La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) remettait à Nicolas Sarkozy le 8 avril dernier son rapport annuel. Édifiant ! Flics, pandores ou matons, 90 pages de violences physiques ou psychologiques recensées en toute indépendance. Enfin, officiellement. Car les bâtons mis dans les roues de l’organisme sont nombreux : la déontologie ne semble pas vraiment être la priorité du gouvernement ou de certains policiers.
144 dossiers sont arrivés sur les bureaux de la CNDS en 2007. Et 117 seulement ont été traités, dont la plupart dataient en fait de 2006, voire 2005. A priori, bien peu. C’est d’ailleurs l’argument de l’Unsa-police, qui dénonce : « Une stigmatisation de l’action de la Police nationale en pointant à la marge des faits qui ne concernent qu’une minorité d’agents ». Réponse du secrétariat général de la Commission, contacté par Bakchich : « Les cas sont en fait beaucoup plus nombreux : il existe un chiffre noir, en France, sur les violences sécuritaires. » Franck Fievez, du service communication de l’Unsa, est d’ailleurs le premier à reconnaître que « La CNDS n’a pas forcément les moyens, ni la notoriété, pour faire plus ». La notoriété, sans doute. Les moyens, c’est une évidence. Quant aux pressions, elles sont si nombreuses que la Commission ne semble être concurrencée que par la seule fête de la bière. À tel point qu’en privé son président, Roger Beauvois, est un tantinet inquiet pour l’avenir de la CNDS.
Un budget dérisoire. La déontologie de la sécurité a un prix. En France, il est de 760 400 €. Une peccadille. Les effectifs s’en ressentent : treize membres, plus neuf personnes chargées du secrétariat. Pour la France entière, 22 super-enquêteurs évidemment débordés par les dossiers. Les membres perçoivent une indemnité qui repousserait un Rmiste : 170 € par mois. Ils réclament donc un alignement sur l’indemnité touchée par le Commissaire du gouvernement, soit environ 1500 € mensuels.
Noyautage gouvernemental. Car, et oui, la CNDS compte depuis mai 2007 un Commissaire du gouvernement : Pierre Debue, ancien directeur de la Police aux frontières. Pourtant, la Commission s’y était longtemps opposée, prévoyant une perte d’indépendance. Par bonheur, « ça se passe très bien avec M. Debue, qui est très compétent et apporte des renseignements et des contacts. » souligne la Commission. Certes. Mais qui sait si son successeur sera aussi dévoué et coopératif ? Interrogée par Bakchich à ce sujet, Isabelle Denise, responsable du service justice et police à la Ligue des droits de l’homme (LDH), s’inquiète : « C’est évident : le loup est entré dans la bergerie. Ce manque d’indépendance fait d’ailleurs désordre dans le Conseil de l’Europe. Pas terrible pour notre image diplomatique. Mais parler au gouvernement, c’est comme si vous parliez au mur derrière moi… ».
Mépris ministériel. La Commission, après enquête et audition des différentes parties, émet des avis et recommandations auxquels sont censés répondre les ministres respectifs, à savoir l’Intérieur et la Défense. Or, depuis le passage d’un certain Nicolas Sarkozy, le ministère de l’Intérieur a pris l’habitude d’ignorer superbement les avis de la Commission, et envoie au front un directeur du service de la police concernée. Une mauvaise habitude reprise par la Défense, il est vrai plus habituée à envoyer un sous-fifre au front. Isabelle Denise l’explique par « La compétence des membres de la Commission ; des politiques, magistrats ou anciens policiers, dont il est difficile de les taxer de « gauchisme » pour mieux les discréditer… Mieux vaut donc les ignorer. ». En tout cas, une version originale du « Cause toujours, tu m’intéresses », qui en dit long sur la place accordée à la déontologie par les gouvernements successifs.
Pressions policières. Autre gros point d’inquiétude, et non des moindres : les pressions exercées par les policiers incriminés qui portent plainte pour « dénonciation calomnieuse » contre les plaignants. Tout est parti d’une saisine reçue en 2006, où un témoin présent à l’aéroport de Toulouse avait dénoncé le comportement de fonctionnaires de police frappant à terre un homme menotté au cours d’une expulsion. Ce témoin avait ensuite été l’objet d’une plainte pour « dénonciation calomnieuse », le procureur de la République ayant classé la procédure, après une réparation sous forme d’excuses et d’un dédommagement de cent euros pour chaque policier, sans prendre l’avis de la CNDS. Qui n’a pas tardé à alerter le ministère de la Justice, le 9 octobre dernier. Toujours sans réponse. Pour la Commission, « c’est notre plus grosse inquiétude. C’est la négation de notre action. » Isabelle Denise renchérit : « Cet outil juridique est utilisé pour dissuader les citoyens de saisir la CNDS. »
C’est pas la joie. Tous ces bâtons dans les roues de la CNDS sont emblématiques d’une certaine conception de la déontologie en France. Franck Fievez (Unsa-police) le reconnaît : « Nous avons du retard dans ce domaine par rapport à la culture anglo-saxonne. Mais la police est le seul organe de sécurité français doté d’un code déontologique. » Isabelle Denise parle de « malaise et de perte de confiance entre police et citoyens. C’est aussi l’effet du discours des politiques qui ne réfléchissent pas à leurs propos, et insufflent un climat de société malsaine. » Elle compte sur les directives européennes et onusiennes pour ramener la France à un peu plus de raison en matière de déontologie sécuritaire. Le Commissaire européen aux droits de l’homme devrait bientôt venir en France. Sans doute nous en touchera t-il deux mots…
http://www.cnds.fr/
http://www.unsa-police.com/
http://www.ldh-france.org/
un truc que je ne comprends as, pourquoi la police, puis qu’elle n’a rien a cacher, ne collabore-t-elle pas plus avec cette institution ?
Par collaborer plus, j’entends jouer le jeu, la soutenir quand elle réclame des moyens et des hommes, répondre rapidement aux questions quand il y en a, bref, pourquoi la police ne montre-t-elle pas plus d’empressement à participer à son contrôle ?
Quis custodiet ipsos custodes ? comme dirait l’autre…
La CNDS a été crée suite à la condamnation de la France pour "torture" dans l’affaire Selmouni c. France à la Cour europeene des Droits de l’Homme. Cette mesure generale suite à l’arret a été imposé par le conseil des ministres du conseil de l’europe.
Force est de constater que la CNDS saisie de faits graves commes des violences, traitements degrandants et inhumains, ne saisit pas le procureur de la République comme l’oblige l’article 40 du code de procédure pénal.
Il est utile de saisir la CNDS par le biais de son député/sénateur pour épuiser l’un des recour internes.
Il est conseillé d’attaquer en meme temps l’agent judiciaire du trésor au tribunal d’instance du 13e (procedure civile) pour la violation de l’article 3 de la convention.
Et de faire une requete a la Cour europeene des Droits de l’Homme en meme temps, c’est plus facile a faire que de saisir la CNDS.