Histoires de « beaux voyoux », de Marseille à Palerme…
Le parrain des parrains de Palerme, l’un des cerveaux de la mafia sicilienne, Salvatore Lo Piccolo, a été arrêté mardi 5 novembre par des policiers du Service central opérationnel (SCO). Avec lui son fiston Sandro ainsi que deux autres mafiosi. Lo Piccolo était recherché depuis 25 ans. Il risque de passer presque autant de temps dans les geôles italiennes. Aussi, soucieux des conditions de détention des prisonniers, Bakchich lui donne un petit conseil de lecture afin que le brigand des temps modernes ne se languisse pas trop de ses aventures révolues.
L’ouvrage de Thierry Colombié, spécialiste de l’économie criminelle en France, retrace les motivations, le parcours, les faits d’arme, au quotidien, d’une bande de Beaux Voyous (titre du livre paru le 31 octobre aux éditions Fayard) trafiquants en tout genre, d’héroïne en particulier, sévissant à la fin des années 1970, d’abord à Marseille puis au cœur de « la Pieuvre », en Sicile. Pour écrire son opus, l’auteur s’appuie sur les confessions de ces malfaiteurs nostalgiques de la French Connection. En premier lieu sur les témoignages d’un dénommé Tintin. Décrit page 27 comme « un beau voyou notoire dans le Milieu, généreux avec les siens sans pitié avec les autres, et, paradoxalement, “respecté” par les policiers, (…) il était l’un des trafiquants les plus doués et les plus respectés du Milieu marseillais ».
À ses côtés, il y a Sté, Pietro le Sarde, Petit Pape, le Blond, le Brun, et puis aussi le Corse, pour qui « les armes, c’est comme le cœur. Comme on a un cœur, il faut avoir une arme, car si on n’a pas d’arme, on n’a pas de cœur » (p. 181). Un brin de sentimental dans un monde obsédé par le fric – Time is money… Et qui attire les friqués. « Les receleurs ont en effet leurs clients attitrés, du commissaire de police au grand chef d’entreprise, de l’avocat à l’homme politique, des habitués qui ne s’embarrassent d’aucun scrupule » (p. 34). Aussi, en 1982, l’avocat de Tintin accepte de le défendre moyennant la modeste valise… d’un million de francs. Le futur condamné précise qu’« il ne faut surtout pas croire que c’est exceptionnel ». Il poursuit : et puis après deux ans de préventive derrière les barreaux, c’est caviar et champagne à volonté. « Pardon ? Comment un détenu peut-il vivre cette “grande vie” à la barbe des gardes ? Eh bien tout simplement… dans le tunnel ! Car ici, un tunnel relie la cour d’appel à la geôle du poste de police » (p.15). Ces mafieux-là, c’étaient aussi les alliés des « nouveaux seigneurs du capitalisme sauvage (…) qui luttaient pour que la faucille et le marteau ne figurent pas sur les billets de banque » (pp. 43-44). Aujourd’hui, en ces temps de capitalisme exacerbé, qui pourrait croire que « la Pieuvre », devenue depuis lors internationale, n’intéresse plus les seigneurs ?