Le regard acerbe de Gilbert Comte sur la soirée télé de la victoire sarkozienne.
Malgré tant d’immondices, cette fichue télé garde bien des ressources, quand, certains soirs comme celui de l’élection présidentielle, notre époque se fixe à jamais sur ses images et certaines figures. Maints témoignages existent par exemple sur Louis XVI du matin de son sacre à la montée vers l’échafaud. Aucun ne reproduit visuellement au pli le plus mince du front de ses réflexes intimes, comme nous regardions dimanche le malheureux Hollande tout en sueurs au dedans de lui-même. Sous de Gaulle encore, les techniques ne saisissaient pas encore les expressions d’aussi près. L’imperturbable et glorieux sourire de Ségolène en pleine déconfiture laisse à lui seul un témoignage historique sans recours sur nos jours et délires nationaux.
Comment imaginer qu’après un échec aussi sévère, par rapport à ses prétentions, la gourde resplendissante semble toucher enfin la Terre Promise ? Après tout son courage mérite le respect. Dans cet ordre, toute défaite a sa dignité. À condition d’en prendre la mesure. « A-t-elle compris qu’elle a perdu », se demandaient des socialistes à la seule vue de ses dents blanches. Pas sûr ! Depuis des mois qu’elle tourbillonne, la malheureuse n’appartient plus à son parti, à ses amis, ni probablement à elle-même. Comme Olympia, la poupée mécanique des Contes d’Hoffmann, une agitation convulsive l’emporte dans un rôle, dans un rêve ou rien ne peut plus l’arrêter. Jusqu’à ce qu’un choc la brise ou qu’un ennemi la casse. Dans la grande plaine, les éléphants ne songent qu’à la saisir dans leurs grosses trompes pour lui rompre les reins. Mais elle s’en fiche, encore ivre d’elle-même à la télévision, comme dopée à l’héroïne.
Depuis le matin TF1, la Deux, les radios célèbrent le très faible chiffre des abstentionnistes. « Quelque chose de nouveau commence », assure Julien Dray, gras, solennel. Devenu député européen, Jean-Marie Cavada pronostique tout aussi gravement « la repolitisation de notre pays ». Enfin déclaré vainqueur, Sarko sort justement de ses bureaux rue d’Enghien, avec autour de lui des proches, de la police, mais presque personne sur les trottoirs, ni de silhouettes aux balcons. Dès qu’ils échappent à l’excitation médiatique, nos compatriotes retournent d’eux-mêmes à l’indifférence. Au cours de la soirée, de joyeux lurons envahisseront bien la place de la Concorde pour danser. Seulement quand ils sauront le succès tout à fait sûr.
En attendant, le cortège du conquérant parcourt un Paris sans âme. Avec l’inégalable aplomb si utile dans son rude métier, David Pujadas parle des « personnes massées sur les boulevards ». Mais sa propre chaîne montre partout du vide, jusqu’à la rue Tronchet, le boulevard Malesherbes. L’animation ne débute qu’aux abords de la salle Gaveau. Le nouveau Maître doit y prononcer un important discours.
Sur les plateaux des télévisions, autres absences remarquables. Auparavant, leurs débats comportaient la participation de « grands » intellectuels qualifiés pour décrire l’état réel du monde sous ses apparences parfois trompeuses. Ce soir, pas un seul philosophe baba-au-rhum à la BHL en vue, ni une seule religieuse au chocolat comme Jacques Julliard. Disparition aussi de l’espèce intermédiaire, entre la presse et Sciences-Po, comme Jean-François Kahn ou Alain Duhamel. Dans ses nouvelles splendeurs, la République des Affaires renonce aux scrupuleux, même d’apparence. Elle réclame des élus responsables, « droits dans leurs bottes » comme Alain Juppé, présent ce soir malgré une condamnation judiciaire encore dans tous les esprits. Jean d’Ormesson, Franz-Olivier Giesbert surgissent bien quelques minutes pour courtiser la fortune, selon leur vocation essentielle. Ils émergent d’un monde fini.
Sarko, lui pénètre enfin dans la salle Gaveau, sous les applaudissements d’une foule enthousiaste. Symbolique, ce lieu où se donnent des concerts de première symphonie présidentielle. Avec une Ouverture d’exécution parfaite sur « sa fierté indicible d’appartenir à une grande, vieille, belle nation ». La promesse « d’en finir avec la repentance qui est une forme de haine de soi » étonne aussi agréablement. Au moins une vrai rupture après douze ans d’auto-flagellation chiraquienne. Dans la bouche d’un de Villiers, de Le Pen, des mots semblables provoquaient la foudre. Sur des pages entières, Le Monde, Libération hurleraient au négationnisme. Là, nulle critique.
À la surprise générale, Nicolas estimé si près des Américains prend ses distances avec eux à propos du réchauffement planétaire. Grosse entourloupe pour ne pas dire un mot de l’Irak. Le projet tout aussi bénisseur « d’une union méditerranéenne » présente l’avantage d’en confondre les riverains sans parler d’Israël pourtant au coeur de toutes les préoccupations. De plus en plus à l’aise dans le style noble, l’orateur confirme son projet de « réhabiliter la morale » dès son installation à la Présidence. C’est donc qu’elle en avait pris un sacré coup dans l’aile.
Aussitôt après, folle fête au Fouquet’s avec toute une bande de joyeux moralistes : Johnny Halliday, Bernard Tapie, Patrick Balkany, Alain Minc, les philanthropes Martin Bouygues et Vincent Bolloré etc. Manque l’Italienne Laure Manaudou. Elle recevra peut-être un télégramme. Le champagne coule à flots parmi les hurlements, les rires. À travers toute la France, 700 véhicules brûleront jusqu’à l’aube, avec 68 flics blessés. Pendant ce temps, place de la Concorde, Enrico Macias entraîne la foule à battre des mains pour Cécilia, étoile et lumière de la nuit. Au loin des ambulances ramassent des policiers au sol. Comme disait autrefois Jacques Bainville, l’un des meilleurs esprits de son époque : « tout est dans les commencements ». Courage les enfants !
Ds les commencements vous avez zappé le flop stratosphérique de mireille mathieu qui a cru pouvoir REcommencer une carrière.
un collector je vous dis. Et la foule, et vip ne comprenais ce qui se passait lorsqu’elle réaliser un putsh pour imposer sa chanson des années twist. chanson dont les paroles étaient connu que d’elle seule.
Au commencement… était la parole…de mireille