La doctrine militaire de David Galula, officier français mort en 1968, est enfin reconnue… Grâce aux Américains.
Les ignorants de la chose militaire n’en ont jamais entendu parler. Et pourtant, il est la star des états-majors français, le nouveau cocorico des troupes. Galula ! Celui dont le nom ressemble à un cri de ralliement n’est pourtant pas un héros tombé au combat. Juste un officier français de la coloniale mort en 1968, aujourd’hui ressuscité pour les besoins de cause : la glorification d’une doctrine militaire française enfin internationalement reconnue…grâce aux Américains !
David Galula est cet officier qui a élaboré dans les années 50/60, notamment grâce à l’expérience du terrain algérien, une nouvelle théorie de la lutte contre-insurrectionnelle. Celle-ci prônait, à rebours des doctrines belliqueuses en vigueur à l’époque, le recours à une stratégie de proximité en direction des populations civiles pour isoler les insurgés. Plutôt que la violence massive qui conduit les civils à rejoindre les insurgés, les armées doivent les protéger et gagner leur adhésion. Telle est la doctrine à la française dont on chante aujourd’hui les louanges, notamment aux alliés de l’OTAN, comme la solution pour sortir de la crise afghane…
De quoi faire faire à Galula une galipette dans sa tombe. Car la France, de son vivant, ne lui a pas a été si douce. A l’époque, l’institution militaire juge les réflexions de ce saint-cyrien quelque peu intempestives et l’envoie prendre l’air en Virginie pour une mission de formation. L’officier d’infanterie y est remarqué et l’originalité de ses réflexions fait mouche. L’Amérique lui offre un pont d’or pour prolonger ses recherches, notamment à Harvard. Il quitte l’armée française qui lui refuse son détachement, et s’installe en 1962 dans sa nouvelle patrie d’élection. C’est donc en anglais que « notre » lieutenant-colonel publie ses travaux, tient conférences, fait des émules.… Et pas des moindres.
Héritier revendiqué de la doctrine galulesque, le général quatre étoiles David Petraeus, commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan est fan. Il s’est largement inspiré des théories de Galula pour l’Irak en lançant en 2007 l’opération dite du « surge » (renforts) sous administration Bush, et que Barack Obama veut appliquer à l’Afghanistan. Autrement dit, se rallier les populations civiles pour mieux isoler les insurgés, et limiter les bavures. Quitte à monnayer leur soutien : c’est la Petraeus touch sur les préconisations de son mentor français dont il a préfacé l’ouvrage de référence, « Contre-insurrection – Théorie et pratique », publié en anglais en 1964 et qui vient d’être traduit
Acerbe, Petraeus écrit que si « la vision de Galula a permis de faire évoluer la doctrine et la mentalité américaines », « on peut imaginer que des effets similaires se fassent sentir en France sur la doctrine, l’entraînement, la formation et jusque dans la politique de défense »… Hervé Morin appréciera !