait-on dire la modestie en plus ? Ce serait quand même exagérer. Le conseil de Valéry Giscard d’Estaing d’assurer « une présidence modeste » a juste provoqué un bref moment d’ironie chez son successeur. On ne saurait lui donner tort.
Cependant, s’il annonce la TVA à 5, 5 % pour la restauration (aujourd’hui, 19, 6 %), ou une modulation de cette taxe pour les produits pétroliers, il se garde bien d’en faire une promesse, précisant même qu’il serait prématuré de croire que ces modifications seront acquises durant son court mandat.
Il est manifeste que, pour lui, le débat est rien moins qu’improvisé ; qu’il a, en ces temps de baccalauréat, « chiadé son sujet », avec l’aide de ses conseillers en communication, ces spin doctors chers à William Jefferson Blythe-Clinton ou à Tony Blair. Il confirme là sa réputation de bosseur et fournit comme en se jouant chiffres, dates et événements. Autant qu’on ait pu le voir à l’écran, aucune antisèche devant le candidat, qui s’exprime sans notes. Il n’a, en particulier, rien oublié de ses fonctions de ministre du budget (1993-1995) et de ministre de l’économie et des finances (mars-novembre 2004).
Si bien qu’il n’éludera aucune question… à l’exception d’une seule : lorsqu’il est interrogé, ce qui était légitime, sur le nombre de personnes dont il faut contrôler l’identité ou décider l’arrestation pour parvenir au chiffres de 25 000 reconduites annuelles selon l’objectif assigné à Brice Hortefeux, ministre chargé de cette peu ragoûtante mission.
Alors, la parole du Chef virevolte, se contorsionne, s’évade à droite, fuit à gauche. Ah ! ce numéro, cet énorme clin d’oeil sur son coeur qui est à gauche, physiquement certes, mais (Comprenez-moi ! dit notre prestidigitateur) pas seulement…
À cette regrettable exception près (qui signifie beaucoup), la franchise, mais bien maîtrisée, du nouveau Président de l’Union était telle qu’on en venait à se demander si, à force lui aussi d’être prudent, il ne plaidait pas (principe de précaution !) le possible échec du semestre qui s’ouvre. La mauvaise foi du Président polonais, qui refuse, malgré sa promesse d’avril dernier, de signer la loi de ratification du traité de Lisbonne votée par la Diète et le Sénat (négocié par lui, signé par lui le 13 décembre 2007 !) en est un mauvais présage supplémentaire.
A lire ou relire sur Bakchich.info
Et voici le comité d’accueil qui attendait le Président à son arrivée dans les locaux de France Télévisions, ce lundi soir…
http://www.dailymotion.com/video/x5ywav_le-comite-daccueil-de-sarkozy-a-fra_news
Les images de Sarkozy en "off" avant son interview sur France 3 http://www.dailymotion.com/video/x5yyb9_sarkozy-en-off-sur-france-3_news
France 3 a lancé mardi matin une enquête interne pour déterminer "pourquoi et comment des images tournées avant le direct ont pu quitter France Télévisions". Par ailleurs, selon le site Arretsurimages.net (sur abonnement), la réflexion du Président -"ça va changer !"- concernait la France, après une déclaration de la journaliste Véronique Auger
Et personne n’a mentionné au président du pouvoir d’achat que l’Insee avait revu à la baisse de 0,1 point la croissance du PIB français au premier trimestre ?? Sur l’année, l’Institut prévoit une croissance de 1,6%, alors que le gouvernement s’en tient à sa prévision de 1,7-2,0%…
http://www.impots-utiles.com/insee-la-croissance-revue-a-la-baisse-au-premier-trimestre-2008.php