Bakchich poursuit sa série de portraits des pairs de l’Empire. Au tour du vice-président, Xi Jinping, le très probable successeur de Hu Jintao.
Xi Jinping, c’est le prochain homme fort de la Chine, le plus que probable successeur de Hu Jintao. Il n’a rien fait comme tout le monde…. mais il a finalement réussi à accéder au poste convoité de vice-président de la République Populaire chinoise en mars 2008.
Longtemps donné perdant dans son combat pour le poste suprême face à Li Keqiang, il semble bien être enfin parvenu à rallier les « masses » du Comité Central autour de sa candidature si longtemps jugée « problématique ». Son ascension est tout un symbole pour le peuple chinois : le clan des provinces côtières (ou « le clan de Shanghai ») a, de nouveau, de beaux jours devant lui… et tant pis pour les pauvres !
Né en juin 1953 dans la province du Shaanxi, Xi Jinping (prononcer "Si Tinping") a tout juste 16 ans quand il est envoyé à la campagne pour accomplir son devoir de jeune instruit, comme le raconte sa biographie officielle.
Xi Jinping n’est en réalité pas vraiment envoyé à la campagne ; c’est bien plus la campagne qui vient à lui ! En effet, il est « nommé » dans sa province natale – le Shaanxi – à la brigade Liangjiahe dans la commune de Wen’anyi au district de Yanchuan. Ce district est une subdivision du comté de Yan’an le siège historique du Parti Communiste Chinois (PCC).
La vie « communiste » de Xi Jinping est donc placée sous les meilleurs auspices puisque le voilà à 16 ans à marcher sur les pas du Grand Timonier ; à courir même puisque le voilà adoubé par le PCC en janvier 1974.
La propagande centrale en fait vite son chouchou et l’on peut lire dès le début de l’année 1975 dans un article paru dans le journal local qu’« il remporte des combats de lutte contre des fermiers, est capable de porter un sac de blé de 110 livres (environ 50 kilos) sur chaque épaule, sur des kilomètres de sentiers montagneux sans montrer le moindre signe de fatigue ». Sa réputation d’endurance est en place…
Après son séjour à la campagne, le voilà à la capitale, en l’université Qinghua, étudiant ingénieur en synthèse organique fondamentale (1975-1979). Même moule politique que Hu Jintao, c’est donc sans surprise que son profil se calque sur celui de Hu Jintao.
Grâce à l’appui de son père, Xi Zhongxun ancien vice-président de l’Assemblée et ancien vice-Premier ministre, Xi Jinping entame alors son entrée dans le monde de la politique.
On ne peut comprendre Xi Jinping si on ne mentionne pas son illustre parenté. Xi Zhongxun est l’ancien gouverneur du Guangdong (1979-1981) mais surtout l’un des principaux artisans de l’ouverture économique de la Chine. Il concentre donc une « clientèle » incroyable entre les anciens cadres purgés pendant la Révolution Culturelle - et bien souvent rappelés au Centre via le Guangdong - et les nouveaux cadres rouges entrepreneurs.
C’est sur cette double allégeance que se hisse Xi Jinping pour partir à la conquête de la périphérie dans les années 1980, d’abord dans le Hebei (1982-1985) puis dans le Fujian (1985-2002). Ces choix d’affectation ne sont pas dus au hasard : le Hebei, province qui entoure Beijing, puis le Fujian, province qui fait directement face à « l’île rebelle » de Taiwan sont des postes stratégiques car ils permettent de brasser beaucoup beaucoup d’argent.
Ce n’est toujours pas un hasard si c’est là qu’il découvre aussi le monde du show business en se mariant avec Peng Liyuan (en 1987), une très célèbre chanteuse d’opéra et de chansons mielleuses chinoises. Cette dernière est aussi générale de l’Armée Populaire de Libération pour ne rien ôter à son charme… La comparaison habituellement faite avec notre Carla Bruni nationale ne nous semble pas si pertinente dans la mesure où Peng Liyuan est une véritable star en Chine, bien plus connue que son mari, « simple » homme politique…
Xi Jinping poursuit néanmoins sa carrière à l’écart du Centre et dans les fiefs des nouveaux riches au Zhejiang (2002-2007). Dans la province du commerce roi, il peut sans problème se poser en pourfendeur de la corruption et en défenseur de la morale socialiste du régime chinois entré de plein fouet dans l’économie socialiste de marché. Où quand le fils se retourne contre l’héritage du père…
En jouant sur sa stature de « père la morale », il est nominé au poste de secrétaire général de la municipalité de Shanghai en 2007 à la suite de la démission forcée de Chen Liangyu soupçonné d’une vaste affaire de corruption. Dans son discours de prise en charge, il peut promettre « d’apprendre vite, de servir les gens et d’être un bon dirigeant d’équipe ». Et de rajouter, dans ce discours très libéral pour l’époque qu’il a toujours pensé que « les fonctions individuelles avaient leurs limites et qu’il appartient à tout le monde d’obtenir des résultats ».
Une année passée à Shanghai pour stabiliser son réseau et le voici enfin appelé au Centre (2008) pour passer devant Li Keqiang. Néanmoins, voici le nouvel homme fort de la Chine, entre show business et paysan chinois, au devant d’une lourde tâche, puisqu’il lui faudra en ce nouveau millénaire essayer de réduire la fracture sociale toujours plus présente dans l’empire du milieu.
Pour un homme de pouvoir et d’argent, l’acclimatation risque de ne pas être si simple…
Les précédents portraits chinois sur Bakchich.info :