Voix nasillarde, sale caractère, foncièrement egoïste, Bob Dylan a eu droit à un documentaire signé Scorsese, et diffusé sur Arte. On a que ce qu’on mérite, et le talent permet beaucoup…
Trois heures trente sur Dylan, n’est-ce pas longuet ? Pas du tout, on en supporterait davantage surtout que ce « No Direction Home », filmé par Martin Scorsese en 2005 ne raconte que l’éclosion de l’artiste et son âge d’or (Arte, mardi soir). Dans TéléObs François Forestier fustige l’« interminable portrait » d’un « poète renfrogné ». Hé ! Faut pas voir la tronche mais la tranche (d’histoire) ! Dylan est sorti de la cuisse de Woody Guthrie et de Pete Seeger, ses pères spirituels.
Né dans un bled du Minnesota, Robert Zimmerman – de son vrai nom – devient vraiment bon chanteur après quelques mois passés à New York, à Greenwich Village, chaudron musical et littéraire des années 60. Il a cette capacité à faire l’éponge, à s’imprégner de tout, et en même temps à se concentrer sur lui, à écarter les gêneurs et les médiocres. Quand les producteurs cherchent des « belles voix », Bébert Zimmerman cultive son ton nasillard. Il couine, il miaule et cela marche ! Pas de concession, pas de scrupule excessif… Dylan est un piqueur et un égoïste : ses meilleurs amis le racontent sans amertume, jusqu’à Joan Baez, sa compagne d’un temps, sidérée que « Bobby » ne l’accueille pas à ses cotés sur sa scène alors qu’elle a partagé son micro avec lui quand elle était plus connue que lui. Pourtant aucun regret, aucune critique cinquante ans plus tard chez ses proches, toujours fascinés, tant la personnalité de Dylan est solaire.
Mais aussi ténébreuse. Revenant de New York dans son bled, il confesse avoir passé « un pacte (deal) avec le diable », dans la grande tradition des bluesmen : chanter, c’est vendre son âme…L’ambivalence du personnage éclate dans ces histoires quotidiennes qu’il chante comme un prêcheur, écrites en clair-obscur : la jeunesse contestatrice y entend la révolte, l’engagement politique mais Bébert le Gratteux est au-delà. Poète, il refuse de jouer les porte-parole et le chanteur engagé. Il déçoit les militants des droits civiques même s’il est dans tous les bons coups, comme avec Martin Luther King lors de la marche de Washington. Quand il sort une guitare électrique, son public folkeux est outré et déçu, sur le thème « on vient entendre Dylan, pas un groupe de pop music ». « Judas ! », « Traître ! » hurle une partie de la salle. Ses concerts anglais sont houleux, les fans veulent de l’acoustique pure et dure, et ils n’ont pas toujours tort car le son n’est pas toujours bon et les paroles peu audibles.
Mais la Grand Bébert s’en fout. A une foule qui rêve d’amour universel, il chante « Like a rolling stone », un truc sarcastique et individualiste. D’ailleurs les tournées le saoulent. Les fans deviennent agressifs et les journalistes posent des questions stupides du genre « pourquoi chantez-vous ? ». En 1966, le Zim’, au bout du rouleau, a composé tous ses chefs d’œuvre. Il s’éclipse. Occultation du prophète…Plus tard, il aura ses trip religieux (juif, chrétien) mais ce n’est pas le sujet de Scorsese. Doit-on le haïr parce qu’il a prêché avec les « born-again » ? « Je n’essaie pas d’être sympathique… On peut aussi tuer par gentillesse » explique le génial renfrogné.
Un papelard qui se veut iconoclaste mais qui en réalité n’est qu’un médiocrité pleine de jalousie rancunière.
Aucun "chanteur" français (Brel est belge & Brassens trop monocorde) n’atteindra jamais la popularité et le talent de Bob Dylan, Aucun.
Même pas Goldman ! Ahahahhahaha !!!