Appelant tardivement Pékin à la « retenue » et au « dialogue » avec le Tibet, Nicolas Sarkozy se verrait bien en médiateur entre la République populaire de Chine et le dalaï-lama, juste avant les JO. Un rôle délicat pour une diplomatie française peu optimiste sur le sujet, qui n’a jamais goûté l’activisme pro-tibétain d’une poignée d’élus français. Enquête
Après avoir longtemps tardé à s’exprimer sur la répression chinoise des événements du Tibet, au point d’être soupçonné de froideur et de mercantilisme, Nicolas Sarkozy est sorti de sa réserve, mardi 25 mars, en appelant Pékin, dans un langage convenu, à la « retenue et à la fin des violences par le dialogue au Tibet ».
Un message en ce sens a été adressé par le Président de la République à son homologue chinois Hu Jintao, en émettant le « voeu que le dialogue engagé depuis plusieurs années entre les autorités chinoises et des représentants du dalaï-lama reprenne rapidement et s’approfondisse ». Vœu encore pieux, puisque la Chine refuse absolument de dialoguer avec la « clique du dalaï-lama » accusée sans précaution d’être à l’origine des émeutes de Lhassa.
Comme souvent, Nicolas Sarkozy en a rajouté dans la gestuelle diplomatique, précisant dans son communiqué officiel, que la France était disponible pour « faciliter cette reprise du dialogue » dans le cadre du « partenariat stratégique franco-chinois ».
Autrement dit : vu les bonnes relations que la France entretient – et veut conserver, contrats économiques obligent – avec Pékin, le Président se verrait bien jouer un rôle de conciliateur entre le dalaï-lama et les autorités de Pékin. Rien de moins.
Sarko sera bientôt surnommé Super-Diplo, tant il est prêt à accourir pour résoudre tous les problèmes de la planète, du Tibet à la Colombie, en passant par la crise financière, la sécurité méditerrannéenne, la construction européenne ou le réchauffement climatique…
Fanfaronnade tardive ? « C’est vrai, Nicolas Sarkozy a mis le temps à réagir sur le Tibet, et je lui ai assez reproché » confie à Bakchich Lionnel Luca, député UMP des Alpes-Maritimes, qui préside le groupe d’études parlementaire sur « la question du Tibet » lequel rassemble 70 députés de tous bords. Mais l’idée que le Président puisse jouer un rôle de médiateur entre le dalaï-lama et la Chine, lorsque la France présidera l’Union européenne, en plein JO, l’été prochain, peut être intéressante. Lorsque nous sommes allés en Inde en 2005 pour rencontrer le dalaï-lama, celui-ci nous a répété que la France pouvait peut-être jouer un rôle, en conservant ses bonnes relations traditionnelles avec la Chine ».
En dépit des événements récents, qui n’incitent guère à pronostiquer une grande inflexion de Pékin, Lionnel Luca, ardent défenseur du « Tibet libre » avec une poignée de ses collègues, se remet donc à espérer modestement. Sans trop d’illusions. Reçu la semaine dernière à l’ambassade de la République populaire de Chine à Paris, le président du groupe Tibet a réitéré des demandes de visas pour une délégation de parlementaires français, afin de pouvoir se rendre sur place. Demandes déposées plusieurs fois depuis 2006… « Jusqu’à présent, les Chinois ont toujours refusé que nous allions au Tibet, en avançant des problèmes de sécurité… » Mardi, Bernard Kouchner, le ministre des affaires étrangères, a finalement assuré qu’il soutiendrait cette démarche des parlementaires auprès des autorités chinoises. Un geste bien tardif.
Ces dernières années, Lionnel Luca s’est bagarré à contre-courant de la diplomatie française toujours très pro-chinoise, entouré d’un petit groupe de députés droits-de-l’hommistes pro-tibétains, allant de l’UMP du Var Philippe Vitel à l’ancien ministre socialiste Jean-Louis Bianco, élu des Alpes-de-Haute-Provence. Pétitions, manifestations, accueil de jeunes Tibétains, déploiement de drapeaux chaque 10 mars (date anniversaire des massacres de Lhassa de 1959), voyage auprès du gouvernement tibétain en exil en Inde. Tout cela contre l’avis du Quai d’Orsay. L’un des députés pro-tibétains, Philippe Folliot (apparenté Nouveau Centre), s’était même baillonné dans l’hémicycle le 27 janvier 2004, lors du discours du président chinois Hu Jintao à l’Assemblée. S’attirant quelques foudres officielles.
Mardi 25 mars, dans la matinée, Lionnel Luca a entendu Bernard Kouchner s’exprimer sur le Tibet devant la commission des affaires étrangères de l’Assemblée. En dépit du communiqué de l’Elysée, le ministre, qui a discuté au téléphone, durant plus d’une heure et demie, le jour même, avec l’ambassadeur chinois à Paris, ne paraissait guère optimiste sur les chances d’entamer un quelconque dialogue avant les JO.
L’après-midi, après la séance des questions d’actualité à l’Assemblée durant laquelle trois députés ont interrogé Kouchner sur le Tibet, Rama Yade, la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme, est venue assister à une réunion à huis clos du groupe Tibet. Une quinzaine de députés, très remontés contre la répression chinoise, étaient présents, dont le socialiste Patrick Bloche, le radical de gauche François Loncle, le villepeniste François Goulard ou Philippe Folliot. « Rama Yade nous a écoutés, explique Lionnel Luca, mais elle a ajouté qu’il fallait tenir compte des réalités diplomatiques. » Autrement dit : on ne peut pas vraiment se brouiller avec Pékin.
De toute façon, à moins de nouveaux bains de sang trop « visibles » d’ici aux JO, aucun diplomate ne souhaite appeler ouvertement à un boycott des jeux olympiques. « Il ne fallait pas accorder les JO à Pékin, maintenant c’est trop tard, estime le président du groupe Tibet. Mais il faut utiliser les Jeux pour parler du Tibet, faire quelque chose pour les cérémonies d’ouverture et de fermeture, notamment avec les athlètes. » Le groupe parlementaire a d’ailleurs prévu d’auditionner rapidement Bernard Laporte, le secrétaire d’Etat en charge des sports, sur le sujet.
De leur côté, les militants des droits de l’homme préparent des manifestations lors du passage de la flamme olympique à Paris, prévue le 7 avril. Mais chut ! Le parcours de la torche est, pour le moment, tenu secret par le gouvernement. Question de sécurité, dit-on. En attendant un dialogue encore incertain, il ne faut surtout pas fâcher Pékin…
je vous recommande très chaudement de voir la vidéo de Charlotte Nenner, ancienne élue Verte au conseil de Paris qui proposa un voeu en décembre 2007 pour le boycott du passage de la flamme olympique à Paris :
http://charlottenenner.fr/
Il y a plusieurs manière de pratiquer le boycott ! Si le consensus semble se faire sur un boycott total, il reste d’autre manière de manifester sa désapprobation de la politique menée par le PCC en matière de droits de l’Homme.
Le débat est donc lancé, et j’invite tous les gens qui se sentent l’envie d’une action spectaculaire de militer en faveur du boycott politique de la cérémonie d’ouverture des JO de Pékin. Nos dirigeants occidentaux ne doivent pas commettre la faute politique lourde que serait d’assister et de cautionner des JO relais de la propagande des autorités chinoises.